Agriculture et alimentation en débat à l’Assemblée
Mieux rémunérer les agriculteurs et alimenter plus sainement les Français: le projet de loi sur l’agriculture, censé notamment interrompre la guerre des prix, va animer à partir de demain les débats à l’Assemblée. « Nous allons inverser la construction du prix en partant du coût de revient des agriculteurs. C’est une révolution», assure le ministre Stéphane Travert dans Le Journal du dimanche. Signe de la mobilisation des élus et des lobbies, l’afflux d’amendements (quasiment 2 500) est tel que la durée globale des discussions, jusqu’au mardi suivant, sera limitée à 30 heures entre les sept groupes politiques.
Vote d’ici à septembre
Premier volet de la réforme du secteur agroalimentaire promise par l’exécutif, ce texte de 18 articles est né dans le sillage des « États généraux de l’alimentation ». Il doit être voté définitivement au plus tard en septembre, et être effectif pour les négociations commerciales 20182019. Trois leviers sont utilisés : inversion de la construction du prix payé aux agriculteurs, jusqu’à présent déterminé par les distributeurs; encadrement des promotions parallèlement au relèvement du seuil de revente à perte; regroupement des producteurs. Un rééquilibrage qui, selon l’exécutif, n’aboutira pas à une forte hausse des prix pour le consommateur : «Ce que j’entends, c’est que “les prix vont gonfler” ,que “l’inflation va être énorme” ,etça, ce n’est pas vrai», a assuré le ministre hier sur France Inter. Il a néanmoins estimé que le consommateur était «prêt à payer quelques centimes de plus » pour se nourrir, «dès lors qu’il sait que le produit qu’il va acheter va mieux rémunérer les agriculteurs ». Pointant, à l’unisson d’autres groupes, «un décalage entre les attentes considérables exprimées» aux États généraux de l’alimentation et le projet de loi, les socialistes, qui comptent dans leurs rangs l’ex-ministre Stéphane Le Foll, souhaitent « l’enrichir autant que possible ». «Il va falloir le muscler [...] le rendre moins libéral», selon Sébastien Jumel (PCF). Outre une « souris législative », François Ruffin (LFI) a épinglé en commission «une contradiction flagrante entre la volonté de réguler un peu ce secteur et le fait de négocier des accords comme le Ceta » (UE-Canada) ou avec le Mercosur.
Promouvoir le bio dans les cantines
En commission, les députés ont prévu la publication obligatoire des sanctions pour pratiques commerciales déloyales ou des sanctions accrues des groupes agro-alimentaires ne publiant pas leurs comptes annuels. De «la fourche à la fourchette», le projet veut aussi promouvoir une alimentation plus saine et durable et un respect du bien-être animal, mais certains, comme LR, s’inquiètent de «nouvelles charges » pour les agriculteurs. Un volet partiellement renforcé en commission, par exemple pour que les repas dans la restauration collective publique comprennent, au plus tard en 2022, au moins 50 % de produits bio ou intégrant la préservation environnementale. En revanche, les députés ont repoussé pour l’heure l’interdiction de la vente d’oeufs provenant d’élevages en cage et l’élevage de lapins en cage.