Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

« L’amour a un prix, celui de l’allocation adulte handicapé »

- AXELLE TRUQUET

Vincent, Azuréen de 35 ans, souffre de la sclérose en plaques (SEP) et a été diagnostiq­ué autiste Asperger de haut niveau. Son double handicap n’est pas visible de prime abord. Pourtant, il l’empêche de travailler, surtout en période de poussées. Il se veut malgré tout optimiste et rêve de pouvoir ouvrir un jour son studio photo. Peut-être lorsqu’il bénéficier­a d’un nouveau traitement qui lui facilitera la vie et mettra en sourdine les vives douleurs qu’il ressent. Mais ce qui le met très en colère en ce moment, ce n’est pas tant la maladie, mais une loi qui conditionn­e l’allocation adulte handicapé (AAH, elle est de 902,70 euros mensuels maximum) aux revenus du conjoint. « Concrèteme­nt, si vous vous mariez, vous pacsez ou juste vous installez avec votre partenaire, vous risquez de perdre l’AAH, qui est souvent votre seule source de revenus. Cela vous place dans une dépendance inacceptab­le », s’agace Vincent. Dans les faits, pour bénéficier de l’AAH, il ne faut pas que les revenus annuels du couple dépassent les 19 606,64 euros. Donc si le conjoint ou concubin gagne à lui seul cette somme, la personne en situation de handicap ne pourra pas prétendre à l’allocation.

Dépendance financière insupporta­ble

« Vous vous rendez compte, poursuit Vincent, cela veut dire que si vous devez sortir acheter une baguette de pain, vous devez demander de l’argent à votre conjoint… C’est grave parce que ça induit un énorme déséquilib­re dans le couple : on a l’impression de devoir quémander sans cesse. Et même pour l’autre ce n’est pas facile. Déjà financière­ment, il a la charge des revenus du couple. Mais cela lui fait aussi porter une grosse responsabi­lité : c’est sur lui ou elle que tout repose. Or ce n’est pas à cela que l’on aspire lorsque l’on s’engage dans une histoire sentimenta­le. Ainsi, l’amour a un prix : celui de l’AAH… »

L’Azuréen évoque aussi avec pudeur l’impact psychologi­que de cette mesure : « Comment accepter que l’on n’ait pas droit à une allocation juste parce que l’on vit avec quelqu’un ? Nous ne comptons pas aux yeux de la société ? Il arrive par ailleurs fréquemmen­t que la personne en situation de handicap soit victime de violences conjugales. Et elle a d’autant plus de mal à s’en sortir qu’elle est, de facto, dans cette situation de dépendance financière. Comment quitter le domicile sans revenu, sans argent de côté ? »

Une pétition a été lancée sur Internet pour demander la suppressio­n de la prise en compte des revenus du conjoint dans l’attributio­n de l’AAH, elle a déjà recueilli plus de 60 000 signatures.

Retrouvez la pétition sur petitions.senat.fr/initiative­s/i-

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(Photo Unsplash) Vincent milite pour que l’AAH ne soit plus subordonné­e aux revenus du conjoint.

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