Nice: quatre eurodéputés face à l’euroscepticisme
Quatre députés, de quatre bords différents, pour un exercice de pédagogie transpartisan sur l’Europe. Le Mouvement européen des Alpes-Maritimes a organisé, hier soir à Nice, son « grand oral des eurodéputés du Sud-Est ». Bruno Gollnisch (RN), Françoise Grossetête (LR), Sylvie Guillaume (PS) et Marie-Christine Vergiat (Front de gauche) ont livré leurs visions, souvent antagonistes, sur les événements majeurs qui ont jalonné la vie de l’Union ces cinq dernières années, comme sur le cap à lui donner désormais, dans un contexte de plus en plus prégnant d’euroscepticisme, voire de rejet frontal.
L’immigration, à fleur de peau
Relancés par Stéphane Leneuf, rédacteur en chef à France Inter, et titillés par une assistance pugnace, par moments virulente, les protagonistes ont joué le jeu d’un débat courtois, sans rien lâcher de leurs convictions pour autant. Ce fut le cas en particulier sur l’immigration, qui a suscité de très longs échanges à fleur de peau. Autour de Françoise Grossetête et Sylvie Guillaume, partisanes à des degrés intermédiaires d’une immigration contrôlée, Marie-Christine Vergiat et Bruno Gollnisch ont divergé dans les grandes largeurs. L’eurodéputée Front de gauche a brandi l’étendard de la générosité : «Il faut arrêter de faire peur aux gens en leur livrant des chiffres qui ne sont pas fondés et en confondant la lutte contre le terrorisme et l’immigration irrégulière. Ceux qui traversent la Méditerranée au péril de leur vie n’ont pas le choix. Je plaide pour qu’ils puissent venir dans l’Union européenne avec des visas humanitaires. Il est insupportable que des gens meurent en Méditerranée. » Bruno Gollnisch, à l’inverse, s’est employé à stigmatiser les périls: «Notre continent est menacé de submersion. L’Europe a été massivement en faveur de l’immigration. Il faut arrêter les régularisations.»
Asile : entrées en France l’an dernier
Les quatre députés se sont, au moins, accordés sur un point : la nécessité d’investir massivement en Afrique pour y fixer les populations, Bruno Gollnisch évoquant, notamment, son soutien au projet Borloo d’électrification de l’Afrique. A la question d’un gilet jaune « en civil », Sylvie Guillaume a précisé que «100000 demandes de droit d’asile ont été déposées en France l’an dernier. 25 % ont été validées en première instance et 10 % de plus en seconde instance, soit 35 000 entrées environ », avant de suggérer «la mise en oeuvre d’une agence européenne de l’asile ». Françoise Grossetête, de son côté, a insisté sur la nécessité «de renforcer les frontières de Schengen et de mettre en place une Europe de la défense pour assurer une autonomie stratégique de l’Union», tout en affirmant sa farouche hostilité à une intégration de la Turquie dans l’UE.
Défiance persistante
Aucun des protagonistes n’a en revanche défendu la position de Frexit qui est celle de l’Union populaire républicaine de François Asselineau. Pas même Bruno Gollnisch, le Rassemblement national s’inscrivant, pour l’instant, dans une logique de refonte de l’intérieur, pour transformer «le super-Etat européen qui régente la vie des Européens sous tous ses aspects en une Europe des coopérations entre Etats souverains ». Au cours ce débat nourri, aura finalement surtout transpiré une défiance manifeste de l’auditoire à l’endroit des députés européens. Mettant en cause la lisibilité de l’action de l’Europe, un spectateur a promis une abstention record fin mai… Le Mouvement européen, qui s’est assigné pour mission la promotion de l’Europe, a encore bien du pain sur la planche.