Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
L’ÉDITO Le coup d’après
La politique est un art subtil. Pour en saisir toutes les nuances, il est nécessaire d’aller au-delà des apparences. Et de se demander, version Maigret 2.0, à qui profite le crime.
Prenons le cas d’Éric Zemmour. Sauf à se croire touché par la grâce, l’ancien polémiste ne peut sérieusement espérer bouter Emmanuel Macron hors de l’Élysée au printemps prochain. A-t-il perdu pour autant ? Pas du tout. Il peut tirer profit de ce scrutin à une double condition : que Valérie Pécresse soit sortie du jeu au premier tour, que Marine Le Pen soit ridiculisée au second.
Si la candidate LR réédite la contreperformance de Fillon en 2017, disqualifié aux portes de la finale, son parti finira en état de mort cérébrale. Les Républicains exploseront en deux camps : certains guigneront de nouveaux Horizons en penchant vers le macronisme, d’autres basculeront vers une droite plus extrême.
Marine Le Pen, de son côté, pourra difficilement conserver le leadership du parti de son père au lendemain d’une nouvelle déculottée électorale. Éric Zemmour espère alors tirer les marrons du feu. Soutenu par Marion Maréchal, l’autre héritière du clan Le Pen, et peut-être par Jordan Bardella, à qui Marine a imprudemment confié les clés du RN, il tentera de réaliser sa fameuse union des droites. Toute sa stratégie repose sur cet objectif : abolir le « cordon sanitaire » dressé par Jacques Chirac, hostile à toute alliance avec le Front national, pour réunir les conservateurs au sein d’une nouvelle formation. Si les planètes s’alignent, l’ancien polémiste se rêve en leader de l’opposition, seul face à une gauche fracturée et une majorité gouvernementale usée par le pouvoir. Son heure pourrait alors sonner en 2027, dans un contexte similaire à celui qui a permis à Donald Trump de se hisser à la tête des États-Unis. Scénario improbable ? Pas plus que celui qui a propulsé un homme d’affaires controversé, vedette du petit écran, dans le bureau ovale de la Maison blanche.
« Zemmour peut tirer profit de ce scrutin à une double condition : que Pécresse soit sortie du jeu au premier tour, que Le Pen soit ridiculisée au second. »