Var-Matin (Fréjus / Saint-Raphaël)
Conseil départemental : deux nouveaux élus inéligibles ?
Deux mois après la chute de Marc Giraud, la justice devrait sanctionner Sébastien Bourlin et Séverine Vincendeau à cause d’une « erreur » d’envoi de leur compte de campagne de 2021.
C’est l’histoire d’un mauvais concours de circonstances. Voire d’une « désorganisation inédite », glisse un proche du dossier qui devrait aboutir sur l’annulation d’une élection, d’après nos informations. Pourtant, tout avait bien commencé pour Sébastien Bourlin (maire de Pourrières) et Séverine Vincendeau (adjointe au maire de Rians). Le 27 juin 2021 au soir, ce binôme (divers droite) est réélu haut la main aux élections départementales avec plus de 57 % des voix dans le canton de Saint-Maximinla-Sainte-Baume, face à une liste du Rassemblement national. Pour eux, tout se passe sans encombre, jusqu’au 17 mai dernier. Ce jour-là, les deux conseillers départementaux se retrouvent convoqués au tribunal administratif de Toulon. Titre de l’affaire, qui les oppose à la Commission nationale des comptes et des financements politiques : « Rejet du compte de campagne » des élections départementales. Fraude ? Magouille ? Pas du tout.
Une erreur humaine
Dans cette élection, le duo a engagé 5 000 euros, 2 500 euros d’apport personnel chacun. Hors coût d’impression de leur profession de foi, qui a directement été pris en charge par l’État, au titre de la subrogation. Si la raison n’a donc rien de scandaleux, elle est encore plus surprenante : leur compte de campagne n’a pas été envoyé au bon destinataire. Sébastien Bourlin, que nous avons contacté, a reconnu « une erreur » en déléguant à son entourage familial l’envoi de ce courrier ultraimportant. Au lieu d’être adressé à la Commission nationale des comptes et des financements politiques, comme la loi l’oblige pour toute élection, le courrier aurait terminé dans la boîte aux lettres du bureau électoral de la préfecture du Var. Le même qui a géré l’inscription des candidats. Résultat, les comptes Bourlin-Vincendeau sont restés introuvables après la date limite de dépôt fixée à mi-septembre. Dans la foulée, l’organisme national en charge de les contrôler a tenté d’alerter le maire de Pourrières en lui envoyant des lettres recommandées. Sauf qu’entre-temps, celuici a changé de domicile. Et n’est jamais allé les récupérer. Ce que Séverine Vincendeau a fait de son côté. Sans pour autant que cela ne change la donne : Sébastien Bourlin, en charge des comptes, pensait que la préfecture ferait suivre. Raté.
Une semaine après l’audition, le tribunal administratif de Toulon a rendu son jugement : annulation de l’élection et délai de 18 mois d’inéligibilité pour le duo mis en cause, rendant impossible une nouvelle candidature uniquement pour ce même mandat de conseiller départemental. Ce qui ne les prive pas de leurs autres mandats, contrairement à Marc Giraud, qui a tout perdu dans l’affaire d’emploi fictif de Carqueiranne.
La succession se prépare déjà
Pour prouver leur bonne foi, les deux nouveaux fautifs ont alors fait appel de cette décision devant le Conseil d’État. Sans grand espoir. Une nouvelle audience a eu lieu ce 10 novembre, durant laquelle le rapporteur public a confirmé le premier verdict. S’il faut attendre début décembre pour connaître le délibéré officiel, l’issue laisse peu de doute sur l’annulation de l’élection. « Seule la durée de leur inéligibilité peut varier, précise un spécialiste. Mais ils resteront hors course. »
Au Département, l’affaire est suivie de près. « Avec actuellement 44 des 46 conseillers, la droite restera largement majoritaire », assure un haut cadre. En coulisses, plusieurs têtes d’affiche locales commencent à avancer leurs pions. Certains anticipent un nouveau match à distance entre le clan Muselier, Macron-compatible, et celui de Masson, nouveau président du Var 100 % LR. D’autres redoutent que la nouvelle élection profite au RN, en embuscade dans le secteur après la victoire aux législatives du candidat d’extrême droite Frank Giletti.