ET UN JOUR...
Au XIXe siècle, le massif de la Sainte-Baume compte plusieurs glacières. On y stocke la glace durant l’hiver. Le er septembre , sur fond de guerre entre marchands glaciers, une altercation dégénère en coup de fusil à Mazaugues.
En ce début de XIXe siècle, les glacières, énormes réservoirs de pierre destinés à stocker la glace, poussent comme des champignons sur les versants nord et oriental de la SainteBaume. On achemine la glace de nuit vers Toulon et Marseille principalement. La concurrence entre marchands glaciers commence à créer des tensions. Ce 1er septembre 1825, sous le règne de Charles X (1824 -1830), c’est un maçon, Xavier Marchand, qui fait route de Rougiers vers deux glacières en construction au quartier de l’Orphelin à Mazaugues, avec six ouvriers et un attelage de boeufs. Au moment où la troupe dépasse une bastide nommée « Les Glacières », le propriétaire du lieu, Michel Pivot, s’interpose. Xavier Marchand propose alors de le dédommager si le chemin est abîmé. Après quelques tractations, le maçon décide d’avancer car le chemin est communal. Pivot ne l’entend pas ainsi, traitant les hommes de « canailles ». Il court chercher son fusil à deux canons. Canorgues, un des ouvriers, lui dit qu’il est en tort s’il tire sur des hommes désarmés. Mais, Michel Pivot épaule son fusil. « Au premier ! », s’écrie-t-il, puis il ouvre le feu.
Jugé et acquitté
Canorgues, sans parvenir à le désarmer, a pu détourner le tir mais il est blessé. Le 3 septembre, Pierre Tistanier, médecin de Signes, certifie que le poignet de Canorgues montre les plaies d’un coup de fusil. Deux pièces à conviction sont transmises au juge de Brignoles : le fusil double et un gilet. Ce dernier envoie une commission rogatoire à son homologue de Toulon. Lequel procède le 30 septembre à l’interrogatoire des témoins puis traduit l’affaire en justice. Le 9 décembre, un mandat d’arrêt est signé contre Michel Pivot. Le garde champêtre de Meynarguette (aujourd’hui territoire de Mazaugues), relaie l’information au tambour devant la mairie de Signes. Le document est placardé sur la porte de la bastide « Les Glacières. » On ne sait comment la police met finalement la main sur Michel Pivot mais le 16 mai 1826, Honoré-Esprit Gérard,
président du tribunal de première instance de Draguignan, procède à l’interrogatoire de l’accusé. Le marchand-glacier, né à Marseille, demeurant à Meynarguette, âgé de 36 ans nie la tentative d’homicide volontaire : « Voyant des inconnus sur son terrain, il les a interpellés, ils l’ont insulté et maltraité ». Le maire de Meynarguette établit un certificat de bonne conduite, le maire de Marseille fait de même. Le procès a lieu les 2 et 3 juin 1826. Dans cette affaire, qui traduit la dureté des relations entre producteurs de glace autour d’enjeux aujourd’hui oubliés, Michel Pivot est finalement acquitté.