Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
FEMME DE CONVICTION
Première femme ministre dans l’histoire de la République, la Phocéenne fit voter des lois sur la santé publique et la protection de l’enfance ainsi qu’un décret qui porte son nom.
Si Germaine Poinso-Chapuis née le 6 mars 1901 à Marseille a gagné ses galons de ministre en 1947, ce n’est pas un hasard. Elle le doit à son talent, son intelligence et ses engagements militants et politiques, mais elle a aussi bénéficié de la conjoncture de l’époque. Notamment, le droit de vote accordé aux femmes en 1943 et le décret qui, signé par le général De Gaulle à Alger le 21 avril 1944, donne aux Françaises le droit de participer à la vie politique du pays. Ce fut le fer de lance pour permettre aux femmes de s’émanciper ! Mais, ce n’était pas encore gagné, car après celle qui fut la première femme ministre de plein exercice de la République Française, il faudra attendre presque 30 ans pour voir une autre femme – Simone Veil (1927/2017) – obtenir des fonctions ministérielles.
Une vie militante bien remplie
La jeune Germaine Marie Joséphine Chapuis, qui deviendra Poinso par mariage, fait de brillantes études jusqu’à un doctorat de droit romain – premier système juridique de l’histoire dont l’influence est encore en vigueur de nos jours. Elle n’a pas 20 ans lorsqu’elle entre au barreau de Marseille. Féministe avant l’heure, elle milite pour les luttes sociales, la contestation des injustices et s’engage en faveur de la protection judiciaire de l’enfance, principalement de l’enfance et adolescence délinquante. Parallèlement, elle adhère au Parti démocrate populaire où elle devient membre du comité directeur. Femme de tempérament, dès les débuts de la première guerre mondiale, elle entre dans la Résistance locale – elle obtiendra d’ailleurs la médaille de la Résistance –, et agit au sein du Mouvement de Libération Nationale (MLN). Des actions qui la conduisent tout naturellement à la politique. On la retrouve notamment vice-présidente du comité du premier conseil municipal de Marseille d’après-guerre. Et, le 21 octobre 1945,
#2 elle est élue députée MRP, (mouvement républicain populaire) de la première circonscription des Bouches-du-Rhône à la commission des affaires économiques. Elle est déjà l’une des premières femmes députées.
Madame le Ministre
Son engagement l’a fait remarquer des plus hautes instances de l’Etat. Aussi le 24 novembre 1947, le président du Conseil des ministres du gouvernement de Vincent Auriol (1884/1966), Robert Schumann (1886/1963), va braver le système en la nommant à la tête du ministère de la Santé publique et de la Population. Pour la première fois en France, une femme obtient le titre de ministre. Elle le restera du 24 novembre 1947 au 19 juillet 1948.
Au cours de sa courte mission ministérielle, elle s’attaque aux ravages de l’alcoolisme et fait voter le décret Poinso-Chapuis du 22 mai 1948 destiné à subventionner les familles dépourvues de ressources dont les enfants sont inscrits dans des écoles confessionnelles. Malheureusement, le cabinet Schuman est dissous en juillet 1948 et Germaine est démise de ses fonctions. Elle va néanmoins poursuivre ses actions en faveur de la famille et l’enfance sur les bancs de l’Assemblée nationale. Après sa défaite aux élections législatives de 1956, elle continue son combat, notamment au profit de l’enfance inadaptée. Elle décède à Marseille le 20 février 1981. Titulaire de l’Ordre national de la Légion d’honneur et Commandeur de la Santé publique, Germaine Poinso-Chapuis est entrée dans l’Histoire par la grande porte.
Sources : Femmes dans l’Histoire de la Provence de Jean-Pierre Martin, éditions Sutton (2019) et Germaine Poinso-Chapuis : une politique familiale entre catholicisme social et féminisme par Véronique Antomarchi #1
. Germaine PoinsoChapuis fut la première femme ministre, mais aussi la première à cumuler autant de mandats politiques. . En , elle fut la première femme à siéger au Conseil des ministres sous Vincent Auriol. Il faudra attendre pour voir une autre femme, Simone Veil, reprendre son siège
. Elle fait voter des lois sur la santé publique et la protection de l’enfance et n’hésitait pas à visiter hôpitaux et maternité #3