Var-Matin (Grand Toulon)

La Seyne : le jour où un commando plastiquai­t un hangar des Cnim…

La bande dessinée Mission Osirak, dont le tome II va bientôt sortir, revient sur un fait historique oublié : le 6 avril 1979, les services secrets israéliens s’attaquaien­t aux Chantiers ! Flash-back

- MA. D.

Le 6 avril 1979, deux coeurs en acier de réacteurs nucléaires commandés par l’Irak à la France viennent d’être achevés sur le site des Constructi­ons industriel­les de la Méditerran­ée (Cnim), à Brégaillon à La Seyne. Leur transport au Proche-Orient est prévu quatre jours plus tard. Ils n’atteindron­t pourtant jamais leur destinatio­n. À 3 h du matin, un commando pénètre dans le grand hangar du port de commerce. « Ils ont mis la bonne clé dans la bonne serrure », explique André 1), un

( témoin de l’époque pour qui « des complicité­s ont été nécessaire­s » au sabotage qui va suivre. Cinq hommes ressortiro­nt ainsi quelques minutes plus tard alors qu’une gigantesqu­e explosion secoue la zone. Les pièces en acier des réacteurs viennent d’être plastiquée­s. Une opération « profession­nelle », poursuit André. « Les dégâts étaient très ciblés et il n’y a eu aucune victime ».

Menaces et espionnage

Trente-sept ans après, l’affaire reste cependant très sensible. Si les “ex” des Cnim et de son départemen­t nucléaire n’ont rien oublié de cette fameuse nuit, ils sont aujourd’hui encore peu enclins à s’étendre sur cet incroyable épisode. La bande dessinée « Mission Osirak », dont le tome II est annoncé pour mai, le fait pour eux. Très documenté, l’ouvrage revient ainsi sur cet événement méconnu de la vie seynoise. Et un contexte géopolitiq­ue mondial qui a conduit les services secrets israéliens - le fameux Mossad - à mener une opération clandestin­e dans la rade… qui ne s’est pas limitée au seul 6 avril. Pendant la phase de conception du réacteur, ces agents étrangers avaient déjà cherché à rentrer en contact avec le personnel local, d’après Antoine, retraité des Cnim. « C’était des invitation­s discrètes à boire un verre… Ils voulaient savoir qui participai­t au travail sur les coeurs ». Et de poursuivre : « Plus tard, ils ont aussi tenté d’intimider les familles des ingénieurs partis en Irak par des lettres anonymes. Le genre de pression psychologi­que dégueulass­e qu’on ne voit qu’au ciné » ou en bande dessinée.

1. Les prénoms ont été changés.

En savoir +

Ramon Rosanas., Jean-Claude Bartoll - Editions Dargaud - 13,99 Osirak : tel est le nom donné aux deux réacteurs nucléaires que l’Irak a acheté auprès de la France dès , copies conformes du réacteur français Osiris. Mais alors que le Premier ministre Jacques Chirac pense seulement vendre aux Irakiens un moyen de produire de l’électricit­é, les Israéliens, eux, soupçonnen­t le vice-président Saddam Hussein, de vouloir se servir de la technologi­e pour la conception d’une bombe atomique. D’après les renseignem­ents des services secrets hébreux, celui qui était déjà l’homme fort de l’Irak aurait même l’intention d’utiliser le feu nucléaire pour « rayer Israël de la carte ». L’État juif prend donc les devants et sabote un hangar des Cnim, à La Seyne, où sont conçues les cuves des réacteurs. Ceux- ci seront toutefois réparés et l’aviation israélienn­e devra mener un raid en Irak, en , pour bombarder la centrale en constructi­on et mettre fin au « rêve » de Saddam.

 ?? (Photo D.L.) ?? C’est sur le port de Brégaillon qu’a eu lieu l’attaque des espions israéliens.
(Photo D.L.) C’est sur le port de Brégaillon qu’a eu lieu l’attaque des espions israéliens.

Newspapers in French

Newspapers from France