Var-Matin (Grand Toulon)

La force en lui

Le nouveau technicien du RCT, Fabien Galthié, prendra ses nouveaux quartiers le 18 juin. Encore un peu sur sa réserve, on le sent impatient et déterminé

- PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE BERSIA

Plein « d’appétit », Fabien Galthié confie son « honneur » de venir entraîner Toulon. Conscient de la tâche qui l’attend, il veut surtout ne pas décevoir.

Cette fois, la page 20162017 est bien tournée. Et le temps de parler est venu pour Fabien Galthié. Le nouveau technicien Rouge et Noir s’installera dans sa nouvelle maison et sa nouvelle vie à compter du 18 juin. À quelques jours de répondre, in situ, à l’appel de Mourad, on le sent tout à la fois, prudent et très excité à l’idée de « collaborer » à la grande histoire du « Ercété ». Ce RCT dont l’ancien demi d’ouverture columérin et toulonnais, Fred Saint-Sardos, fut le premier à lui parler à la fin des années 80, bien avant Christophe Dominici ou Laurent Emmanuelli à Paris. Ce RCT contre lequel il se souvient avoir joué dès 1988 à ses débuts en première division et qu’il a toujours profondéme­nt respecté… Aujourd’hui, il sait à la fois beaucoup et peu sur ce qui l’attend à Toulon, mais c’est ce qui l’excite justement !

Qu’avez-vous pensé de la finale du Top  ? C’est une finale qui a eu le mérite de ménager du suspense. Toulon était en passe de renverser la situation sur les dernières minutes. On sentait une équipe de Clermont qui faisait le dos rond face à des Toulonnais qui finissaien­t plus fort. Il y a eu deux opposition­s de style avec une ASM qui a déroulé son rugby pendant vingt minutes et qui a fait mal au RCT en lui passant un -. Puis une équipe de Toulon qui, doucement, a repris le contrôle du match dans son style caractéris­tique de cette fin de saison, avec un jeu à zéro ou une passe.

Avez-vous été surpris par le niveau de jeu du RCT ? Toulon a construit sa fin de saison sur ce style et a réussi à renverser toutes les situations comme ça, donc on sentait que cette équipe avait un gros capital confiance.

Vous avez pu juger d’une base de travail déjà très sérieuse ? En tout cas sur cette fin de saison, l’équipe a réussi à finir fort avec une identité bien marquée d’un jeu fait de puissance et de défi. Ce n’est peut-être pas tout à fait votre philosophi­e du jeu ? Ma philosophi­e de jeu, c’est surtout jouer avec les potentiels que j’ai pu avoir. Au Stade Français, j’avais un bon équilibre puissance-vitesse avec des avants plutôt légers mais qui se déplaçaien­t bien. J’avais de la puissance au milieu du terrain avec un gars comme Bryan Liebenberg, par exemple. Ensuite, avec les Argentins, c’était plutôt une équipe légère comparée aux nations qu’elle affrontait. La moitié des joueurs était amateurs entre  et . Il fallait s’adapter à des joueurs un peu moins prêts ou physiques que leurs adversaire­s. Et à Montpellie­r, le MHR était une équipe qui n’avait pas beaucoup d’arguments. Il a fallu construire quelque chose qui puisse mettre en difficulté­s les adversaire­s. À chaque fois, j’essaie de construire une organisati­on qui s’adapte au potentiel de l’équipe… Il est clair que Toulon, sur la fin de saison, a décidé de jouer sur sa puissance et a retrouvé de la confiance. C’est quelque chose qu’il ne faut pas négliger. Il y a plusieurs facteurs pour expliquer ça. Il y a le jeu, bien sûr, mais aussi peut-être l’urgence sur la fin, où les joueurs se sont dits : “Il faut qu’on fasse quelque chose. On ne peut pas terminer la saison comme ça…”

Parlez-nous de votre projet... Les premiers temps, on va travailler avec le staff. Le staff, c’est quatre practices (secteurs, Ndlr). Soit le rugby, la préparatio­n physique, la partie médicale et toutes les fonctions supports qui tournent autour. Je vais essayer de travailler sur une organisati­on qui puisse mettre en oeuvre tout le monde. Je veux responsabi­liser l’ensemble des acteurs en identifian­t de manière précise les tâches de chacun. Lorsqu’on va mettre en place cette organisati­on, je souhaite que tout le monde s’exprime, qu’il n’y ait personne qui reste en retrait. Tout le monde doit participer et trouver sa place dans un cadre le plus précis possible.

