Coke connection : lourdes peines requises
Trafic de stupéfiants, association de malfaiteurs et blanchiment d’argent : Nicolas Ruby, le représentant du parquet de Toulon a requis de l’emprisonnement et des amendes sévères
Deux heures et demie de réquisitoires et la facture judiciaire est présentée par Nicolas Ruby, le représentant du parquet de Toulon, aux dix prévenus (moins un en cavale) qui comparaissent depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Toulon pour des faits datant de 2014 et 2015. Après quatre jours de débats, l’accusation affiche ses certitudes dans le cadre de cette affaire de trafic de cocaïne, d’association de malfaiteurs et de blanchiment d’argent entre Toulon, La Valette et la Corse.
Biens saisis
Dix ans de prison sont requis pour trois hommes placés dans le box vitré réservé aux détenus. Sur les bancs où ont pris place les mis en cause arrivés libres, les visages se crispent. La tension est palpable. certains risquent le mandat de dépôt à la barre au moment du jugement. Le procureur poursuit sur de lourdes amendes – jusqu’à 20 000 euros –, la confiscation d’une maison à Carnoules, des interdictions de séjour dans le Var et des interdictions de quitter le territoire. Il admet que ce volumineux dossier de 15 tomes et de 8 000 feuilles cotées « part dans tous les sens », que d’autres personnes auraient pu être mises en examen « mais il y a eu des choix, sinon c’était cinq semaines de procès ».
Écoutes en stock
Dans les investigations menées par la police judiciaire et basées essentiellement sur des écoutes de téléphone, de parloir, de véhicules, de logements, les conversations laissent plus que supposer à un trafic. Mais aussi stupéfiant que cela soit, admet le représentant du ministère public, « il n’y a pas eu un gramme de cocaïne de saisi, mais on a tiré sur un fil et on pénètre dans une toile d’araignée où tout le monde a tissé des liens. Un réseau. » L’univers de l’argent facile. Ou pas vraiment selon M. Ruby. «Il faut en vouloir de cette vie ! De ces conversations qui n’ont ni queue ni tête. De se retrouver dans des parkings du Mourillon ou de Hyères. » Et de pointer du doigt le côté immoral de ces gens qui ne contribuent pas à leur part vis-à-vis de la société. Qui ne paient pas d’impôts. L’un des prévenus s’est d’ailleurs plaint de la qualité « médiocre » de l’enquête. « Mais que M. P. paie des impôts et on pourra recruter des policiers ! »
Chacun son rôle
Motivant ses réquisitions, Nicolas Ruby s’est attaché à définir les rôles de chacun avant de distribuer les peines souhaitées. A commencer par Thierry V., « celui qui veut nous faire croire qu’il a un rôle périphérique, mais qui fait le taxi pour deux comparses. Il a son propre réseau (3 ans, dont 18 mois avec sursis, 4 000 € requis). Suit le retraité sexagénaire Patrick L. «qui exerçait l’activité occulte de garagiste, mais pas seulement, impliqué dans le trafic avec des clients identifiés » (3 ans de prison). Julien F. qui ne se considère pas comme un voyou, « condamné début 2000 pour vol à main armée à un train de vie conséquent qu’il n’est pas capable de justifier par son RSA » (5 ans de prison, 20 000 € d’amende, interdiction de séjour dans le Var). Le responsable d’un restaurant du Mourillon, Ahmed B., lui aussi ne peut justifier ses largesses financières, ses salaires de 5000 €, l’achat d’une villa (7 ans de prison, saisie de 16 625 € sur ses comptes et de sa villa à Carnoules).
Le clan des femmes
C’est ensuite autour du clan des femmes. Des (ex)compagnes d’être dans le viseur du procureur. Il y a Roxane A., « l’étoile fuyantedu dossier, compagne fugace de Nicolas P. qui ne voit rien » (relaxe partielle, 2 ans de prison dont un avec sursis, 5000 € d’amende). Géraldine C., concubine de Régis R., l’homme en cavale depuis le début de l’enquête, est la restauratrice toulonnaise « qui vit avec un fantôme, mais qui mène la grande vie» (2 ans dont un an avec sursis mise à l’épreuve, 20000 € d’amende). Un cran au-dessus l’on trouve, Sandrine L., l’ancienne amie de Patrick M., la quadragénaire qui fait commerce de ses charmes. Mais pas que. Elle est poursuivie pour complicité. Pour avoir jouer un rôle actif pour récupérer les créances de son compagnon incarcéré, pour maintenir les activités du réseau (3 ans, mandat de dépôt, 20 000 € d’amende).
Les têtes de réseau
Enfin, Nicolas Pietri, considéré comme un lieutenant, est sous le coup de 7 ans de prison requis. Dix ans ont été demandés pour Patrick M. qui, depuis sa prison, aurait géré le trafic et pour Régis R., l’Arlésienne du dossier, l’homme introuvable.