Paella « jaune » et géante à l’échangeur de Bandol
Pour montrer son soutien au mouvement des Gilets jaunes, un habitant de Six-Fours a eu l’idée d’offrir un immense repas « à ceux qui sont là pour nous tous les jours » au péage
Il lui tenait particulièrement à coeur de témoigner sa solidarité aux Gilets jaunes qui, depuis presque trois semaines, “tiennent” sans faiblir l’échangeur de Bandol, toutes barrières ouvertes. « Moi, je ne peux pas être là tous les jours, je travaille. Mais eux, ils sont là pour nous, explique Pierrot, figure bien connue des Embiez, où il gère le Bar de la place. Alors j’ai décidé de leur préparer une paella géante. » Vers 11 h hier matin, sur place, avec des amis venus l’aider à concrétiser cette “bonne” idée, en partie aidé financièrement par quelques commerçants du Brusc et une célèbre enseigne de grossiste alimentaire, il a donc remonté d’un cran, s’il en était besoin, le moral des troupes.
«On est franchement émus»
« On n’a absolument pas l’intention de lâcher quoi que ce soit, surtout après les dernières annonces du gouvernement qui ne sont que de la poudre aux yeux, tranchait Chantal, porte-parole sur le barrage filtrant, qui, comme beaucoup d’autres ici, est à la retraite... et a donc « tout [son] temps ». «Mais on est franchement émus de voir des initiatives comme celle-ci. L’autre jour, un pizzaïolo est carrément venu avec son camion. Et puis, écoutez tous ces gens qui klaxonnent et qui nous encouragent en passant le péage ! C’est la preuve que les Français sont solidaires, même s’ils ne peuvent pas être présents. D’ailleurs, le week-end, il y a foule ici ! C’est formidable. Rien ne sera plus jamais comme avant après ça ! » Pendant que le plat du jour mijote tranquillement à mesure que l’on mélange aux 40 kg de poulet de nombreux poivrons, des grosses boîtes de petits pois, un mètre ou deux de chorizo, un grand sac de riz, des sachets entiers de safran, une vingtaine de kilos de moules, etc., on devise ici et là, par petits groupes. Il y a celles et ceux qui rêvent de «la fin des privilèges et du retour de l’ISF », d’autres qui demandent « purement et simplement la démission de Macron » ou attendent « quelque chose de plus consistant sur la table des négociations »... Et Phiphi, qui se présente: « Moins de 1 200 euros de retraite par mois après 40 ans dans le BTP, avec un enfant handicapé à charge. Présent depuis le premier jour. Moi ce que je veux, c’est pouvoir vivre décemment. »
Ambiance village... d’irréductibles
Thierry, chômeur victime de la « casse du service public » se moque bien, lui, de savoir «qui à part Macron ? » : « Le prochain en tout cas saura que le peuple, qui avale des couleuvres depuis si longtemps, est désormais capable de se soulever. S’il faut, on passera les fêtes ici. Après tout, quel plus beau cadeau de Noël offrir à nos enfants que l’assurance d’un avenir un peu meilleur ? » Vers 13 h, Chantal a sonné le rassemblement. Autour de la gigantesque poêle fumante et sous le soleil printanier de ce drôle de mois de décembre, l’endroit avait, plus encore, des allures de village d’irréductibles. En plus, de l’avis général, la paella était succulente. « On reviendra » ,a lancé un Gilet jaune pour plaisanter… à peine.