Var-Matin (Grand Toulon)

À l’épreuve des médecins

La diffusion d’informatio­ns médicales dans la presse généralist­e a suscité, au départ, quelques crispation­s. Aujourd’hui, elle est considérée, par tous, comme utile. À condition d’éviter certains pièges

- NANCY CATTAN

Dans nos relations avec la presse, c’est un peu le “je t’aime, moi non plus”. On a besoin de vous, pour parler de certains sujets, des avancées technologi­ques par exemple, mais dans le même temps, on craint la vulgarisat­ion, susceptibl­e de dépouiller le message de sa substance scientifiq­ue, voire d’introduire des contresens. Aussi est-il tellement essentiel que nous établissio­ns une relation de confiance avec le journalist­e. » Préoccupé depuis longtemps par les questions éthiques (il a présidé l’Espace Ethique Azuréen), le Pr Dominique Grimaud admet que la tâche peut être très difficile… pour les médias. « Dans le champ de l’éthique notamment, les questions que l’on pose appellent des réponses tout en nuances, complexes… Parfois même, il n’y a tout simplement pas de réponse du tout ! Tout ça est très difficile à faire transparaî­tre dans un article ! » LePr Grimaud se souvient ainsi d’un article paru dans ces pages et qui abordait la question délicate de l’eugénisme « caché » « L’impact des mots a été énorme… » En dépit de quelques réticences, le Pr Grimaud se réjouit de la place croissante de l’informatio­n médicale dans la presse. « C’est un vrai progrès par rapport à une époque où l’on ne communiqua­it pas du tout. Les médias ont notamment beaucoup participé à porter les questions éthiques sur la place publique. Aujourd’hui, les médias sont un outil, au sens positif du terme, dont on se « sert » volontiers ; vous êtes notre interface avec le public et c’est extrêmemen­t utile. » Le journalist­e serait-il ainsi « manipulé » pour diffuser les idées ? La question suscite une réaction immédiate. « C’est nous, médecins, profession­nels de santé, qui sommes vulnérable­s… Vous pouvez faire de ce que l’on vous dit ce que vous voulez, grâce à vos habiletés, et d’autant plus facilement que le discours scientifiq­ue qui vous a été tenu n’était pas très clair ! »

Passé dans les moeurs

Le Pr Grimaud se souvient très bien du lancement des pages Santé. Et des réactions vives (empreintes de jalousie ?) que pouvait susciter une parution. « On pouvait se montrer très cyniques vis-àvis des profession­nels qui avaient l’honneur de ces pages : « Il fait son épreuve de titres dans Nice-Matin !» se moquait-on, suggérant qu’il ferait mieux de passer son temps dans la littératur­e scientifiq­ue, plutôt que dans la vulgarisat­ion. » Un discours qui, selon lui, ne s’entend plus du tout. « Communique­r sur ce que l’on fait, participe aujourd’hui de l’insertion de notre métier dans la citoyennet­é. Notre devoir est de mettre les questions à hauteur du public et ça passe par la presse. »

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