Les cloches se sont tues
À l’église Notre-Dame-du-Bon-Voyage, dans le centre-ville, le clocher est muet depuis le 31 octobre dernier. Ce jour-là, la foudre s’abattait sur l’édifice…
Le 11 novembre 1918, comme partout dans le pays, les quatre cloches de l’église Notre-Dame-duBon-Voyage avaient sonné à tout rompre. L’Armistice venait de mettre un terme à la Grande Guerre et La Seyne était en fête. Cent ans plus tard, pour l’anniversaire de la fin des combats, le clocher du centre-ville est resté complètement silencieux. Muet comme une tombe. Comme celles des 382 morts seynois pour la France ?
La sono et l’éclairage ont aussi souffert
D’aucuns auraient peut-être apprécié le symbole. Pourtant, ce n’est pas aux commémorations, pas plus qu’au passage des anges, que l’on imagine forcément nombreux dans les parages, que l’on doit ce singulier silence, mais bien aux caprices du ciel. Et en l’occurrence au violent orage qui s’est abattu sur la rade le 31 octobre dernier, aux environs de midi. « J’étais dans la chapelle attenante à l’église quand la foudre a frappé le clocher, raconte le père Martino, curé de la paroisse. Le bruit fut réellement impressionnant. Et puis, quelques minutes plus tard, on s’est rendu compte que la sono ne marchait plus. Pas davantage que la climatisation réversible de la chapelle ou les projecteurs.» Autre victime collatérale du tonnerre : les cloches. Le système électronique permettant d’actionner automatiquement les quatre « soeurs » de bronze a été littéralement cramé par l’éclair. Alors que celles-ci sonnaient de 8 h à 22 h tous les jours que Dieu fait, chaque quart d’heure, mais aussi avant les offices, pour l’angélus, lors des enterrements, des baptêmes ou des mariages, le père Martino confesse désormais être obligé de regarder sa montre plus souvent qu’à son tour.
« Ce silence, c’est effrayant »
Et de mémoire de Seynois, c’est du jamais vu, ni, forcément, entendu. Mireille Galliano, «dix années de catéchisme il y a 40 ans » et pourtant
pas des plus fidèles au bâtiment du XVIIe siècle, nous a confié son désarroi.
« Moi je n’habite pas loin. Ce silence, c’est effrayant. Il nous manque quelque chose, c’est sûr. C’est comme si le coeur de La Seyne s’était arrêté de battre. » Désormais, les paroissiens et la population du quartier attendent que la Ville, propriétaire du bâti, fasse le nécessaire pour rendre sa voix et son âme à un édifice de 342 ans et tous ses battants. Car alors que dans certaines communes de France, des habitants se plaignent du tintamarre ambiant, ici, il semblerait que l’on se languisse déjà des belles volées d’hier. « Rendez-vous compte, même pour la victoire de l’équipe de France de football, on avait fait sonner les cloches !», soupire l’ecclésiastique qui, tout Italien qu’il soit, n’oublie jamais de se réjouir du bonheur d’autrui. Heureusement, finalement, que la prochaine Coupe du Monde n’est que dans quatre ans…