Signé Roselyne
« La tragédie arrive à son terme : la fin du PS est proche, et ses adversaires n’y auront été pour rien. »
Lundi
Ce début de semaine est l’occasion de découvrir deux livres au vitriol, terribles réquisitoires contre François Hollande par des hommes qui se revendiquent socialistes. Son ancien conseiller Aquilino Morelle dans L’Abdication (Grasset) dresse un portrait du président de la République en social-traître qui n’est pas sans talent, mais sent le règlement de compte et le plaidoyer pro domo du collaborateur qui s’estime injustement évincé. Plus intéressante est la démarche du journaliste Claude Askolovitch. Son livre Comment se dire adieu ? (J.-C. Lattès) restitue les errements de l’actuel président de la République dans la longue lignée des reniements qui secouent le PS depuis la Libération. Le ton est brûlant de l’amour déçu d’un homme de gauche qui ne supporte plus les boursouflures langagières qui tentent de masquer les impuissances et les trahisons. Je partage en grande partie son analyse. Dans cette longue liste des fossoyeurs de la gauche et pour ne considérer que la Ve République, François Mitterrand jeta la première pelletée de terre en érigeant la concussion en système dans le fonctionnement du parti de la rue de Solférino puis le ruina en briguant un second mandat crépusculaire. Lionel Jospin, qui fut lui aussi premier secrétaire du parti pendant les années de plomb des scandales, puis, Premier ministre, l’emmena au désastre du 21 avril 2002. Les caciques, après avoir tout fait pour faire battre Ségolène Royal à la présidentielle de 2007, lui volèrent sa victoire à la tête du PS par un truandage destiné à couronner une Martine Aubry qui leur paraissait moins dérangeante qu’une agitatrice imprévisible. Les mêmes pensèrent que Dominique Strauss-Kahn serait l’homme idéal pour protéger les prés carrés des grands féodaux alors que tous connaissaient et donc couvraient ses comportements impudiques. En cette fin de mandat, les poignards que François Hollande avait su si bien manier, y compris contre la mère de ses enfants, se sont retournés contre lui. La tragédie arrive à son terme : la fin du PS est proche, et ses adversaires n’y auront été pour rien.
Jeudi
La visite de Marine Le Pen à la Trump Tower avait quelque chose de lunaire et pas seulement parce qu’elle avait emmené dans ses bagages un ancien responsable de la secte Moon.
Je ne sais qui est l’hurluberlu qui avait organisé ce déplacement, mais la candidate ferait bien de s’en débarrasser promptement. La date du déplacement fixée le lendemain de l’incroyable guignolade que fut la conférence de presse du président élu des États-Unis semblait la placer dans le sillage d’un histrion malodorant. Les injures à la presse, le refus de laisser poser des questions à certains journalistes, la présence de figurants stipendiés, l’étalage de dossiers destinés à accréditer la passation de ses affaires à ses fils, dossiers qui se révéleraient constitués de… feuilles blanches, les rodomontades grotesques alors que, au cours des auditions devant le Sénat, ses futurs collaborateurs tentaient de se dépêtrer de ses inconséquences, tout cela a dressé un tableau désolant. L’image de la présidente du Front national sirotant un café dans un gobelet en carton à la table d’un bar de la Trump Tower dans l’attente d’un rendez-vous improbable qui n’est jamais venu n’était pas moins affligeante. Personne en effet ne peut croire une minute que cette affaire n’ait pas été montée pour peaufiner la stature internationale de celle qui se voit déjà à l’Élysée. Pour cela, il aurait mieux valu obtenir un carton d’invitation pour le McCormick Place de Chicago, là où Barack Obama prononçait mardi son discours d’adieu.
Nous ne servons pas pour marquer des points, mais pour rendre la vie des gens meilleure, a-t-il assuré. Phrase à méditer pour ceux et celles qui pensent que la politique est faite de coups de com’, contestables quand ils sont réussis, calamiteux quand ils sont ratés
Vendredi
Finalement, ce débat de la primaire de gauche organisé par la mal-nommée Belle Alliance populaire ne fut pas indigne, non, simplement très ennuyeux, tel d’ailleurs le premier de celle de la droite et du centre. Dans ce casting somme toute pâlot puisque les vedettes, Macron et Mélenchon, sont « ailleurs », on décernera le prix de la présidentialité bougonne à Manuel Valls, du volontarisme brouillon à Arnaud Montebourg, de l’intellectualisme condescendant à Vincent Peillon, du romantisme inconséquent à Benoît Hamon. Comme aux Césars, la catégorie « espoirs » remarqua Jean-Luc Bennahmias dans un rôle de comique troupier et Sylvia Pinel dans celui – ingrat – de la cousine de province. Quant à François de Rugy, il jouait les utilités dont on est bien en peine de se rappeler une seule des répliques, une fois le rideau tombé. Il faut dire que les pauvres avaient été bien cassés dans la matinée par une déclaration tonitruante de Anne Hidalgo, qualifiant dans Le Monde le quinquennat de Hollande « d’énorme gâchis », alors qu’à part Bennahmias, tous les protagonistes en sont les parties prenantes. La maire de Paris, en soutenant Vincent Peillon qui n’a objectivement aucune chance de remporter cette primaire, s’est donc clairement positionnée comme recours pour 2022. Affaire à suivre.
Samedi
Décidément, en cette semaine, la vie politique m’a semblé bien démoralisante. Les ténors de Les Républicains semblent désespérés d’avoir perdu leur titre de droite la plus bête du monde et font tout pour le récupérer à coup de querelles picrocholines, Benoît Hamon affirme dans Libération qu’il n’est « pas un coup d’un soir », déclaration de haute volée sans doute destinée à l’inscrire dans la durée. Emmanuel Macron, lui, engrange le soutien de Corinne Lepage qui a trahi à peu près tout le monde en courant depuis vingt ans après un poste ou une investiture et Jean-Luc Mélenchon se prend pour Cloclo et annonce une grande première en animant un meeting avec son hologramme. Heureusement que Thomas Pesquet nous a emportés hier dans les étoiles et réconciliés avec ce qu’il y a de mieux dans l’humanité. Par sa simplicité, son intelligence, son sang-froid, sa capacité d’émerveillement, ce garçon nous a réjouis et sa sortie extravéhiculaire réconciliait la poésie et la technologie. Pesquet, président! Allez, je rigole…