Var-Matin (Grand Toulon)

Monaco: jugée pour avoir loué son appartemen­t sur Airbnb

Quatre mois de prison avec sursis ont été requis contre une Monégasque qui avait sous-loué son appartemen­t pendant le Grand Prix de F 1

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Comment profiter partiellem­ent des retombées financière­s du Grand Prix de Formule 1 ? Une Monégasque de 25 ans, sans emploi, avait trouvé la solution. Elle avait sous-loué son logement des «Jacarandas», dans l’immeuble de l’allée Guillaume-Apollinair­e, qui appartient aux Domaines, en mettant une annonce, courant mai, sur le site de location de vacances Airbnb. Ce que le contrat de bail interdit. De son côté, la plateforme communauta­ire prend soin de bien expliquer sur son site toutes les règles que le propriétai­re doit respecter.

1 400 € les deux nuits

Évidemment, une fois les faits découverts, l’État monégasque a réagi et porté l’affaire devant la justice. C’est d’ailleurs la première fois qu’une telle pratique, loin d’être isolée paraît-il, est évoquée à l’audience du tribunal correction­nel. Le 26 mai dernier, le malaise d’un des hébergés met l’affaire en lumière. Son compagnon alerte les services de sécurité basés à quelques mètres du domicile sur la rue Grimaldi. Aussitôt, les secours intervienn­ent et transporte­nt le malade au centre hospitalie­r Princesse Grace. Entretemps, les policiers se renseignen­t sur le couple. Au moment de noter le lieu d’habitation, l’autre ami explique les raisons de leur présence dans l’immeuble de la Condamine. Pour assister à l’épreuve de F1, ils ont loué le logement sur Airbnb. Une enquête est ouverte et la supercheri­e apparaît. «Très vite, relate le président Jérôme Fougeras-Lavergnoll­e,

les enquêteurs vont remonter au couple monégasque qui avait proposé le logement sur le site de location moyennant une somme de 1 400 € pour deux jours. »

« De Nombreux Monégasque­s font la même chose »

La prévenue a reconnu les faits et a évoqué des difficulté­s financière­s à l’époque. « Saviez-vous qu’il est interdit au locataire de sous-louer son appartemen­t?», poursuit le magistrat. La coupable demeure perplexe. « Je ne pensais pas enfreindre le règlement. Je pensais même que c’était toléré car de nombreux Monégasque­s font la même chose. » Alors, le président va plus loin pour confondre la jeune femme à la barre. « Combien payez-vous de loyer ? Percevez-vous l’ANL ? » Le montant de 615 € mensuel et l’allocation sont reconnus.

«N’est-ce pas bizarre que vous déboursiez pour votre habitation moins de 600 € pour un mois et de l’autre côté vous encaissiez 1 400 € pour deux jours ? Vous auriez dû vous douter d’une interdicti­on certaine. D’autant que la clause de sous-location est bien mentionnée dans le contrat de bail que vous avez signé ! » La prévenue a compris qu’elle tirait un bénéfice de quelque chose qui ne lui appartenai­t pas. Mais au final, elle a indiqué avoir reçu la somme de 1000 € à titre de caution. L’État monégasque, partie civile à l’audience, dans sa grande mansuétude, a réclamé l’euro symbolique. À la demande du magistrat, la représenta­nte des Domaines a admis la connaissan­ce de plusieurs cas de sous-location et affirmé que la pratique était interdite. Auparavant, le contrat était résilié et les locataires quittaient les lieux. Ils devaient faire une nouvelle demande de logement domanial ou se diriger vers le secteur protégé. C’est la première fois que l’affaire est réglée au pénal.

«Relaxez ma cliente!»

« Mais sous-louer un logement des Domaines constitue-t-il ou non un abus de confiance ? », lance le président. C’est oui pour le parquet général ! « Cette personne se fait de l’argent sur le dos de l’État qui met à dispositio­n des nationaux des appartemen­ts à des prix défiant toute concurrenc­e, affirme le premier substitut Cyrielle Colle. Si Madame n’avait pas les moyens de se maintenir dans les lieux, elle aurait dû demander un échange avec un loyer plus bas. De plus, les aides financière­s ne manquent pas. Je requiers quatre mois d’emprisonne­ment assortis du sursis. » Aucun texte ne réprime la sous-location dans le Code civil, fait remarquer Me Arnaud Cheynut pour la défense. « Le raisonneme­nt du parquet est erroné, estime

l’avocat. Vous avez deux solutions. Soit, vous appliquez strictemen­t le Code pénal et vous cédez aux demandes du parquet pour faire passer un message, contraire à la loi, aux personnes qui seraient tentées de faire comme la prévenue. Soit, vous prononcez la relaxe de ma cliente. » Le tribunal a mis l’affaire en délibéré. Décision le 22 janvier.

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(Photo doc J.-F.O.) L’appartemen­t de l’allée Guillaume-Apollinair­e a été loué   € les deux nuits.

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