Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Une urgence ? Faites le 112 !
15, 17, 18, 114, 196, 112, 191, 116… En France, le nombre de numéros d’appels en cas d’urgence pourrait presque s’apparenter à une mini-suite de Fibonacci. Alors que dans de nombreux pays du globe, à l’instar du célèbre 911 aux États-Unis, un seul numéro permet de joindre les services d’urgences, ils sont treize à être à la disposition des Français en cas de problème majeur.
Mais si abondance de biens ne nuit pas, en l’espèce, trop de possibilités peuvent engendrer des difficultés. Ainsi, qui appeler en cas de chute dans l’escalier ? Le 15 ? Le 18 ? Qui joindre en cas de coupure à la tête ? De crise cardiaque ? Les pompiers ? Le Samu ? Pour en finir avec la confusion de ces deux numéros, pourtant ancrés dans la culture française, Fabien Matras milite pour faire du 112 le numéro unique d’appel de secours d’urgence.
« Tout le monde y gagnera »
« Aujourd’hui, entre tous ces numéros, on s’y perd, constate le député varois. Cela peut avoir de fâcheuses conséquences. Les pompiers sont formés pour l’urgence, pas pour le transport. Et si on les appelle pour une intervention qui n’est pas de leur ressort et que, faute d’autres solutions, ils s’y rendent, cela bloque un véhicule qui pourrait être utile ailleurs… Avec la suractivité opérationnelle engendrée par l’accroissement des risques (inondation, crise sanitaire, sécheresse…), il faut envisager l’activité de secours comme un ensemble et sortir des clivages anciens. Tout le monde y gagnera, en temps et en argent. » Le rapporteur de la loi propose donc de généraliser l’usage du 112, numéro d’appel d’urgence disponible depuis 1999 dans toute l’Europe. Le 112 avait été créé afin de répondre à la croissance des déplacements des citoyens au sein de l’Union européenne et de leur éviter de mémoriser les numéros d’urgences propres à chaque pays visité. Mais dans nos contrées, ce numéro n’est jamais parvenu à entrer dans les moeurs. Ainsi, selon un rapport de la commission européenne de décembre 2020, la France est le pays qui a le moins recours à ce numéro, avec seulement 9 % des appels d’urgence.
C’est donc une vraie révolution que prône le député de la 8e circonscription du Var. « Cela va prendre du temps, et il n’est pas utile aujourd’hui d’imposer un échéancier, détaille Fabien Matras.
Le 15 et le 18 pourront d’ailleurs continuer à exister. Mais ce qu’il faudrait parvenir à faire, c’est expérimenter le 112 dans une région et éduquer nos futures générations à utiliser le 112 en priorité. »
« Un point à trancher »
Dans les faits, l’appel au 112 arrivera sur une plateforme départementale commune et permettra à l’interlocuteur de déployer le service le plus adapté en fonction de l’urgence. Reste à savoir si les urgences policières – le fameux 17 « police secours » – seront concernées par ce dispositif, comme le souhaite la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (lire par ailleurs). « La question peut se poser, admet le député. Faut-il associer la police et la gendarmerie ? J’ai l’impression que les gens parviennent quand même à faire le distinguo entre urgences policières et médicales. En outre se pose le problème de l’enquête pénale, qui peut débuter dès l’appel téléphonique… C’est un point à trancher. »
Sur le terrain, des expérimentations de plateformes communes entre les différents services (pompiers, Samu et ambulances) sont actuellement menées dans le Tarn-et-Garonne et les Hautes-Alpes, avec « des résultats probants ». L’instauration du 112, « qui correspond à une volonté du président de la République », devrait s’effectuer par étapes à l’issue de la crise sanitaire. Pour devenir, à terme, une habitude.