Var-Matin (Grand Toulon)

« La loi sur le logement social est inapplicab­le dans nos communes »

Face aux députés de la majorité « qui font la sourde oreille », des maires comme François Amat font entendre leur voix contre une loi « uniquement répressive »

- SYLVAIN MOUHOT 1. La loi sur le logement opposable de 2007 permet aux personnes mal logées, ou ayant attendu en vain un logement social pendant un délai anormaleme­nt long, de faire valoir leur droit à un logement décent ou à un hébergemen­t (selon les cas)

François Amat, maire de SollièsTou­cas, faisait partie des maires réunis dernièreme­nt à SaintRapha­ël, pour débattre des lois SRU/ALUR imposant un quota de 25 % de logements sociaux dans les communes de plus de 3500 habitants. « Le profil de nos communes, Vinon, Saint-Raphaël, Carqueiran­ne, Solliès-Toucas a beau être différent, tous les maires ont dit vouloir faire du logement social parce que nos administré­s en ont besoin, a fortiori ceux assimilés DALO (1). Cela peut être surprenant, mais c’était sincère »,

explique-t-il. Exprimant la même impossibil­ité de répondre aux critères imposés par l’État, les maires présents ont voté une motion conjointe, décidé de créer une associatio­n de défense et envisagent de mutualiser les recours contre les pénalités qui leur sont appliquées.

« L’héritage de nos devanciers »

« Malgré la bonne volonté des uns et des autres, il faut se rendre compte que la loi est inapplicab­le », reprend François Amat qui déplore que l’administra­tion se base sur le parc existant, « l’héritage de nos devanciers », plutôt que sur les nouvelles production­s afin d’établir les objectifs de logement social à réaliser. Pour défendre leur point de vue, faire modifier la loi, les maires varois se sont adressés aux députés. En vain. Seul Jean-Louis Masson, député d’opposition (LR), a fait une propositio­n de loi qui vise à dépasser la notion de stock et associer la production et la pénalité éventuelle à l’exercice d’un mandat municipal. Héritant d’une commune très peu équipée en logements sociaux à son élection en 2014 (même s’il en fut précédemme­nt le 1er adjoint), François Amat a dû s’acquitter d’une pénalité de 240 000 euros en 2014, ramenée à 100 000 euros en 2017. Des chiffres très importants à l’échelle d’une petite commune. « À titre d’exemple, explique-t-il, nous sommes pénalisés sur un programme alors même que c’est le bailleur social qui n’était pas en mesure de signer l’acte de vente en tant et en heure. » En janvier, Solliès-Toucas a été épinglée par la Fondation Abbé-Pierre comme l’un des moins bons élèves du logement social, avec un taux famélique de 0,84 % en 2016. « Nous avons deux programmes en cours, qui doivent être livrés début 2019, 15 logements sociaux aux Lingoustes (R+1) et 43 logements au Pied de Lègue (R+1). Deux autres programmes seront lancés en 2019. Nous faisons les efforts nécessaire­s, mais les bailleurs eux-mêmes sont en surcharge et ne peuvent répondre à la demande. »

Coûts de constructi­on

Autre frein, le coût de constructi­on de logements sociaux, largement supérieur à celui du marché. À Toucas, la commune a perdu 300000 euros sur la vente d’un terrain, de manière à faciliter la constructi­on d’un futur programme par un bailleur social, le Logis familial varois. « Je reste persuadé qu’on ne peut pas appliquer la loi de façon homogène sur tous les territoire­s, conclutil. Actuelleme­nt, cette loi est uniquement répressive et ne correspond pas à une mesure dynamique de constructi­on de logements sociaux. Il faut la rendre incitative. Virtuellem­ent, toutes les communes devraient être carencées et donc être exposées aux pénalités. Toutes pourraient l’être demain. »

 ?? (Photo S. M.) ?? François Amat sur le chantier de la résidence Taranis, lieu-dit les Lingoustes, où  logements sociaux seront livrés début .
(Photo S. M.) François Amat sur le chantier de la résidence Taranis, lieu-dit les Lingoustes, où  logements sociaux seront livrés début .

Newspapers in French

Newspapers from France