Var-Matin (Grand Toulon)

Gréoux-les-Bains, une cité thermale depuis l’Antiquité

- ANTHONY SALOMONE

Les Romains, grands amateurs de bains chauds, savaient repérer les sources adéquates pour leur bien-être. En connaisseu­rs, ils se sont installés à Gréoux-les-Bains, commune traversée par le Verdon dans les Alpes-de-Haute-Provence. Au Ier siècle avant J.-C., ils y ont découvert des sources thermales qui sont devenues célèbres dans tout l’Empire.Cette notoriété est bien plus ancienne et date du Néolithiqu­e. Le nom de Gréoux est dérivé de «Gresumlin» qui provient du celtique « Gresum», signifiant maladie, et de « Lin » qui veut dire eau. L’« eau pour les maladies » est rebaptisée par les Romains « Nymphis Griselius» pour honorer les nymphes, divinités qui personnifi­aient les forces vives de la nature. Ils bâtissent les premiers thermes troglodyte­s dans les grottes souterrain­es de Gréoux-les-Bains, d’où sortent des eaux à 42°C d’une compositio­n complexe. Annia Fundania Faustina, épouse du consul Vitrasius Pollio et cousine de l’empereur Marc Aurèle (121-180), y est venue pour raisons médicales. Elle y a laissé une stèle en hommage aux nymphes. Avec la fin de l’Empire Romain, les traces de thermalism­e à Gréoux disparaiss­ent. Il faut attendre le Moyen-Âge pour retrouver une utilisatio­n probable des sources chaudes. Les chevaliers revenus des guerres en Terre Sainte auraient profité des eaux curatives des anciens thermes afin de se soigner et de se reposer. Si la commune est connue pour ses thermes, le château dit des Templiers, datant du XIIIe siècle, est le premier monument observable par les visiteurs. Jonché sur sa motte castrale, l’immense bâtiment carré, flanqué de tours avec donjon, est le symbole d’un passé seigneuria­l prestigieu­x. Comme bon nombre de sites provençaux, la présence templière n’est pas attestée.

« L’oasis romantique du Verdon »

En revanche, les moines soldats de l’ordre des Hospitalie­rs de Jérusalem y ont habité pour en exploiter les richesses. Leur première fonction étant de soigner et de protéger les pèlerins et les croisés revenus de Palestine, une légende veut qu’ils aient utilisé les eaux de Gréoux pour accomplir leur médecine. Au XIVe siècle, les comtes de Provence leur ont transmis le château afin de soutenir l’effort des croisades au Moyen-Orient. Cette transmissi­on est-elle vraiment liée à la présence des anciens thermes ? Aucune source ne le confirme. Au départ des Hospitalie­rs, le château perd de son prestige et tombe en ruine jusqu’en 1840, date à laquelle il est classé monument historique après l’acquisitio­n par le notaire et juge de paix Arnoux Guibert. En raison des invasions et des bouleverse­ments politiques qui ont traversé la région, les thermes ont longtemps été oubliés. Ils retrouvent leur splendeur au siècle des Lumières avec la venue de personnage­s illustres comme Pauline Bonaparte (1780-1825), soeur de Napoléon Ier, mariée au prince romain Camille Borghèse. L’une des plus belles femmes de son temps, surnommée « la petite païenne » par son frère, passe beaucoup de temps à profiter des eaux bienfaisan­tes, en complément de ses bains réguliers au lait d’ânesse. Le site thermal redevient à la mode et des auteurs célèbres comme Stendhal (1783-1842) ou Frédéric Mistral (1830-1914) ont également séjourné à Gréoux-les-Bains. Le village était surnommé « l’oasis romantique du Verdon » par l’écrivain Jean Giono (1895-1970) qui y venait soigner sa goutte. Dans les années 60, les thermes ont été reconstrui­ts dans un style antique sur le site d’origine. La troisième station thermale de France soigne notamment les rhumatisme­s, les affections des voies respiratoi­res et rentre dans le traitement post-cancer du sein. Chaque jour, près de 3 500 curistes fréquenten­t ce lieu réputé, situé à un peu plus de deux heures de Nice et environ 1 h 30 de Toulon.

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(Photos DR) La place de l’Hôtel-de-Ville, avec sa fontaine et le château des Templiers en arrière-plan, au début du XXe siècle. L’établissem­ent thermal au début du XXe siècle, avant sa reconstruc­tion dans les années . L’imposant château des Templiers sur sa...
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