Riche et célèbre
Le suicide de Jean-Michel Lambert responsable des douloureux fiascos de l’enquête menée après l’assassinat du petit Grégory, m’a rappelé des souvenirs antérieurs au début de l’affaire mais annonciateurs des drames qui devaient suivre. À l’époque, je dirigeais la rédaction d’un quotidien du soir, très fier d’accueillir des élèves délégués par l’École de la Magistrature. À l’issu d’un mois passé à partager nos problèmes d’éthique et nos difficultés techniques, je recevais les stagiaires afin de savoir à quoi ressembleraient les futurs magistrats du parquet et du siège. Sur ses ambitions personnelles, Jean-Michel Lambert avait été très clair : « Je souhaite devenir riche et célèbre ». Frappé par son manque de maturité, je n’avais pu me retenir de lui conseiller d’exercer un autre métier. Quelques mois plus tard, j’avais reconnu Lambert sur la photo du jeune magistrat auquel on avait confié comme premier dossier celui du petit garçon noyé dans la Vologne. Après chaque inculpation erronée, après chaque emprisonnement arbitraire et injustifié, la confidence me revenait à l’esprit : « Je souhaite devenir riche et célèbre ». Riche, il ne le fut jamais, en dépit de la publication de quelques romans policiers. Célèbre, il le devint à son grand dam. Au point de décider d’en finir avec une vie gâchée par la mort d’un innocent et l’absence de coupable.