Assises : vingt-cinq ans pour le meurtre de Saint-Raphaël
Les jurés varois ont dépassé hier les réquisitions de l’avocat général pour sanctionner le crime de Martine Galland qui, en état d’ivresse, avait tué son mari de vingt et un coups de couteaux
La cour d’assises du Var a délibéré moins de deux heures hier, pour condamner Martine Galland à 25 ans de réclusion criminelle, dépassant les réquisitions de l’avocat général. Cette femme de 61 ans avait toujours reconnu sa responsabilité dans le meurtre de son mari Bruno, la nuit du 22 juin 2013, dans leur belle villa du quartier de Valescure à SaintRaphaël (lire nos éditions précédentes). En revanche, elle n’avait jamais pu se remémorer en détail les vingt et un coups de couteaux qu’elle lui avait assénés, certains avec une grande violence. Une amnésie qui n’avait pas surpris l’expert psychologue, et qui devait sans doute être due autant à la forte alcoolisation de l’accusée qu’à un phénomène de refoulement d’une réalité impossible à assumer.
Rôles inversés
Me Matthieu De Valois a plaidé aux intérêts de la fille du couple, « qui ne demande rien, parce qu’elle estime son préjudice trop important et que sa mère restera toujours sa mère ». Il ne pensait pas que l’amnésie de Martine Galland soit une stratégie de dissimulation, mais il n’a pas admis qu’elle ait présenté son mari comme violent. « Elle raconte une histoire où c’est son mari qui boit, qui l’insulte et qui la frappe. Elle inverse les rôles. » Sur le même thème, Me LéonLef Forster, représentant les parents de la victime, a estimé qu’elle a « caricaturé leur fils, un personnage adorable, de l’avis général, pour étayer la thèse d’un mari violent ».
Forte angoisse et alcool méchant
L’avocat général Michaël Darras a concentré son sobre réquisitoire sur la question du mobile qui avait poussé Martine Galland. « Être confrontée à la séparation lui était insupportable. Ce soirlà, elle a compris que la décision de Bruno de la quitter était irrévocable. Cette idée l’a rendue totalement incapable de maîtriser son angoisse. Ça, plus le fait qu’elle a l’alcool méchant, et qu’elle le sait, a déchaîné une grande violence. » Pour tenir compte du casier judiciaire vierge de l’accusé, et d’un risque de récidive estimé nul, il a limité ses réquisitions à vingt ans de réclusion.
Irréparable gâchis
La défense à deux voix s’était répartie la tâche. Dans l’évocation de la personnalité de l’accusée, Me Axelle Aupy a fait preuve d’une sensibilité et d’une assurance inusitée s pour une première plaidoirie d’assises. Elle a dressé le portrait d’une femme bloquée dans l’enfance, « sous le joug d’un père sévère », et qui attendait de son mari qu’il soit « le chevalier blanc ». Une femme dont le malêtre s’était cristallisé dans «la vie de couple en autarcie » qu’ils menaient à Saint-Raphaël. « Une femme qui s’est servie de l’alcool comme d’une béquille, et qui a fait souffrir ses enfants et
son mari. » Sur le passage à l’acte, Me William Galliot ne croyait pas à la thèse de l’annonce d’un divorce. Il estimait possible que le 22 juin, Bruno Galland ait pu s’emporter, « parce qu’il n’en pouvait plus de cette vie en vase clos ». « Je suis certain que Martine a toujours dit la vérité depuis le début. Je crois que cela fait longtemps qu’elle est enfermée dans sa souffrance morale, et qu’elle finira seule, comme elle a un peu vécu sa vie. » « J’aimais Bruno et je l’aime toujours, a lâché Martine Galland dans le box. C’est un homme qui avait beaucoup de qualités. J’ai fait un gâchis monumental. »