Var-Matin (Grand Toulon)

Dipanda sort de sa réserve...

L’arrière droit de Saint-Raphaël vit un rêve éveillé. De Nantes à Paris, en passant par Lille, il a connu toutes les émotions avec ses potes tricolores. Tout, sauf une : celle d’un succès en finale

- RAPHAËL COIFFIER

Paris. Début d’après-midi. Au bout du fil, un finaliste. Du championna­t du monde. Un expert disert, que le dernier acte shakespear­ien de ces longues nuits des rois, à sacrer, ne trouble en rien... De l’hôtel des Bleus, Adrien Dipanda prend le temps. Le temps de se confier. Le temps de raconter l’épopée. Le temps de décrire la floraison du temps des amours. Celles nées avec le peuple de France. De Nantes à Lille. De Lille à la capitale... « C’est fort. C’est dingue. On vit un truc de fou clame le Raphaëlois. En tant qu’handballeu­r, on n’imaginait pas une telle ferveur. Elle n’a jamais existé d’ailleurs... » Plus de 28000 supporters dans le Nord. Près de 16 000 sur les quais de Bercy. La houle de la foule emporte toutes les émotions sur son passage. « C’est génial de jouer dans toutes ces salles. On est au contact de publics différents. Je n’avais jamais vécu ça... »

Âmes en délire et carotte à digérer

Au point, une fois, de se laisser submerger par ces âmes en délire. Presque d’en oublier le jeu. Noyé par le nous hurlant et déchirant du stade PierreMaur­oy. « L’ambiance, en quart, nous a un peu tétanisés. On était tendus. Il a fallu apprivoise­r tout ça dans les premières minutes. Ensuite, on a été portés! » Jusqu’à renverser la Suède. Puis étouffer la Slovénie. En attendant de défier Croates ou Norvégiens. Des durs à cuire. Même au pays de Bocuse. « Je n’ai pas de préférence. Chaque équipe a son histoire. Elles sont jeunes et n’auront aucune pression car elle sera sur nous. » Sur les épaules de ces costauds au parcours exemplaire. Sans faute. À la cote d’amour au plus haut. Lame à double tranchant dont ils sont préservés. « On est dans notre bulle. Protégés de cet engouement afin d’être concentrés à 100 % sur l’objectif. En fait, on mesure cette ferveur uniquement au coup de sifflet final... » Lorsque le rideau tombe sur la scène de leur débauche d’énergie. De leurs combinaiso­ns en latex, nées pour distendre les défenses. « On a tous la sensation de vivre des moments exceptionn­els. C’est pourquoi on prolonge le plaisir sur le terrain après chaque victoire. Pour le remercier. On n’a pas envie que ça s’arrête. » Or le temps file. Dans la lumière. Demain, les tricolores refermeron­t leur grimoire. Avec l’espoir d’y griffonner leur légende. Ponctuée de points de suspension en fin de phrase. Mais pas pour tous. Certains anciens se retireront en effet de la mêlée. Laissant le petit Panda nostalgiqu­e... « Je veux les remercier. Il faut les remercier. Si le hand français en est là, c’est grâce à eux. » À ceux de 2001, aussi, année du premier titre mondial historique. « Les Gilles, Fernandez et j’en passe, ils méritent, outre notre respect, un hommage. Je trouve que cette génération n’est pas assez mise en valeur sur ce Mondial. » À moins qu’en cas de sixième sacre, ce dimanche, une surprise ne sorte du chapeau. Aux lapins d’abord de digérer la carotte... « On se prépare pour ne pas louper cette ultime marche, avance Adrien. Pour le moment, on a juste assuré le strict minimum : une médaille. Avec notre groupe, on ne pouvait pas attendre moins. Surtout chez nous... » Hier les hommes du duo Dinart - Gilles ont donc pris la direction de l’Insep. « Pour de la récupérati­on et un peu de travail musculaire précise l’arrière droit du SRVHB. Samedi (lire aujourd’hui, Ndlr), on aura droit à la séance vidéo et l’entraîneme­nt tactique. » Ensuite, une tisane et au lit. Avec le doux rêve de dormir comme un bébé. « C’est toujours difficile de dormir avant un match. Il y a de la tension. Mais on l’aime cette boule au ventre! » Ce soir, Dipanda tuera seul la longueur de la nuit. Après avoir partagé sa chambre durant quinze jours avec Vincent Gérard. À croire qu’il a été son porte-bonheur.

« Pas là pour se la raconter »

C’est fort. C’est dingue. On vit un truc de fou. Inimaginab­le...”

Pourvu que ça dure. Même si Titi Omeyer devrait débuter la finale. Comme l’a annoncé, vendredi soir, Didier Dinart. « Ça devrait être ça. Mais je n’ai pas d’info particuliè­re là-dessus... » De toute façon, au sein de cette joyeuse colonie, personne ne se fait du mouron. On tient son rôle et on reste à sa place. You kaïdi aïdi aïda... « Chacun sait ce qu’il a à faire. Il n’y a pas d’ego surdimensi­onné. C’est sûrement pour cette raison que ça fonctionne. » Le vécu des derniers Jeux Olympiques de Rio pèse aussi dans la balance expérience. « Forcément, deux mois ensemble, ça rapproche... » Mais cette proximité n’explique pas le naturel de ces joueurs. Attachants. Abordables. Là où d’autres érigent des herses entre eux et les supporters. « On essaye de garder notre simplicité. Notre naturel. On n’est pas là pour se la raconter. Vous savez, un gars comme Niko (Karabatic), il ne refusera jamais de signer un autographe même s’il en a déjà signé 100 dans la journée. Je crois que ça plaît aux gens... » La belle histoire ne demande qu’à se prolonger avec ces faiseurs de miracles. Jamais vendeurs de mirages. Juste d’étoiles. À épingler sur les maillots. Côté coeur évidemment. Celui qui, ce soir,

va battre la chamade !

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