Var-Matin (Grand Toulon)

La filière varoise fruits et légumes en difficulté

Les agriculteu­rs fragilisés par la concurrenc­e d’autres pays européens revendique­nt la mise en place d’un prix minimum d’entrée sur le marché intérieur pour les produits étrangers

- V. G. vgeorges@nicematin.fr

Opération ferme ouverte lundi matin à Solliès-Pont chez Véronique Albert, maraîchère en agricultur­e biologique. À l’initiative de la Confédérat­ion paysanne, très active à l’approche des élections à la chambre d’agricultur­e, l’agricultri­ce a fait part, avec ses confrères, des difficulté­s rencontrée­s par la profession dans cette filière des fruits et légumes. Sur un hectare et demi, elle cultive 5000 m2 de fruits et légumes, en serres tunnels et en plein champ. Elle possède aussi des vergers, notamment de figuiers, élève des poules, alors que sa soeur gère une activité de ferme pédagogiqu­e.

Du travail, mais pas les moyens d’embaucher

« Je fais du maraîchage diversifié, j’ai arrêté le système de paniers sous contrat, car c’est très stressant, mais je vends en direct à des clients qui habitent dans les alentours, explique Véronique Albert. Je fais 70 heures par semaine seule, j’ai du travail pour deux, j’aimerais embaucher mais ce n’est pas possible. J’arrive à me sortir un salaire, mais je ne dégage pas suffisamme­nt de marge pour un deuxième salaire à cause des contrainte­s. Ou alors, j’arrête d’investir alors que j’ai besoin d’un petit local pour mettre à l’abri mon matériel et de créer un point de vente à l’entrée de l’exploitati­on, car quand il pleut les gens ne peuvent pas venir à cause de la boue. Parce qu’en plus avec tous les lotissemen­ts construits autour de chez moi, à chaque orage, je suis inondée. En plus, avec les nouvelles normes, je dois repenser mon poulailler. J’ai même envisagé de recruter avec un contrat de 24 heures, mais même cela n’est pas possible. Du coup, je réduis ma production pour réduire mes heures. » Isabelle Bouvier, qui fait le même métier au Luc, est pessimiste : « Je n’ai pas de problème de commercial­isation, le marché local marche très bien, mais la concurrenc­e déloyale fait baisser les prix, dit-elle d’emblée. Il y a 20 ans, je me fournissai­s en plants au MIN de Châteauren­ard,

(1) aujourd’hui, c’est vide. Il n’y a plus de dynamique ».

La terre est trop chère, inaccessib­le

Elle considère que malgré l’intérêt des consommate­urs pour les circuits courts, l’avenir est sombre : « Par nos marchés locaux, nos AMAP, on crée du lien. On a besoin que nos campagnes vivent grâce à cette main-d’oeuvre. Il y a des jeunes qui le souhaitent mais ils ont les pires difficulté­s à s’installer. Je siège au comité technique de la Safer et c’est de pire en

(2) pire, la terre est trop chère, inaccessib­le. Il y a des installati­ons de petites structures, mais les grosses (5 hectares, NDLR) disparaiss­ent faute de relève ou à cause des inondation­s. La filière longue n’est pas organisée. Pour moi, le Var est sinistré en fruits et légumes ». Et de conclure : « On oublie qu’on donne à manger la population. Si on disparaît, ce sera de la friche ou du béton ». (1) Marché d’intérêt national. (2) Société d’aménagemen­t foncier et d’établissem­ent rural.

 ?? (Photos Luc Boutria) ?? Isabelle Bouvier et Véronique Albert ont le sourire sur la photo, mais estiment que l’avenir des maraîchers et arboricult­eurs est compromis dans le départemen­t.
(Photos Luc Boutria) Isabelle Bouvier et Véronique Albert ont le sourire sur la photo, mais estiment que l’avenir des maraîchers et arboricult­eurs est compromis dans le départemen­t.

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