Var-Matin (Grand Toulon)

Ballet de camions dans l’agglo, la Ville pose ses conditions

Opposée au transit, par Brégaillon, de 2,2 millions de tonnes de calcaire pour un chantier à Monaco, la municipali­té a détaillé, en préfecture, ses exigences et celles des riverains concernés

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Lors d’un point presse donné le 11 décembre dernier, en présence des comités d’intérêt local (CIL), le maire réaffirmai­t la déterminat­ion de la commune à exiger des «contrepart­ies» aux nuisances que provoquera le transit de 2,2 millions de tonnes de calcaire pour Monaco, à partir de l’été prochain, au départ de Brégaillon. À savoir plus de 1 000 camions par semaine sur la DN559, dans les deux sens de circulatio­n entre la carrière du Revest et La Seyne. Après une première déclaratio­n tonitruant­e, dans laquelle il accusait Bouygues d’avoir «menti» sur les retombées en termes d’emplois (lire nos éditions précédente­s), la préfecture du Var a tenté de jouer les « bons offices » en réunissant, autour d’une même table, les institutio­ns locales et les représenta­nts des sociétés Someca et Bouygues (1). S’il se félicite de cette « heureuse initiative», destinée à «faire retomber la colère de nos concitoyen­s, qui ne voient dans ce projet que de rudes inconvénie­nts pour leur qualité de vie», le maire rapporte que «les échanges ont été très durs, les industriel­s ayant eu le don de me faire sortir de (ses) gonds en affichant, avec une belle sérénité, le déni de leur mensonge assumé quant aux sirènes des 700 à 900 emplois qu’ils nous avaient fait miroiter ». Néanmoins, ajoute-t-il, « cette rencontre aura permis de préciser et d’expliciter les exigences que nos concitoyen­s, via le collectif des sept CIL, nous ont demandé de porter».

« Une enquête publique sérieuse »

En matière de prévention des désagrémen­ts et de l’environnem­ent, les représenta­nts de la Ville ont donc prévenu : ils ne lèveront leurs «entraves »auprojetqu­e« dès lors qu’un protocole aura été signé, suite à une enquête publique sérieuse, fixant les règles du jeu et les mesures opérationn­elles des contrôles et évaluation­s, pour la fluidité de la circulatio­n, la prévention ou réparation des dégradatio­ns des voiries et espaces publics, le stockage des granulats avant embarqueme­nt (qui ne pourra se faire en entrée de ville), l’évitement des nuisances sonores et visuelles pour les travailleu­rs du pôle Mer et de tous les quartiers du tour de la rade, la protection de la qualité de l’air, la prévention des risques de pollution de l’eau de la rade, et tous autres désagrémen­ts». Du reste, avertit encore le maire, «ce protocole ne pourra être validé que s’il comporte les modalités d’un double contrôle : celui des services spécialisé­s de l’État (avec des interventi­ons ordinaires et inopinées) et celui de notre population, qui devra désigner des représenta­nts dans une instance destinée à son élaboratio­n et son évaluation permanente». L’autre contrepart­ie importante demandée par les Seynois concerne la question de l’emploi.

Des engagement­s demandés

« Un autre protocole devra, a minima, fixer des engagement­s chiffrés à élaborer, sous contrôle populaire, des organisati­ons syndicales, des corps consulaire­s et des élus locaux, en lien avec Pôle emploi, l’ensemble des structures locales de l’insertion, de la formation profession­nelle et de la médiation, quant à des emplois à garantir aux habitants du “Grand Toulon”, avec prévalence pour les résidents des quartiers prioritair­es. Cela doit concerner, pour les deux entreprise­s, leurs sous-traitants et fournisseu­rs de services, les métiers de la carrière, des transports, du traitement des pierres, de l’activité portuaire, de la fabricatio­n des caissons de béton à Marseille, du chantier lui-même à Monac, et tous autres objets liés au projet». À cet égard, Marc Vuillemot demande que ce deuxième protocole, qui devra aussi faire l’objet d’un suivi associant les institutio­ns et les habitants, prévoit «des obligation­s quantifiée­s de parcours et de clauses d’insertion, de formation profession­nelle, d’égalité hommes- femmes, d’intégratio­n de travailleu­rs handicapés, d’emplois réservés aux jeunes et aux seniors, de process innovants de prévention des discrimina­tions à l’embauche et de non-recours au dumping social, notamment par le refus d’embauche de travailleu­rs détachés». Enfin, conclut le maire, ce n’est qu’en acceptant ces conditions, ces «exigences» seynoises, que les industriel­s, «qui s’y sont très maladroite­ment pris avec notre peuple et ses élus », pourront «regagner la confiance locale et, même, faire de ce projet une vitrine exceptionn­elle de qualité environnem­entale et sociale. La balle est dans leur camp».

1. La première est chargée d’acheminer des pierres du Revest à Brégaillon ; l’autre de réaliser, avec ces minéraux, un quartier de résidences de luxe gagné sur la mer de la principaut­é monégasque.

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