Merkel fragilisée
L’union nationale autour d’Angela Merkel n’a pas duré. Mardi soir encore, pourtant l’ensemble de la classe politique allemande était autour d’elle, à l’église du Souvenir pour rendre hommage aux victimes, morts et blessés, de l’attentat du marché de Noël de Berlin. Il n’a pas fallu longtemps à l’extrême droite allemande, l’Alternative pour l’Allemagne, pour pointer du doigt la chancelière et sa politique en matière d’immigration. Hier soir, autour de la chancellerie, le siège du gouvernement allemand, ils étaient plusieurs milliers à défiler. Pas seulement pour honorer les victimes de la tuerie d’avant-hier, mais pour protester, banderoles et slogans à l’appui, contre la chancelière elle-même dont ils demandent la démission. Depuis plusieurs mois, celle-ci a, en effet, ouvert ses bras et les portes de l’Allemagne à plus d’un million de réfugiés venus du Moyen-Orient. Tout a été fait, à l’allemande, c’est-à-dire avec méthode, pour intégrer ces nouveaux venus dans les différentes régions et les grandes villes allemandes. On a trouvé des asiles aux migrants, des cours d’allemand leur ont été dispensés pour leur permettre de commencer une nouvelle vie. Et pourtant, déjà l’année dernière, des incidents graves avaient déjà singulièrement assombri les fêtes de fin d’année à Cologne, où des femmes avaient été volées ou violées. Cette fois, la mort semée par un camion-bélier dans la foule des berlinois et des touristes réunis autour des petites baraques de Noël a été, pour l’extrême droite, le signal de l’offensive. Au moment où Angela Merkel, qui vient d’être plus que confortablement réélue par son parti, la CDU, brigue un quatrième mandat, la mobilisation contre sa politique d’immigration est de nature à la fragiliser, elle dont la cote de popularité était, il y a peu encore, à une hauteur qui ferait pâlir d’envie les hommes politiques français. Même si on ne sait pas encore si le suspect de l’attentat est l’un de ces migrants fêtés à leur arrivée en Allemagne, l’occasion est trop belle pour l’extrême droite allemande. Angela Merkel attendait certes cette réaction d’un parti qui a obtenu aux dernières élections près de % des voix. Ce qu’elle n’attendait pas, c’est qu’à l’intérieur de la coalition censée la soutenir, quelques voix s’élèvent aussi pour condamner non seulement le risque que fait courir au pays une immigration jugée trop généreuse, mais aussi le laxisme de sa politique de sécurité. D’autant que la police allemande n’est toujours pas parvenue à retrouver l’auteur des massacres, dangereux et armé, toujours en liberté. A l’entrée de la campagne électorale, la chancelière allemande aurait sans doute préféré que le débat sur la sécurité, sur ses responsabilités personnelles dans la politique migratoire ne rebondisse pas. Elle pensait l’avoir relégué au second plan, pour pouvoir au contraire s’appuyer sur son bilan économique, qui fait de l’Allemagne un îlot de prospérité en Europe. Aucun doute, les événements de Noël bouleverseront fortement le climat de son quatrième marathon électoral.
« La mort semée par un camion-bélier [...] autour des petites baraques de Noël a été, pour l’extrême droite, le signal de l’offensive. »