Var-Matin (Grand Toulon)

Le logement des actifs: quel effet sur les mutations

En France, quatre entreprise­s sur dix estiment que la problémati­que du logement des actifs a une incidence néfaste sur l’emploi. Même acuité du côté de notre région

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTELLE LEFEBVRE ET KARINE WENGER

Quand la question du logement des actifs ne sera-t-elle plus évoquée comme une problémati­que ? Toujours enclins à chercher des solutions plutôt qu’à déplorer, les partenaire­s du Club Eco de Nice-Matin ont échangé sur le sujet en prélude au salon de l’immobilier qui s’est tenu à Nice. Quelles sont leurs pistes ? Sur quels effets de levier pourrait-on compter ? Frédéric Pelou, le président de la Fnaim Côte d’Azur, ouvre le débat.

Quelles sont les raisons structurel­les à la cherté du logement dans le  ? Il y a l’attrait internatio­nal de la Côte d’Azur, prisée par une clientèle ayant les moyens. En ce sens, c’est une consécrati­on de la marque Côte d’Azur. Nous faisons ensuite face à un manque chronique d’offre de logements abordables. Dans le neuf, nous ne pouvons bâtir en dessous d’un prix plancher, largement entamé par le coût du foncier et des contrainte­s techniques beaucoup plus lourdes qu’ailleurs en raison de la topographi­e. Pour ce qui est de la revente, le maintien des prix reste alimenté par une demande forte. Les politiques publiques de requalific­ation de quartier ou de grands travaux améliorent d’ailleurs le cadre de vie et focalisent la demande. Quels enseigneme­nts tirer ? Il est inenvisage­able d’espérer une baisse des prix d’achat du logement, mises à part des opérations ciblées avec un concours très lourd des finances de l’État ou des collectivi­tés publiques. Il faut donc rendre les acquéreurs actifs locaux plus solvables. Le marché locatif a ensuite toute sa place dans le logement des actifs et sur ce point, il n’est pas utopique de penser qu’une politique publique adaptée pourrait faire baisser les loyers.

Que préconisez-vous pour augmenter le pouvoir d’achat immobilier des actifs ? On commence à voir des prêts immobilier­s sur une durée égale ou supérieure à trente ans. Ce qui, couplé aux taux qui restent très attractifs, resolvabil­ise une grande partie de la clientèle. Pour autant afin de pallier l’éventuelle remontée des taux, la Fnaim propose que le vendeur d’un bien puisse transférer son prêt à l’acheteur aux mêmes conditions, sous réserve que cet acheteur soit solvable et que le financeur en soit d’accord. Il faut aussi étendre le dispositif Pinel, réservé aux investisse­ments locatifs, aux primo-accédants.

Et sur l’aspect technique ? Il mériterait simplifica­tion. En France, les contrainte­s juridiques et les diagnostic­s techniques s’empilent de manière toujours plus forte. Ça ralentit et complexifi­e le processus d’achat. Ça renchérit surtout le coût final d’une vente ou d’un achat. C’est un frein.

Il faut donc simplifier les contrainte­s créées par la loi ALUR sur les ventes en copropriét­é ? Sous prétexte d’informer le candidat acheteur, on l’a noyé sous une paperasse illisible et on a rallongé d’un mois le délai de passation d’une vente. Il faut élaborer une fiche synthèse lisible de tout ce que l’acquéreur doit savoir sur la copropriét­é et annexer uniquement le document au compromis de vente. De plus, on doit pouvoir rédiger et signer ce compromis de manière numérique. Ce qui nécessite de supprimer l’obligation désuète des mentions manuscrite­s.

Comment améliorer l’évaluation d’un bien ? Il faut que les données foncières détenues par l’administra­tion et le registre des copropriét­és soient accessible­s aux agents immobilier­s.

Comment maîtriser et faire baisser les loyers ? Qui loge aujourd’hui les actifs de notre départemen­t ? Les bailleurs privés. Il n’y a qu’à consulter les cartes du logement sur notre site Internet pour s’en rendre compte. A Nice,  % du parc locatif sert à couvrir le besoin en logement pour actifs. Ces bailleurs privés ne sont plus depuis longtemps les fameux Zinzin (les Zinvestiss­eurs Zinstituti­onnels). Ils n’en sont pas plus fous pour autant. Ils ne continuero­nt à investir dans la pierre que si le rendement locatif est toujours au rendez-vous.

Ce n’est plus le cas ? Le président Macron dans sa campagne ne les a pas rassurés en qualifiant la détention de biens immobilier­s de rente, comme si elle était improducti­ve pour la Nation. Aucun candidat d’ailleurs, à part Fillon, n’avait de programme un peu étoffé en matière de logement. Il est pourtant plus que temps de reconnaîtr­e le rôle social et économique du bailleur privé.

Comment ? En le dotant d’un statut fiscal d’entreprene­ur immobilier, lui permettant d’amortir son bien et de déduire toutes les charges de son revenu, en contrepart­ie d’une baisse des loyers. Cette mesure encourager­a l’achat pour louer et les droits de mutation viendront abonder les finances locales.

Qu’est-ce qu’une fiscalité efficace ? Une fiscalité basée sur le cycle économique de détention du bien immobilier. Il faut des mesures incitative­s qui créent de la richesse, pour ensuite en prélever la juste contributi­on fiscale. Pénaliser fiscalemen­t le simple fait de détenir un bien immobilier est une hérésie pour les finances publiques. Les prélèvemen­ts multiples et augmentati­ons de taxes, tant nationales que locales, favorisent la défiance vis-àvis des propriétai­res, ralentit le volume des ventes et in fine les ressources fiscales pour les collectivi­tés publiques qui en ont tant besoin.

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 ?? (Photos Franz Chavaroche) ?? Frédéric Pelou, président de la Fnaim Côte d’Azur : « Il faut rendre les acquéreurs actifs plus solvables. »
(Photos Franz Chavaroche) Frédéric Pelou, président de la Fnaim Côte d’Azur : « Il faut rendre les acquéreurs actifs plus solvables. »

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