La guérison grâce à la force vitale de l’être humain
Marcher pieds nus sur des braises, guérir du cancer… Le médecin psychiatre revestois Patrick Clervoy, professeur agrégé du Val-de-Grâce, engagé sur plusieurs théâtres d’opérations militaires importants, vient de sortir son nouvel ouvrage à travers une multitude de petites histoires. Un plaidoyer pour une médecine plus ouverte qui prenne en compte la dimension inexplorée de la guérison: la force vitale de l’être humain.
Toutes ces histoires sont fascinantes. Des preuves à l’appui? Évidemment. En , le chirurgien britannique Coley inocule le streptocoque à un patient pour provoquer une infection aiguë de la peau, il stimule une réaction immunitaire qui peut obtenir une guérison totale d’un cancer jugé incurable et ce, sur cas avec un temps de survie de ans. En , les scientifiques ont comparé les avancées médicales avec cas. Les patients ont une survie de ans. Cela démontre que dans notre corps, si on provoque des crises aiguës, on peut provoquer la guérison de maladies chroniques.
Est-ce un cas particulier ? Pas du tout. En , Wagner Van Jauregg a eu le prix Nobel pour avoir inventé un traitement qui permet d’obtenir la guérison de la syphilis, maladie incurable à l’époque (avant les antibiotiques de ), en inoculant le parasite cellulaire du paludisme (la malaria) : j’inocule la malaria pour te guérir de la syphilis. Tous ses exemples que je raconte sont des traitements appelés autrefois « les substitutions morbides ». Aujourd’hui, on traite le cancer de la vessie en injectant le BCG dans la tumeur.
Vous parlez de chocs émotionnels qui agissent sur le corps. C’est-à-dire ? Le Mourillonnais Michel Sardo travaillait dans la grande fonderie Sud Acier à La Garde. Il était vêtu de sa tenue ignifugée devant le grand fourneau et le métal en fusion. Il chute dans la fosse deux mètres plus bas et disparaît mais une croûte de métal solide le retient. Il réussit à bondir et à s’accrocher sur le bord de la corniche. Des ouvriers réussissent à le faire ressortir. Ils lui ôtent sa cagoule d’amiante : il devient tout jaune. Il venait de faire une hépatite fulgurante.
Illustrez-nous l’image mentale du corps ? C’est l’expérience de la main en caoutchouc : un participant assis à une table, le bras gauche posé et dissimulé par une plaque, un écran visuel. Une main en caoutchouc, de dimension similaire est placée devant les participants. Le chercheur caresse le vrai et le faux bras de façon synchrone avec des pinceaux. Après quelques minutes, le chercheur donne un coup de marteau sur la fausse main, le patient hurle de douleur. Ce livre est un voyage à travers tous les processus mentaux par lesquels, soit on provoque des maladies qui n’existent pas et qui deviennent réelles (Le Malade imaginaire de Molière) soit on obtient la guérison de maladies qui paraissent inguérissables selon les données de la science et de la médecine d’aujourd’hui.
Il existe donc d’autres médecines? C’est ce qui explique l’efficacité de certaines médecines alternatives et leurs succès. L’exemple de l’effet placebo : c’est tout ce que le corps met en oeuvre spontanément pour produire une guérison. La science médicale peut considérer l’effet placebo comme une manifestation parasite des soins. On peut renverser ce jugement et plutôt chercher à stimuler l’effet placebo. Il y a en nous des ressources inépuisables de guérison. Le soin consiste à savoir les libérer lorsque la maladie les a bloquées
Les pouvoirs de l’esprit sur le corps, 352 pages, éditions Odile Jacob, 21,90 euros.