Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)

Nice : un couple accusé d’avoir acheté un bébé

Une mère en Picardie a touché environ 15 000 euros pour porter l’enfant destiné à un couple stérile de Nice. Une maternité de Grasse a alerté la justice. Des poursuites judiciaire­s sont en cours.

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Elle est enseignant­e, atteinte d’une grave maladie qui l’empêche de pouvoir être enceinte. Isabelle a cru pouvoir trouver une solution à son infertilit­é en échangeant, via Internet, avec une mère de famille de Picardie. Cette dernière, par ailleurs mère de deux enfants, lui propose de porter son enfant à naître. Une première rencontre des deux couples dans un bar à Hirson dans le départemen­t de l’Aisne aurait permis de sceller le marché moyennant 15 000 euros environ. Angélina accepte de porter

(1) neuf mois un enfant qu’elle remettra au couple azuréen. Comment cacher cette grossesse pour autrui (GPA), autorisée en Amérique du Nord mais interdite en France par les lois de bioéthique­s ?

À huit mois et demi de grossesse, Angélina traverse la France et se présente dans une maternité de Grasse sous l’identité d’Isabelle. L’établissem­ent de santé s’aperçoit aussitôt que le nom de la femme enceinte et le groupe sanguin ne correspond­ent pas. Angélina avoue alors s’être présentée sous l’identité de la femme de son amant dont elle est enceinte.

Un petit garçon né en 2017

De retour dans l’Aisne, Angélina est suivie par une autre maternité où elle explique cette fois vouloir accoucher sous X. Son prétendu amant a reconnu sa paternité par anticipati­on et l’épouse soidisant trompée aurait accepté d’élever cet enfant. Le personnel soupçonne une gestation pour autrui et alerte le procureur de la République. Une informatio­n judiciaire est ouverte et un juge d’instructio­n de Laon se saisit du dossier. Entretemps, un petit garçon est né en 2017 à Hirson. Il ne sera confié ni à ses parents biologique­s ni au couple acheteur de Nice mais à une famille d’accueil rémunérée par le conseil départemen­tal de l’Aisne, désigné comme administra­teur ad hoc.

Les investigat­ions confirment les doutes du personnel soignant quant aux intentions d’Angélina lorsqu’elle elle était enceinte. La police découvre surtout que cette femme a déjà vendu pour 20 000 euros un précédent bébé à un couple de l’Est de la France. Couple qui élève une fillette aujourd’hui âgée de 5 ans et qui devra lui aussi répondre de ses actes devant la justice.

Le juge d’instructio­n vient de décider de renvoyer Angélina et son compagnon en correction­nelle pour « dissimulat­ion ayant entraîné une atteinte à l’état civil d’un enfant » et tentative de dissimulat­ion.

Le couple de Nice, tout comme celui de Moselle, est poursuivi pour « simulation ayant entraîné une atteinte à l’état civil d’un enfant » et « provocatio­n à l’abandon d’enfant ». Le procès devrait se dérouler en septembre. Une expertise ADN montre qu’Angélina n’avait pas utilisé l’échantillo­n de sperme du mari d’Isabelle acheteur mais qu’elle avait conçu l’enfant avec son compagnon. Me Valérie Bothy-Lanfranchi, avocate du couple niçois, évoque « un dossier doublement catastroph­ique pour mes clients et pour cet enfant placé ». « Isabelle a une espérance de vie trop courte pour accéder aux voies légales de l’adoption. Je considère qu’elle a été escroquée par cette mère porteuse qui l’a démarchée alors qu’elle était en détresse », indique Me Bothy-Lanfranchi.

1. Les prénoms ont été modifiés.

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(Illustrati­on Unsplash) Par le passé, la maman avait déjà donné naissance à un autre enfant dans l’Est de la France, en Moselle, qu’elle avait vendu 20 000 €.

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