Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Les papys font de la planche

Pionniers varois de la Windsurfer, Lulu Langlois, Vincent Silve et Thierry Eude ont été sacrés champions du monde en 1979. De retour sur l’eau, ils partagent leurs souvenirs. Salés, bien sûr.

- GUILLAUME RATHELOT

C’est comme si un dealer avait laissé sa came”

A «ujourd’hui, la Windsurfer, c’est cinquante nuances de... cheveux blancs ! » Lulu Langlois, Vincent Silve et Thierry Eude n’ont pas tous la même coiffure. Ni le même bronzage. En revanche, les trois sexagénair­es varois gardent un point commun : un titre de champion du monde de Windsurfer (qui est à la planche à voile ce que la cassette audio est à la musique) obtenu en 1979. Et plusieurs médailles au niveau national. Quarante-deux ans plus tard, au moment de remonter sur leur engin -- une version modernisée et allégée de la planche originelle -lors d’un championna­t d’Europe à Saint-Cyr, les souvenirs refont surface. Clairs comme la Méditerran­ée au large de Bendor, où, à l’adolescenc­e, ils ont découvert une nouvelle sensation de glisse.

Bouées canards et petits arrangemen­ts

« On faisait tous un peu de voile, du dériveur. Un jour, on a vu Guy Ducrot là-dessus.

(1) Incroyable, un gars debout sur une planche ! Il fallait qu’on essaie. Charles Daher, qui avait importé les Windsurfer des USA, en a laissé quelques-unes. C’est comme si un dealer avait laissé sa came », s’exclament le Sanaryen Vincent Silve et le Six-Fournais Lulu Langlois, membres de l’équipe de France championne du monde 79 à Olbia, en Sardaigne (2).

Ces pionniers n’ont rien oublié de ces match racing, duels à trois contre trois, où toutes les stratégies étaient bonnes pour éviter la dernière place qui faisait perdre l’équipe. « Parfois, ça touchait. Mais les contacts au niveau de la planche ne sont pas autorisés », note Lulu Langlois. Celui-ci se montre d’ailleurs formel : le titre de 79 a été acquis « après une réclamatio­n » et la disqualifi­cation d’Alex Aguera, l’un des Américains à battre. Il se souvient en revanche moins du retour en ferry, après des célébratio­ns un peu trop arrosées.

Vincent Silve, lui, narre cette autre anecdote : «Les règles de course imposaient une “réserve de flottabili­té” mais ne mentionnai­ent pas de gilet de sauvetage. De toutes les manières, on n’en avait pas. Alors on est allé chercher des bouées canards de toutes les couleurs. On les avait tournées parce que ça gênait avec le harnais, mais on a passé une journée entière sur la planche avec ça ! »

De son côté, Thierry Eude, le Breton, Rocbaronna­is d’adoption, a décroché l’or en individuel (catégorie légers), à Porto Hydra, au sud de la Grèce. « Le vent était assez erratique. Je termine 28e de la première manche. Puis je fais 4, 2 et 1. On me dit que je suis en tête avant la dernière manche. “Ah bon ?” Je fais les calculs : je dois finir 5e pour être champion du monde. Je fais de la merde au départ, mais je crois que je remonte à la 6e place et je préviens Dominique Le Bihan (un autre Breton bien connu dans le milieu, surnommé “Rahan”), qui est juste devant moi. Il s’écroule sur la ligne pour que je la franchisse avant lui. Et je gagne pour 0,3 point ! Ça m’a ouvert des portes puisque j’ai ensuite été pro pendant trois ans. »

« Dès qu’on met un dossard... »

Les trois compères se retrouvent avec plaisir à Saint-Cyr en cette fin de semaine. Heureux, avec d’autres anciens (le doyen facture plus de 70 ans) de participer au renouveau de la Windsurfer, qui a peu à peu disparu dans les années 80 au profit de planches à voile plus maniables. Sontils en mesure de glaner un titre européen en 2021 ? « Houla ! Ça fait quarante ans que je n’ai pas pris un départ en planche à voile, s’amuse Lulu Langlois, désormais installé au Plan-duCastelle­t et inconditio­nnel de wingfoil, qui passe sa vie sur l’eau. Mais bon, dès qu’on met un dossard, on se laisse prendre au jeu... » Cheveux blancs ou non. Mais aux dernières nouvelles, ils apparaisse­nt plutôt en bas des classement­s.

1. Un Bandolais d’adoption, qui a empilé les titres dans les années 70.

2. Une équipe mixte, avec aussi Guy Ducrot, Manuelle Graveline et Fabienne Allandrieu. Dans l’autre formation française, on retrouvait notamment Corinne Feuillerat (la maman d’Olivia Piana), présente aussi ce week-end à Saint-Cyr.

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(Photo Frank Muller) Le Rocbaronna­is Thierry Eude, le Castellan Lulu Langlois et le Sanaryen Vincent Silve (de g. à d.) remontent le temps.
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(Photos DR) (ici notamment
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Thierry Eude a aussi été champion de France aux Embiez en . Il parle du Windsurfer comme d’une « planche assez vive et saine ».
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Championna­t du monde  à Olbia : les équipes de France avec Corinne Feuillerat) se distinguen­t par leurs bouées.

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