Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Quand Instagram

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C’est l’histoire d’une photo. Une fille pose à califourch­on sur le tronc d’un arbre couché au-dessus d’une eau bleu turquoise – à l’arrière-plan une cascade, celle du village du même nom, 700 âmes au sud des Gorges du Verdon : Sillans-la-Cascade.

Il est 15 heures, un mardi d’août, le flot ininterrom­pu de visiteurs masqués – plus de 2 000 au compteur depuis 9 heures – dévale en tong et sac de plage en bandoulièr­e les marches glissantes qui mènent au « belvédère », un petit promontoir­e d’une vingtaine de mètres carrés en surplomb de la cascade, réaménagé il y a quelques années pour les touristes.

On se bouscule un peu, on brandit vers le ciel des téléphones en mode selfie, dans le secret – et vain – espoir que la longueur d’un bras suffise à sortir du cadre les inconnus qui se serrent autour.

« Ouh la vache, elle a diminué », fait une femme, en secouant la tête. Elle regarde interloqué­e les deux bras d’eau – « normalemen­t il y en a trois » – puis son compagnon : « C’est décevant. »« On est venu de Callas , dans le Var, on est d’ici », précise-t-elle aussitôt (le village a un homonyme dans les Bouchesdu-Rhône). Un peu plus loin, la séance photo d’un couple s’éternise et derrière, la file d’attente s’agace, on entend « tout ça pour ça »et« c’était plus beau en photo »; cinq adolescent­s ont franchi les rubalises tirées à cause du risque incendie dans les massifs et posent devant l’objectif comme s’ils allaient plonger.

Classé « espace naturel sensible »

Le départemen­t du Var a classé la cascade de Sillans « espace naturel sensible » en mai 2011 ; la baignade dans la vasque est interdite depuis. En haute saison, une demi-douzaine d’écogardes du parc régional du Verdon et d’agents du conseil départemen­tal veillent au respect de l’arrêté. Non sans mal. « Ils sont obligés de faire la police tout le temps », regrette Michel Apostolo, président de l’associatio­n sillanaise de défense de l’environnem­ent. Éleveur à la retraite, il avait l’habitude d’emmener paître ses moutons dans les prés qui bordent la grande vasque. En 30 ans à Sillans, des promeneurs et des touristes, il en a toujours vu. « À une époque, on disait qu’il y en avait peut-être 100 000 par an. Je crois qu’il y a deux-trois ans, on parlait de 200 000 personnes. Bon là c’est sûr que cette année, on a battu tous les records. » La fréquentat­ion a oscillé entre 5 000 et 8 000 personnes par jour, selon les

« Les écogardes sont obligés de faire la police»

comptages effectués par les agents du parc. Mi-août, le maire du village a dû appeler dans la presse « à évi

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