Gautier Capuçon ouvre la saison de l’opéra
Le violoncelliste vedette ouvre, samedi, la saison de l’Opéra avec le concert «Virtuose ». De la méditation, à ses débuts, avec des parents non musiciens, il se confie
De la vie, le violoncelliste Gautier Capuçon semble ne conserver que les moments romantiques. Un peu facile, direz-vous, avec un destin hors du commun, une Victoire de la musique à 20 ans, dans la lignée d’un frère, Renaud, tout aussi célèbre au violon. Non, plutôt la philosophie d’un homme simple qui donne envie de vivre plus en musique. « Virtuose», le nom du concert de rentrée de l’Opéra de Toulon auquel il participe samedi, n’est pas usurpé pour cet artiste, parmi les plus talentueux de son époque.
Il est h du matin, vous êtes l’artiste le plus matinal que j’aie interviewé en trois ans. Quels sont vos moments forts de la journée ? C’est vrai ? C’est déjà le milieu de la matinée pour moi (rires) ! J’ai emmené les enfants à l’école, pris les petits-déjeuners. Non, mais quand on a des enfants, les réveils sont tôt. Et on est bien plus efficace le matin. Quand je suis à la maison, mon rôle de père de famille est la priorité, car je ne vois pas mes filles quand je suis en voyage. Je trouve ça superimportant de passer ces moments ensemble, comme le soir. La journée s’organise autour de ce qu’il y a à faire à la maison, puis les rendez-vous, le travail, le violoncelle…
Vous dites qu’Intuition, votre dernier album a été construit comme un tableau sur lequel vous avez épinglé des périodes de votre vie. Donnez-nous deux flashs. Il y a plusieurs périodes, celle de l’enfance, - elle fait un peu fleur bleue, mais c’est comme ça que ça s’est passé. Nous sommes Savoyards et quand j’ai commencé le violoncelle à quatre ans et demi, j’ai vraiment de cette période-là deux souvenirs très marquants, hormis avec mes parents. J’ai un souvenir avec mon professeur Augustin Lefèvre qui m’a débuté au violoncelle ; un type extraordinaire, un pédagogue génial et un vrai passionné de la musique. On est toujours en contact. Une phrase qu’il disait tout le temps : « la musique, il faut que ça swingue ». J’ai compris ce qu’il voulait dire. La musique, elle est vivante. La musique, on la vit, on la partage. Un deuxième flash : là je pense à Saint-Saëns, à La Méditation de Thaïs. Ce sont les moments passés au ski en hiver, avec mes grands-parents et c’est vrai que ma grand-mère, elle adorait la musique. Elle n’y connaissait rien du tout, mais elle aimait ça et tout particulièrement La Méditation de Thaïs. C’étaient des moments forts en rentrant du ski, avec le feu de cheminée. On pense à votre clip spectaculaire au sommet d’une montagne. Ces lieux sont pour vous étroitement liés à la musique ? Eh bien oui, complètement. J’ai découvert, comme mes parents, la musique au festival des Arcs, la station de ski au-dessus de BourgSaint-Maurice. Déjà en temps que Savoyard, c’est mon enfance, c’est «ma terre», là où j’ai senti les premières odeurs de forêt, de la montagne. Je me reconnais en Savoie. Le clip, c’était une chose que je voulais faire pour moi, à propos d’une rencontre avec Maurice Baquet qui n’a pas pu se passer. Il m’avait contacté, avait voulu me rencontrer. J’étais tellement touché, impressionné, j’ai mis un peu de temps à le rappeler et le temps que je le rappelle, il n’était plus vraiment là. Depuis tout petit, je m’étais dit que moi aussi, j’irai faire des photos sur un glacier. Et voilà, ça s’est enchaîné avec un copain pilote d’hélico, un copain réalisateur. Cela a failli ne pas se faire, car cela coûte cher de faire un clip. On a eu plusieurs déconvenues, mais finalement, on a réussi. C’est un clip qui invite à la méditation, que vous pratiquez d’ailleurs. Qu’est-ce que cela apporte ? La méditation, j’ai découvert ça au fil des années. Je me suis aperçu en fait que, tout d’abord, c’était en lien étroit avec la musique, l’inspiration. La musique est une forme de méditation, une manière de se retrouver, avec ce qu’on a à l’intérieur, ce qu’on a envie de donner, même si bien sûr, on la partage. J’ai découvert la méditation sans musique et c’est quelque chose qui, parfois avant les concerts, me ressource, m’aide à me recentrer, canaliser aussi une forme d’énergie. C’est quelque chose qui m’apporte beaucoup et que je souhaite découvrir plus. Je pense qu’on a tous beaucoup de choses à vivre avec ça, et on le vit tous les jours d’ailleurs parfois, même sans le savoir.
Dans un tout autre registre, vous avez participé à l’hommage rendu à Johnny Hallyday. Est-ce que c’est une musique que vous écoutez ? Ce qui est certain, c’est que Johnny Hallyday était un immense artiste. Je regrette une chose, c’est de ne pas l’avoir vu en concert. Je trouvais qu’il avait une voix hyperprenante, un timbre très particulier, qui était vraiment son timbre à lui. Et je trouve d’ailleurs que sa voix des dernières années était encore plus intense. Je trouve qu’il y a malheureusement encore trop de frontières entre les styles de musique différents. Et notamment quand on est musicien classique, on est a priori juste musicien classique. Moi, je ne suis pas d’accord avec ça, je trouve que la musique, c’est une forme de langage. J’aimerais parfois qu’il y ait plus de passerelles. Je suis ouvert, dans les futures années de ma vie de musicien, à créer des passerelles entre différentes formes artistiques.
La musique, on la vit, on la partage ”
Vous avez joué à Toulon... Oui, cela doit faire quatre ou cinq ans. J’en ai un très, très bon souvenir. C’est pour cela que je me réjouis de revoir les musiciens.
Quels sont vos projets ? Je pars en Australie, lundi, pour une tournée assez longue. Je reviens fin octobre pour une grande tournée européenne. Et puis, un prochain album sortira au mois de janvier ou février autour de Robert Schumann. On est dans le grand romantisme.