Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

« Un réseau d’une efficacité et d’une longévité rares »

- N. P.

Comme tout bon historien, Jean Sarraméa situe le contexte. «La Pologne venait d’être envahie, en 1939. » La création de ce réseau F, plus tard appelé F2, remonte à juillet 1940 à Toulouse, où se trouve le centre de démobilisa­tion des forces polonaises ayant combattu avec l’armée française après l’invasion de la Pologne. A ses débuts, cette organisati­on est en quelque sorte « une filière d’évasion, en passant par la Roumanie notamment, pour les Polonais quittant leur pays et voulant continuer la lutte aux côtés des Britanniqu­es ». L’historien précise que les Polonais, qui ont longtemps vécu sans patrie, ont « une longue expérience de résistance ». Beaucoup d’entre eux sont répartis, au début de la

Seconde Guerre mondiale, sur la zone libre française, répondant au général Sikorski et son gouverneme­nt exilé à Londres, «il est un peu l’équivalent de De Gaulle pour nous. Le Réseau F2 s’occupe principale­ment d’exfiltrer et d’aider les Polonais civils de France. » Intrigués par l’efficacité de ce réseau de Résistants, les services secrets anglais comptent s’appuyer de plus en plus sur leur expertise « pour récolter de précieux renseignem­ents sur l’ennemi allemand, et ce dès 1940 ». Résistants polonais et français s’entraident pour évacuer certains ressortiss­ants vers l’Espagne, Gibraltar et l’Afrique du Nord.

Des goélettes de “pêcheurs” viennent au Trayas

Jusqu’en novembre 1942, environ un jour par mois arrive vers SaintRapha­ël et d’autres ports des goélettes « déguisées » en bateau de pêche, mais dont l’équipage est polonais. Notamment dans la calanque d’Aurelle, au Trayas, régulièrem­ent, des échanges très discrets se font : argent, armes, évacuation de femmes et d’hommes, etc.

« Mais à partir de novembre 1942, l’occupation de notre région par l’armée italienne va rendre ces échanges plus difficiles, déplore Jean Sarraméa. On n’a aujourd’hui évidemment pas de photograph­ies d’époque, mais le Musée de la Résistance de Nice, qui possède de précieuses archives et nous a bien aidés, conserve la liste des jours et des heures de ces contacts secrets. » Même lors de l’occupation italienne puis allemande de la côte, les échanges secrets ont pu perdurer entre Français et Polonais à terre et ces bateaux secrets, qui faisaient le lien avec les services secrets des Alliés.

« Cartes, documents, renseignem­ents divers sur le détail des troupes ennemies, leur moral, leurs déplacemen­ts, l’emplacemen­t des blockhaus, des usines, des avions nazis, etc. Que ce soit grâce à ces goélettes ou grâce aux postes émetteurs secrets, les Alliés ont pu bénéficier de très précieuses données qui vont grandement les aider en vue du Débarqueme­nt en Provence », affirme l’historien du Souvenir français. Qui, au final, résume en ces mots : « Ce réseau s’est montré d’une efficacité et d’une longévité rares ! »

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(DR) Wladyslaw Sikorski.

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