Var-Matin (Grand Toulon)

L’humour pour sensibilis­er au handicap

Interview A l’occasion de la soirée Ouverture de Champ organisée par Ladapt, l’acteur Adda Abdelli était, hier, de passage sur la rade afin de parler du handicap en sortant des sentiers battus

- PROPOS RECUEILLIS PAR CEDRIC VIGLIONE

Pour la première fois l’associatio­n Ladapt(1) pose ses valises à Toulon. Hier soir, au cinéma Pathé Liberté, l’associatio­n tenait une soirée portée sur la dédramatis­ation du handicap. Une rencontre avec le grand public animée en partie par Adda Abdelli, le coauteur de la série humoristiq­ue Vestiaires. Lui-même handicapé depuis son plus jeune âge, il se confie.

Pourquoi avez-vous choisi de participer à la tournée d’Ouverture de Champ ? Cette soirée permet de s’exprimer de manière décalée de nos maladies, de nos quotidiens. C’est aussi un moyen de montrer que nous sommes aussi dans la culture. Le fil rouge, c’est que l’on ne se moque pas du handicap, on rit avec.

Avec votre série Vestiaires vous mettez en scène de façon drôle des handicapés dans leur quotidien, pourquoi ? Avec Fabrice Chanut (coréalisat­eur, Ndlr), on voulait juste raconter via un format court notre quotidien de nageurs et de ce qu’il se passait dans les vestiaires. Mais finalement, elle a commencé à véhiculer un message. Elle pousse les gens à assumer leur différence en brisant les tabous et en cassant l’image du corps parfait.

Dans l’épisode Handimen, les personnage­s sont confrontés au réalisme, est-ce votre ennemi quotidien ? C’est un épisode particulie­r, je suis content que vous l’ayez remarqué. On a ici un double langage entre la personne normale qui nous considère comme des héros, en soulignant nos différence­s, et nous qui voulons être vus de la même manière que les autres. C’est le décalage quand on est concerné par une invalidité.

Après Vestiaires ,ilya Vestiaires libérés qui revisite l’histoire à votre manière. En effet. On est toujours dans cette conception de normalisat­ion de notre différence. L’idée est de dire que dans l’histoire, il y a eu des handicapés qui ont marqué mais que l’on ne l’a jamais dit. Bon, la plupart du temps on met un handicap à quelqu’un qui n’en avait pas. Et puis, ça me fait bien rire d’imaginer Napoléon avec des doigts en moins ou la Vénus de Milo comme une représenta­tion d’une femme manchote.

Vis-à-vis de votre handicap, que vous a-t-il appris ? Il m’a forcé à me bouger. J’ai très vite compris qu’il fallait que j’aille chercher le monde, qu’il ne viendrait pas à moi. Mais c’est pour tout le monde pareil, normal ou pas. Et puis de toute manière, on a tous un handicap, une gêne, une différence et il ne faut pas la laisser dicter notre vie.

Un dernier mot pour les lecteurs, qu’ils soient handicapés ou pas ? Je leur dis que c’est chouette d’habiter le Sud (rires). Plus sérieuseme­nt, je leur conseille de se mettre à nu, de s’accepter tels qu’ils sont. Il faut que l’on prenne du recul sur notre vie, elle n’est pas si mal. Moi par exemple, je préfère être invalide en France que valide dans d’autres pays du monde où la misère règne. On n’est pas si mal logé. Aux handicapés plus particuliè­rement, mon message est le suivant : Osez prendre votre place dans la société. Il n’y a pas de complexe à avoir. Plus on nous voit, moins on nous voit. Ce que j’entends par là c’est qu’à force de nous apercevoir, les gens vont oublier nos maladies et la normalité va peut-être prendre sa place dans nos quotidiens. 1. Qui oeuvre pour l’insertion sociale et profession­nelle des personnes handicapée­s.

 ?? (Photos C. V.) ?? Né en Algérie il y a  ans, Adda est atteint de poliomyéli­te depuis l’âge d’un an. Il a dû quitter son pays natal pour Marseille dans le but d’être soigné.
(Photos C. V.) Né en Algérie il y a  ans, Adda est atteint de poliomyéli­te depuis l’âge d’un an. Il a dû quitter son pays natal pour Marseille dans le but d’être soigné.

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