Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
L’INTÉGRATION PASSE PAR L’ÉCOLE
Mars 1860 voit l’annexion du comté de Nice à la France. Juin voit la création du département des Alpes-Maritimes. L’instruction, vecteur d’intégration, va être l’une des priorités.
« Rapidement, l’enseignement du français s’oppose au patois niçois. »
Lorsque le 24 mars 1860, le traité de Turin annexe le comté de Nice à la France et que, trois mois plus tard, la loi du 23 juin 1860 crée le département des Alpes-Maritimes, une question se pose : comment réussir l’intégration de l’ex-comté de Nice à la nation française ? En effet, comment faire pour que des étrangers deviennent rapidement des Français ? Aucun doute que l’intégration passe par l’instruction, il est donc primordial de réorganiser la scolarité.
Le temps de la refonte
Si, depuis 1563, la langue officielle du Comté de Nice est l’italien, hormis les actes écrits et quelques familles de l’élite qui s’expriment en français depuis la Révolution, les Niçois parlent nissart. Aussi, les autorités françaises s’accordent à penser que la mission de l’éducation devient prioritaire pour unifier et intégrer ce nouveau territoire.
Toutefois, cet apprentissage va se heurter à des difficultés majeures. En effet, jusqu’à présent l’instruction n’était pas considérée comme utile, et comme les populations étaient plutôt réticentes à l’égard du savoir, nombre de municipalités ne possédaient pas de « maison d’école » ou n’offraient que des locaux exigus et insalubres. L’administration compte donc pallier ces lacunes. Mais, il faudra attendre 1878 et la création de la Caisse des Ecoles pour que les communes puissent se procurer des bâtiments clairs et propres ou pour réhabiliter les locaux existants, financer mobiliers et bibliothèques et installer des sanitaires. Si, l’administration française de l’enseignement réussi à vaincre les principaux obstacles matériels à la bonne diffusion de ses programmes et si dès 1861, se crée à Nice une Inspection départementale d’académie, destinée à diriger l’administration de l’enseignement dans les Alpes-Maritimes, se pose encore le problème des enseignants.
Recrutement et formation des enseignants
Au moment de l’annexion, un arrêté ministériel oblige les instituteurs sardes qui ont choisi de rester à subir des épreuves afin de justifier de leur aptitude à enseigner le français. Sur 171 enseignants sardes basés sur le territoire, seuls 59 sont acceptés. Pour combler le déficit, on est obligés de faire appel aux académies voisines. Aussi, pour l’administration, la première action porteuse d’avenir est la création dès 1861 d’une Ecole Normale de garçons à Nice, à Cimiez, transférée route de Gênes en 1867. Concernant les maîtresses, elles sont recrutées à l’Ecole normale d’Aix dont l’éloignement est la raison principale du faible nombre de candidates. Si, dès la première vraie rentrée en 1861, le programme de l’école Maralpine fut aligné sur le national, la région a réellement souffert de la démotivation des pédagogues peu enclins à enseigner dans un milieu si peu alphabétisé. Mais, l’administration n’a pas dit son dernier mot. Cela va prendre 20 ans pour que s’achève la phase d’édification et d’organisation du service de l’Instruction primaire dans les AlpesMaritimes. Mais, en 1880, elle a enfin réussi à combler le retard pris par rapport aux autres départements.
La loi Ferry du 28 mars 1882 qui prescrit le caractère obligatoire et gratuit de l’enseignement primaire pour tous les enfants âgés de 6 à 13 ans va accélérer la multiplication des établissements (lire encadré). A cette époque, l’analphabétisation a pratiquement disparu et la fréquentation scolaire ne cesse de progresser. Dès lors, l’école dans l’ex-comté de Nice devient le ressort des lois de la IIIe République. L’instruction a gagné !