Raimondis, le «Dracénois manchot» fait des exploits aux États-Unis
Le 16 août 1778, la tempête fait rage dans l’Atlantique, au large de New York. La flotte française qui a quitté Toulon le 13 avril sous le commandement du comte d’Estaing pour aller prêter main-forte aux États-Unis dans leur guerre d’indépendance contre les Anglais, est ballottée par les flots. Le César, navire sorti des chantiers navals toulonnais, se trouve isolé du reste de l’escadre. L’occasion est rêvée pour que le navire royal anglais Iris l’attaque. Les mâts vacillent. On ne sait ce qu’il faut redouter le plus, la fureur de la mer ou les canons ennemis. Le César est commandé par un valeureux capitaine âgé de 55 ans, Joseph de Raimondis. Ce natif de Draguignan a une belle carrière derrière lui. Il est le fils d’Honoré-Emmanuel de Raimondis, seigneur d’Allons dans les Alpes-deHaute-Provence et lieutenant général des affaires civiles et criminelles de Draguignan. Joseph de Raimondis s’est déjà battu contre les Anglais : en 1747 au large du cap Finistère, où il fut blessé à bord du Tonnant mais put regagner la côte à bord de son navire au mât brisé; en 1756, au large de l’Espagne, à bord d’une escadre partie d’Hyères – où les Britanniques furent mis en échec ; en 1759 au large du Portugal où la plupart de ses compagnons trouvèrent la mort. En 1769, il a participé à la reprise de la Corse par les Français. C’est là que se situe la capitulation de Porto-Vecchio, le 14 juin, lorsque le curé et les notables de la ville sont venus se rendre à lui, en agitant une serviette blanche.
Son bras est arraché par un boulet
Depuis son arrivée en Amérique, il a participé le 8 août à l’attaque des Anglais et leur perte de sept navires dans la baie du Connecticut… Et voici qu’en ce 16 août 1778, les Britanniques ont une belle occasion de prendre leur revanche. Au milieu des éléments déchaînés, le combat dure déjà depuis près d’une heure. L’issue est incertaine. Soudain, Raimondis entrevoit la possibilité de rééditer la manoeuvre qui, en août 1751, en Guadeloupe, lui avait permis de mettre en déroute un navire hollandais très supérieur au sien en armement et en équipage. Il sai t la victoire à portée de main. D’un élan, il se porte à la proue du navire au milieu de la mitraille pour montrer le chemin à ses marins. C’est alors qu’un boulet ennemi lui arrache le bras. Il est à terre. On se précipite à son secours. Mais le capitaine continue à donner ses ordres. Il est évacué à l’intérieur du bateau. Quand le chirurgien a fini de l’amputer, il tente de remonter sur le pont et reprendre son commandement. Le César sortira vainqueur de la bataille.
Mort à Lorgues
L’héroïsme de Raimondis sera célébré en France et aux États-Unis. Il passera sa convalescence à Boston et sera accueilli le 10 janvier 1779 par le conseil de l’État du Massachussets pour recevoir un trophée de la part du président, au milieu des acclamations. Le lendemain, il s’embarque pour la France en compagnie de La Fayette. Il recevra par la suite les insignes de l’ordre de Cincinnatus accompagné des félicitations de Georges Washington. De retour dans sa patrie, on l’appellera désormais « le manchot dracénois ». Lorsqu’il prend sa retraite, il totalise quarante-huit années de service, vingt-cinq campagnes, sept combats au cours desquels il a été blessé deux fois. Joseph-Louis de RaimondisAllons est mort à Lorgues le 1er février 1801. L’indépendance des ÉtatsUnis doit un petit quelque chose au «manchot de Draguignan. »