Médias et santé : meilleurs ennemis
Comment travaille la presse…
Ce débat a été l’occasion pour nous, journalistes, d’expliquer aux professionnels de santé comment nous travaillons, d’où viennent nos informations et comment nous choisissons de les traiter. Force est de constater qu’ils ignorent souvent nos impératifs et nos méthodes. Voici donc dans le détail quel est notre quotidien. D’abord l’information : d’où vientelle ? Il existe plusieurs canaux. Les deux principaux vecteurs sont les patients eux-mêmes et les professionnels. Nous recevons chaque jour des messages de malades, de proches ; certains souhaitent nous alerter sur un fait « anormal », d’autres veulent nous informer, ou témoigner (par exemple : comment vit-on avec telle pathologie, dans le but de sensibiliser le public). Autre source : les professionnels de santé. Ils veulent transmettre une information, mettre en garde ou diffuser des conseils de prévention. Il est également courant que l’on soit contacté directement par les institutions publiques (Haute Autorité de Santé, Agence nationale de sécurité du médicament, Ministère de la santé, etc.) ou les sociétés savantes. Deuxième étape : le tri et la vérification. Face au nombre important de sollicitations, nous ne pouvons pas tout traiter. Les sujets qui l’ont été récemment ne le seront pas une seconde fois s’il n’y a pas d’élément nouveau. Ensuite, il s’agit de vérifier la véracité des faits. Parfois les patients ont le sentiment de n’avoir pas reçu les soins idoines, d’avoir été mal accueillis, etc. Les établissements de santé sont soumis à de nombreuses procédures. La plupart du temps, elles sont respectées et il n’a pas lieu à article. D’autres fois, après vérification, la plainte est fondée et peut faire l’objet d’un article. Il nous apparaît important de préciser que parfois, malades comme professionnels, peuvent être tentés de nous manipuler soit pour régler des comptes personnels, soit pour faire parler d’eux. Même si nous en sommes conscients, il peut arriver de nous laisser piéger. Étape suivante : nous contactons toutes les parties « intéressées » par la thématique. S’il s’agit d’évoquer une pathologie, nous interrogeons un spécialiste reconnu. La région PACA compte beaucoup de structures de recherches et d’établissements de référence. Éventuellement, nous mettons en lumière le parcours d’un malade, cela aide ceux qui sont dans la même situation à prendre conscience qu’ils ne sont pas seuls. Si le sujet est lié à un conflit, nous appelons les deux parties, typiquement le patient et l’établissement. Il arrive que les professionnels ne nous répondent pas, ou pas dans des délais raisonnables. Or, comme l’a souligné Pascale Primi, journaliste à Nice-Matin qui a occupé à peu près tous les postes à la rédaction, le silence génère de la suspicion. Nous estimons que les lecteurs doivent avoir des réponses. Le mutisme s’apparente souvent à un aveu coupable. Pour conclure, il nous faut préciser que nous ne pouvons pas tout publier. Que les conflits personnels ne peuvent être médiatisés, surtout lorsqu’il y a des enfants en présence. Il arrive que des parents séparés cherchent à régler leurs comptes par voie de presse. Nous n’avons pas compétence en cela, c’est du ressort des tribunaux. Voilà pourquoi nous accordons de l’attention à chaque histoire sans forcément lui consacrer un article.