L’Empire : la femme dans une nouvelle dimension au Liberté
L’Empire, nouvelle création de sa compagnie de danse, Frank Micheletti y travaille depuis trois ans. Cette semaine, au théâtre Liberté, où il est en résidence avant la première le 16 janvier, nous avons pu assister à ses dernières mutations : un nouveau geste de Gabriela Cecena, la danseuse solo ; un nouveau trait retenu par Hildegaarde Laszak, artiste qui l’accompagnera en dessins sur scène. Une création vivante à l’image du sujet : celui de la condition des femmes centraméricaines. Une histoire qui se déroule au Mexique, un pays que le chorégraphe de Kubilai Khan connaît depuis plusieurs années, pour y avoir monté des projets avec des artistes locaux. L’empire pourrait être celui, non loin, du géant USA, qui maintient la société mexicaine sous sa coupe. Frank Micheletti évoque les usines de montages à la frontière, produisant pour des salaires de misères, des biens dédouanés. Ou encore l’attrait qu’exerce cet empire, qui oblige les migrants des pays frontaliers « Honduras, Salvador, Guatemala, à traverser le Mexique. Ils sont alors confrontés aux cartels qui ont diversifié leurs activités, commettent des rapts, rançonnent, alimentent les filières de prostitution… ». Un autre empire. Pour le décrire, il s’est inspiré du livre de témoignages de femmes migrantes No women’s land, de la journaliste Camilla Pandhard.
Un sourire particulier
Finalement, L’Empire sera celui des femmes. «La femme centraméricaine n’est pas seulement une victime, elle veut faire bouger la société. Notre point de vue est de la montrer comme une figure de transformation de la société», explique Frank Micheletti. Loin de la souffrance et des larmes, la danseuse Gabriela Cecena – elle-même originaire du Mexique, vivant à la frontière nord avec les États-Unis – sourit à un moment et provoque le rire du spectateur en face. « Sourire face à la violence ou la mort est un trait » de ses compatriotes, reconnaîtelle, personnalité forte et fragile à la fois sur scène. « Le changement qu’appelle cette société est déjà là », préfiguré dans le spectacle pour Frank Micheletti. Les artistes eux-mêmes se mettent en danger : le chorégraphe passe aux platines pour une musique en live. Hildegaarde Laszak, diplômée de talent des Beauxarts de Toulon, réalisera en direct chaque soir ses dessins, formant un décor vivant et éphémère. Quant à la danseuse Gabriela Cecena, elle trouve une dimension particulière dans ce double dessiné, qui danse avec elle, la prolonge. La femme, dans sa quatrième dimension.