Sur la « Prom’ » à Nice, «les vrais sujets sont oubliés : sécurité, chômage... »
Sur le bord de mer niçois, qui réapprend doucement à vivre après le 14-Juillet, on déplore une campagne de « l’indécence » qui n’aborde pas les « vrais » sujets : sécurité, chômage, retraites...
«C’est pas une campagne présidentielle, c’est une campagne de diffamation!», raille Jean-François Taïs. «On ne parle pas du fond, de ce qui préoccupe les Français!», râle Claude Bernard. C’est un jour de printemps sur la promenade des Anglais. Le soleil joue sur les tables de la terrasse du restaurant La Canne à Sucre, où le patron, Tarek Salem, sert des petits noirs à la chaîne. Quatre expressos serrés à la table de Kirkor Ajderhanyan, vice-président de l’association Nice Promenade qui parle politique avec des amis. Un café au lait à des touristes juste derrière. Ça ressemble à la Prom’ de toujours. Insouciante. Vivante. Mais les Niçois savent. Ils savent l’ombre malgré l’été qui revient. C’est, ici, une toute petite poupée de chiffon ; là, des galets en forme de coeur que le soleil ne parvient pas à réchauffer. L’ombre du 14-Juillet, 86 morts. Ici, disent JeanFrançois Taïs, président du conseil syndical du Royal Luxembourg, Claude Bernard, président de l’association Promotion et sauvegarde du front de mer et André Vallier, viceprésident, on ressent peut-être un peu plus qu’ailleurs « l’indécence » de cette campagne. Ici, « on est peut-être un peu plus sensible à la sécurité. C’est le problème numéro un. Et ça, on n’en entend pas parler ! », relève Jean-François Taïs. «On n’a pas peur mais la sécurité, c’est le tourisme », vital pour la ville. « La sécurité, ce n’est pas que des gendarmes avec des mitraillettes en bandoulière, c’est vivre ensemble», nuance Claude Bernard. « En Algérie, on vivait ensemble, on jouait au foot ensemble. Puis, certains ont créé et exacerbé des tensions. Je sens revenir ça, ici. Ces deux communautés que l’on hérisse l’une contre l’autre. On va revivre des ratonnades », s’inquiète André Vallier. « Une fracture est amorcée », constate Jean-François Taïs. « Ça aussi, on en parle peu. Si, Marine Le Pen en parle, mais exclure n’est pas une solution!». «Cette campagne atteint des sommets de fracture politique!», se désole Claude Bernard. «On assiste à un festival des promesses impossible à tenir, c’est la grande distribution ! Quand viendra l’heure de l’addition... » Jean-François Taïs est d’accord : « Hamon veut distribuer de l’argent qu’il n’a pas à ceux qui ne travaillent pas, Marine Le Pen va devoir trouver de l’argent qu’elle n’a pas pour sortir de l’Europe... » Revue des candidats : « Fillon, n’en parlons pas ! Mélenchon, c’est le Coluche de la politique, un bon débatteur mais son programme n’est pas plausible» . Et puis, il y a « Macron qui ne sait pas que la Guyane n’est pas une île ! », moque Jean-François Taïs. «Remarque que nous, entre ni droite ni gauche, et droite et gauche, on ne sait pas qui est Macron…», note Claude Bernard. Pour la première fois de sa vie, cet ancien chef d’entreprise ne «sait pas pour qui il va voter» .Etil n’est pas le seul à y perdre son nissart, confirme Jean-François Taïs: « Les gens étaient fixés mais au fur et à mesure du marigot, ils ne savent plus... » Claude Bernard hoche la tête et prédit : «La grande gagnante de cette élection, ce sera l’abstention ». Le 14-Juillet, la Prom’ a vécu la fin d’un monde. Aujourd’hui, conclut Jean-François Taïs, elle assiste, comme la France, à « la fin d’un système politique ».
La grande gagnante, ce sera l’abstention ”