La filière varoise fruits et légumes en difficulté
Les agriculteurs fragilisés par la concurrence d’autres pays européens revendiquent la mise en place d’un prix minimum d’entrée sur le marché intérieur pour les produits étrangers
Opération ferme ouverte lundi matin à Solliès-Pont chez Véronique Albert, maraîchère en agriculture biologique. À l’initiative de la Confédération paysanne, très active à l’approche des élections à la chambre d’agriculture, l’agricultrice a fait part, avec ses confrères, des difficultés rencontrées par la profession dans cette filière des fruits et légumes. Sur un hectare et demi, elle cultive 5000 m2 de fruits et légumes, en serres tunnels et en plein champ. Elle possède aussi des vergers, notamment de figuiers, élève des poules, alors que sa soeur gère une activité de ferme pédagogique.
Du travail, mais pas les moyens d’embaucher
« Je fais du maraîchage diversifié, j’ai arrêté le système de paniers sous contrat, car c’est très stressant, mais je vends en direct à des clients qui habitent dans les alentours, explique Véronique Albert. Je fais 70 heures par semaine seule, j’ai du travail pour deux, j’aimerais embaucher mais ce n’est pas possible. J’arrive à me sortir un salaire, mais je ne dégage pas suffisamment de marge pour un deuxième salaire à cause des contraintes. Ou alors, j’arrête d’investir alors que j’ai besoin d’un petit local pour mettre à l’abri mon matériel et de créer un point de vente à l’entrée de l’exploitation, car quand il pleut les gens ne peuvent pas venir à cause de la boue. Parce qu’en plus avec tous les lotissements construits autour de chez moi, à chaque orage, je suis inondée. En plus, avec les nouvelles normes, je dois repenser mon poulailler. J’ai même envisagé de recruter avec un contrat de 24 heures, mais même cela n’est pas possible. Du coup, je réduis ma production pour réduire mes heures. » Isabelle Bouvier, qui fait le même métier au Luc, est pessimiste : « Je n’ai pas de problème de commercialisation, le marché local marche très bien, mais la concurrence déloyale fait baisser les prix, dit-elle d’emblée. Il y a 20 ans, je me fournissais en plants au MIN de Châteaurenard,
(1) aujourd’hui, c’est vide. Il n’y a plus de dynamique ».
La terre est trop chère, inaccessible
Elle considère que malgré l’intérêt des consommateurs pour les circuits courts, l’avenir est sombre : « Par nos marchés locaux, nos AMAP, on crée du lien. On a besoin que nos campagnes vivent grâce à cette main-d’oeuvre. Il y a des jeunes qui le souhaitent mais ils ont les pires difficultés à s’installer. Je siège au comité technique de la Safer et c’est de pire en
(2) pire, la terre est trop chère, inaccessible. Il y a des installations de petites structures, mais les grosses (5 hectares, NDLR) disparaissent faute de relève ou à cause des inondations. La filière longue n’est pas organisée. Pour moi, le Var est sinistré en fruits et légumes ». Et de conclure : « On oublie qu’on donne à manger la population. Si on disparaît, ce sera de la friche ou du béton ». (1) Marché d’intérêt national. (2) Société d’aménagement foncier et d’établissement rural.