Avez-vous déjà rencontré les joueurs ? Je rencontrer­ai les joueurs qui sont encore présents. Je souhaite faire la même chose avec eux. Je veux construire une organisati­on qui leur va bien et qui ménage les équilibres. Il faut conserver les points forts, voir les points d’améliorati­on et essayer d’évoluer sans faire de révolution. Je crois davantage à une évolution quotidienn­e et ponctuelle. J’ai suivi les problèmes que l’équipe a rencontrés cette année lors des changement­s d’entraîneur­s. Il faut pouvoir faire évoluer avec précision le rugby sans le transforme­r. On voit bien qu’à Toulon, il y a aussi un public qui aime le combat, le défi…

Entraîner le RCT, c’est un rêve ? C’est particulie­r. On va dire que Toulon est un club différent des autres de par son histoire, sa situation géographiq­ue, sa culture… Il y a aussi une ferveur traditionn­elle, son stade, la population très mixte qui le fréquente. Il y a ce qu’a fait Toulon dans le passé et ce qu’il a fait récemment dans les années de Mourad, avec Bernard Laporte, les titres, les finales. C’est un club qui aujourd’hui possède une image très forte dans le monde du rugby, et, donc, avoir la chance de collaborer à cette histoire, c’est un honneur Vous ne doutez pas de votre entente avec Mourad Boudjellal ? Je n’ai pas envie de décevoir, surtout. Je pense que c’est quelqu’un qui m’a lancé très tôt des signes forts de confiance. Je vais vraiment mettre en oeuvre tout ce que je sais, tout ce que je peux pour ne pas le décevoir.

Comment occupez-vous vos journées depuis que vous êtes au chômage technique ? Le rugby est passé pro en . J’ai toujours travaillé à côté. Pendant ces deux ans et demi, j’ai continué de travailler, dans les métiers du conseil (stratégie et organisati­on) en plus de mes missions avec France Télévision­s. J’étais un peu en marge du rugby mais pas trop, car je continuais à passer du temps, à voyager dans les clubs et les provinces étrangères. J’ai suivi les Anglais avec Eddie Jones, je suis allé au pays de Galles voir les Ospreys, j’étais récemment en Irlande avec la Province du Munster, j’ai aussi passé du temps dans des clubs français, j’ai gardé des contacts avec l’équipe d’Argentine que j’ai entraînée. Même avec beaucoup de distance, j’ai continué à être actif dans le monde du rugby. Mourad est venu assez tôt me demander de collaborer et, au bout d’un moment, j’ai accepté. Je n’ai pas pu dire non. Pendant ces deux ans et demi, je me suis beaucoup régénéré. J’ai pris de la distance et de la hauteur. Aujourd’hui, j’ai beaucoup de plaisir à revenir sur le terrain et beaucoup d’appétit. Maintenant, l’enjeu, c’est qu’à la fois le staff et bien sûr les joueurs aient aussi cet appétit et cette ambition en championna­t et en coupe d’Europe.

Le RCT a perdu de nombreuses stars. Le challenge en est-il encore plus relevé ? Ce sont des périodes de transition. Mourad a réussi à aligner toutes les étoiles, avec son génie... Franchemen­t je ne sais pas comment il a fait ! Là, depuis quelque temps, des joueurs uniques sont partis et l’équipe doit continuer à être performant­e. Pour ça, il faut qu’il y ait des joueurs qui sortent, il faut des révélation­s, qu’on arrive à trouver d’autres compétence­s, d’autres forces pour exister encore à ce niveau-là. Ce n’est pas un défi facile.

Évoluer sans faire de révolution”

J’ai pris de la distance et de la hauteur”

C’est votre plus gros challenge d’entraîneur ? Oui, parce qu’il est à venir. Ce qui est passé n’est plus un challenge. Mais je vous dirai en permanence que mon challenge n’est qu’individuel, alors que nous avons un challenge collectif à relever. Pour ce qui concerne mon challenge, je pense que j’ai la force, l’énergie, pour tout mettre. Il faut qu’on arrive tous à donner notre meilleur.

Si l’on ajoute anciens Toulonnais et ex-Montpellié­rains, vous arrivez presque en pays de connaissan­ce ? Non, franchemen­t, je suis en pays inconnu, et c’est ce qui me plaît aussi beaucoup. J’ai envie de découvrir quelque chose de très différent.

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(Photo Patrick Blanchard) À défaut de savoir parfaiteme­nt où il met les pieds, Fabien Galthié (ici au Stade de France pour la finale, entre Hubert Falco et Mourad Boudjellal) sait déjà beaucoup sur le RCT. Après deux ans et demi d’arrêt, l’ancien entraîneur de Montpellie­r ne...

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