Lutte contre le cholestérol : pas de place pour le doute
L’arrivée imminente sur le marché français de nouveaux médicaments contre le cholestérol repose la question : qui faut-il traiter ?
La controverse médiatique remettant en cause le LDL (« mauvais cholestérol») comme facteur de risque cardiovasculaire et la fronde antistatines (utilisées pour baisser la cholestérolémie) ont-elles ébranlé les convictions des cardiologues ? La question a fait l’objet d’une enquête récente coordonnée par le Collège national des cardiologues français présidé par le Cannois Jacques Gauthier. « La dénonciation d’un prétendu “complot” ou “grand mensonge du cholestérol” a introduit le doute chez les patients et fragilisé la parole médicale; 15 % des personnes sous statines ont arrêté leur traitement». Au grand dam des cardiologues qui, selon les résultats de l’enquête – présentés récemment lors des Journées européennes de cardiologie –, resteraient pour la majorité d’entre eux convaincus qu’il faut combattre le cholestérol pour protéger sa santé cardiovasculaire. «Ils conservent leur confiance dans les statines même s’ils s’interrogent sur les effets secondaires de ces traitements. » À juste titre ? Oui et non. « Des études internationales ont conclu à l’absence de corrélation entre statines et maladie d’Alzheimer. En revanche, les statines majoreraient légèrement le risque d’apparition de diabète. La balance bénéfice-risque reste toutefois largement en faveur des statines. »
Indications strictes
Fin de la saga ? Pas tout à fait. Car, si traiter les personnes qui ont été victimes d’un infarctus ne fait plus débat, il reste à statuer sur ce que l’on nomme la prévention primaire : fautil traiter des personnes qui ne sont pas malades, mais présentent un taux élevé de mauvais cholestérol (LDL)? « Si d’autres membres de la famille, un père, une soeur… ont été victimes d’infarctus, que les facteurs de risque sont importants, oui, il faut prendre des médicaments pour faire baisser le cholestérol, répond le Dr Gauthier. Sinon, mieux vaut privilégier des actions comme l’activité physique ou une modification des comportements alimentaires.» Avec comme objectif de faire diminuer le LDL jusqu’à la valeur cible de 0,7 g/l. «Aux États-Unis, les sociétés savantes fixent plutôt comme objectif une réduction de moitié du taux initial. » Avec l’arrivée imminente de nouveaux médicaments (des anticorps monoclonaux spécifiques en injection sous-cutanée, comme l’insuline) ce débat sur les valeurs cibles devrait, lui aussi, devenir bientôt caduque. «Ces molécules innovantes sont très efficaces; elles permettent, lorsqu’elles sont associées aux statines, d’atteindre des valeurs très basses, de l’ordre de 0,2 g/l. » Déjà sur le marché dans un grand nombre de pays (Italie, Espagne, Suisse, États-Unis…), elles seront disponibles dans les prochaines semaines dans tous les hôpitaux français. «Dans un premier temps au moins, elles seront réservées au traitement de l’hypercholestérolémie familiale au pronostic très sévère.» Plus tard peut-être, et à l’instar de ce qui se passe déjà dans d’autres pays, ces médicaments pourront être prescrits aux patients qui conservent des taux élevés de cholestérol sous statines. Et qui vivent avec une épée de Damoclès sur la tête. Faut-il, en effet, le rappeler : la principale cause de l’infarctus est l’athérosclérose qui débute par la formation de plaques d’athérome, constituées de cholestérol, de fibres et de débris cellulaires, sur la paroi des artères. Les polémiques nous feraient presque oublier cette réalité.