Baptistin Colonna : « Tout le monde était solidaire »
Entré à 15 ans en apprentissage aux chantiers navals (1) de La Seyne, Baptistin Colonna y a gravi les échelons à la force du poignet. En mai 68, ce fils d’un berger et d’une poissonnière occupe un poste de technicien au bureau d’études, après deux CAP (traceur de coques, dessinateur industriel) et un brevet professionnel. Il est aussi adhérent du syndicat CGT ETDA (employés, techniciens, dessinateurs, agents de maîtrise), représentant des salariés au conseil d’administration, et membre du Parti communiste français. « Entre le 10 et le 20 mai, je ne sais pas exactement, on a commencé à occuper les chantiers. Les portes étaient fermées, personne ne pouvait entrer, se souvient ce retraité de bientôt 83 ans, demeurant à La Farlède. Pendant presque un mois, on a revendiqué sur les salaires, le temps de travail, les conditions de travail, notamment la sécurité ».
« On ne peut pas décrire l’atmosphère »
Les leaders du mouvement mettent en place l’aide financière. «On éditait des bons de 5 francs, qui n’étaient valables qu’avec la signature des deux délégués CGT et CDFT. On les distribuait en fonction de la situation sociale. On passait chez les commerçants leur expliquer qu’ils devaient les accepter. On avait une caisse qui payait et deux copains dédiés aux finances. Les commerçants nous soutenaient, ils avaient intérêt à ce que les chantiers restent. » Nostalgique, il remarque : « On ne peut pas décrire l’atmosphère, l’intensité, la dimension de Mai 68. Tout le monde était solidaire, les femmes ont été très actives. Aujourd’hui, les gens bénéficient de tout ce que ceux, qui se sont battus, ont obtenu ». (1) La Société nouvelle des forges et chantiers de la Méditerranée s’est appelée, après 1966, les Constructions navales industrielles de la Méditerranée.