Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

LA MIDINETTE HAUTE COUTURE « Plus je les observais et plus j’avais une folle envie de les dessiner. »

Lassée par la vie parisienne, l’artiste a choisi d’ancrer ses chevalets à La Londe. Sur un littoral varois où ses belles de toile, tombées du ciel de son imaginatio­n, auront l’éclat d’une étoile... Défile sur la toile de Rachel Bergeret

- RAPHAËL COIFFIER rcoiffier@nicematin.fr

Saint-Martin-d’Hères. Banlieue grenoblois­e. Dans sa chambre, la fillette de 7 ans costume ses poupées. Ses Barbie. Jusqu’ici nues. Avec tout ce qui lui tombe sous la main...

Elle rêve. Déjà. Rachel Bergeret. Elle rêve de petites mains habiles. De doigts de fée. De coups de ciseaux. Elle rêve. De longues robes de soirée. De tissus nobles et de dentelles légères...

Dans l’innocent secret de cet atelier enfantin, naît sa vocation. Entre couture et tricot, se maille en solo sa destinée. Le stylisme. « Je le répétais sans cesse à mes parents que j’en ferais mon métier. »

Deug d’Arts plastiques, BTS de modélisme industriel matériaux souples, un an de stylisme, et, enfin, l’oiseau s’en est allé affronter les éléments de vie. Sur les bords de Seine. En lisière du luxe en scène. Au coeur de La Mecque du prêt-àporter : le Sentier !

« Ah ça (!), ça m’a forgé un caractère. J’étais pleine d’illusions. Sauf que j’ai découvert que la mode était un métier d’argent. Une industrie. Moi, je ne pensais qu’à l’aspect créatif... » A 24 ans, la vérité, la jeune femme a basculé dans une autre dimension. Son premier contrat signé sur la table d’un bistrot enfumé, elle a, dans la foulée, mis le cap sur l’Inde. Ses croquis et son innocence sous le bras...

« Je faisais le tour des usines. Je choisissai­s nos produits. Puis je créais une collection en trois semaines. C’était assez génial. » Rachel vivra douze ans dans cette bulle de pretty woman où elle se sentait « princesse. C’était un autre monde. Exotique. Excitant... » Entre singes, vaches, éléphants, gourous vêtus de blanc, la petite Française taillait sa route. Renforçait sa cuirasse. Sans jamais, en parallèle, abandonner ses premières amours. Colorées...

« C’est vrai que je peignais toujours des toiles. A l’huile à l’époque. Je me souviens même de ma première expo rue du Faubourg Saint-Honoré. Elle était consacrée aux femmes foetus ! »

Un éclat de rire plus tard, Boucle d’or joue à saute-mouton. Préférant oublier cet accoucheme­nt dans la douleur pour mieux rebondir sur ses midinettes. Frivoles et guerrières. Des femmes à qui elle rend grâce et sensualité...

Le pays de Gandhi derrière elle, ainsi qu’un crochet par chez René

Derhy, et la voilà, cette fois, corps et âme livrés à ses muses. A ses intrigante­s Parisienne­s, pour une provincial­e. Coquettes et parfumées. Romantique­s et fatales. Maîtresses de Kiraz...

« Plus je les observais et plus j’avais une folle envie de les dessiner. Le personnage est d’ailleurs venu d’un coup. Avec ses grands cils, cette bouche si personnell­e... »

Des lionnes citadines. Des lianes maquillées d’aquarelle. Au commenceme­nt de leur liaison. Jusqu’à l’étreinte du papier et de l’eau. De la fusion de l’acrylique et du brillant vernis. De la magie des éléments, mis en formes par ses inspiratio­ns incontrôlé­es...

« Je ne peux pas vous dévoiler tous mes secrets. » Juste qu’elle s’inspire des défilés de la Haute Couture. En fait, elle part d’un corps nu. D’une silhouette. Que, peu à peu, elle électrise. Enveloppe. D’arc-en-ciel. De sacs en papier. Estampillé­s Dior, Chanel, Hermès... « C’est un peu comme si je travaillai­s pour ces grandes maisons. Comme si je fabriquais leurs robes .» Avec sa sensibilit­é. Souvent dissimulée. Au plus profond de ses yeux clairs. Plongés au centre de la matière « qui m’envoie des impulsions ». Jusqu’à l’ultime touche de sa sculpture murale. Qu’elle se plaît à nommer pop-up painting (en référence au pop art).

Alors, elles se font face. Femme à femme. Chair et toile. pour se repousser. « Au départ, je suis contente de ma création. Puis je la déteste. Je me trouve mauvaise ! » OEuvre et artiste s’épousent et divorcent. Pour mieux se retrouver à l’instant de la page blanche. Celle à laquelle elle fait face aujourd’hui. Ayant quitté la Capitale pour son atelier londais. « J’en avais ras le bol des artifices », confie-t-elle dans son atelier en chantier de la Baie des îles.

Elle ressentait un besoin de ruralité. De nature sauvage. De mer. Essences nourricièr­es. Haute couture naturelle, propice à sa renaissanc­e artistique. En vue à la galerie Riviera de Saint-Paul de Vence. Premier pas de danse azuréen avec ses fiancées éternelles...

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Rachel Bergeret a choisi d’inviter ses envoûtante­s midinettes à se dévoiler dans son atelier de la Baie des îles à La Londe.
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(Photos R.C.)
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