Les commerçants veulent redonner vie à la rue Seillon
Dans cette artère en travaux où, autrefois, les boutiques se succédaient, les gérants de celles qui subsistent espèrent voir l’activité reprendre. En attendant, ils font plus ou moins bonne figure
Nouveau souffle ou à bout de souffle. Pour les commerçants, juste derrière la mairie de Toulon, les courants d’airs sont tantôt chauds, tantôt froids, selon qu’ils se trouvent à un bout ou à l’autre de la rue Henri-Seillon. L’artère qui mène du cours Lafayette à la rue d’Alger, dont nombre de Toulonnais se souviennent comme d’une voie particulièrement dynamique, a, depuis plusieurs années, perdu de son lustre. Et l’effondrement de l’immeuble situé aux 3 et 3 bis, le 10 mai 2015 n’a pas arrangé les choses. Si le sinistre n’avait alors pas fait de victime, les effets s’en sont rapidement fait sentir pour les gérants des boutiques alentours. En attestent les nombreux rideaux baissés, symboles d’une vitalité révolue. Mais qui ne demande qu’à reprendre. Car depuis quelque temps et malgré les fermetures d’enseignes historiques, comme California, de nouveaux commerçants tentent de relever les rideaux. Et le défi. À l’heure où les travaux au niveau du bâtiment détruit reprennent, les professionnels se serrent les coudes et veulent rappeler qu’ils sont bien là. Ainsi, Marie-Ange et sa Petite
cantine ont, au milieu de la rue, ouvert en octobre dernier. Sans plus d’inquiétude quant à l’état de la rue : « Les gens me disent que ça fait plaisir de voir un restaurant ouvrir et, tout de suite après, me demandent si je n’ai pas peur. Non! On est bien motivé et quand on arrive à faire bon et à se faire connaître, ça fonctionne. »
«Plutôt passant»
C’est aussi ce que crois Adeline, du salon de coiffure 11e Art, installée en face du restaurant il y a quatre mois. La jeune femme et sa salariée parviennent, même « si ça pourrait être mieux, avec plus de visibilité »,à« s’en sortir ».« Finalement, c’est plutôt passant », assure-t-elle. Adeline était pourtant un peu soucieuse de s’installer dans cette rue sinistrée, mais c’est le seul local qu’elle a trouvé. Marie-Ange, elle, cherchait depuis deux ans à ouvrir son restaurant. «Les gens se croient à Paris et demande des prix fous pour leurs murs ou leurs fonds de commerce ! », regrette-t-elle.
Un axe d’est en ouest
Raphaël , du Carré des mots, lui, a pu éviter cet écueil. Il a récemment déménagé sa librairie de la place à l’Huile au tout début de la rue Seillon, rachetant à la Fondation de France un local – l’ancienne pharmacie – « au prix des Domaines ». Une opération réussie : « Bien que sinistrée, la rue Seillon est un axe pour aller d’est en ouest du centreville. Du coup, des gens nous découvrent et en même temps nous avons conservé notre clientèle fidèle. »Lelibraire n’est pas surpris : il s’attendait à cet effet. En espérant, ajoute-t-il, qu’« une fois les travaux finis dans la rue, d’autres commerces ouvriront ». Parmi ceux qui ont le plus pâti du sinistre, Staf ,du bar-PMU Le Galopin , est sûrement l’un de ceux qui ont le plus souffert. Situé en face du bâtiment écroulé, il a même dû fermer tant que courrait l’arrêté de péril. « Deux mois et dix-sept jours», compte-il. Depuis, il est ouvert tous les jours : « Avant, je fermais le lundi, mais maintenant je ne peux plus, au risque de ne pas m’en sortir. » Il assène : «Pour moi, ça prend trop de temps. Il faut que je me sorte de là, mais je n’ai rien d’autre… »
Cartes en main... ou pas !
« Il faut dire, se souvient Éric, de la librairie galerie
L’Abeille, qu’on s’est pris toute la poussière et que la rue est restée fermée un moment ». Surtout, le commerçant a le sentiment que rien n’est fait pour les aider, lui et ses collègues. «Tout est mis sur la place de L’Équerre et la rue Pierre-Sémard », regrettet-il, pointant lui aussi la cherté des locaux vides et le manque de stationnement. Ce qui ne l’empêche pas assure-t-il de «mettre toute [son] énergie, toutes [ses] forces » dans son activité. À l’instar de Simon , de la boutique de vêtement de marque, L’Adresse . Il n’y a pas un an, le jeune homme a repris l’ancien KeyWest Plus, à l’autre bout de la rue. Pourtant, s’il affirme se donner corps et âme pour ce métier qui le passionne, il est aussi désabusé. «J’y ai cru, dit-il, j’ai tout fait pour que ça marche…» Malheureusement, toutes les cartes ne sont pas dans ses mains : « Avant de refaire les petites rues, il fallait s’occuper des axes principaux pour qu’il y ait de nouveau du passage et un vrai pôle commercial : c’est ça qu’il nous manque ! »