Assises : enquête orientée par des témoins anonymes
Les enquêteurs de la police judiciaire ont expliqué hier qu’ils avaient rapidement bénéficié d’informateurs et de témoins anonymes, désignant les auteurs du double assassinat
Hier, c’était la journée des enquêteurs, devant la cour d’assises des mineurs du Var, au palais de justice de Draguignan. Elle juge en appel un père (JeanClaude) et son fils (Thierry, 16 ans au moment des faits), de la cité de la Cayolle dans le 9e arrondissement de Marseille, pour l’assassinat de deux hommes, au coeur de la cité, le 24 août 2010 entre 16 h 30 à 17 h (lire nos éditions de mardi).
Abattus de près
Apparemment venus à un rendez-vous, depuis la cité Air Bel dans le 11e arrondissement, Mezut Erkol et Mohamed Karabernou avaient été pris pour cibles par deux tireurs. Le premier avait été retrouvé au volant d’un 4x4 de luxe, atteint d’une balle de pistolet dans le thorax. Le corps du second gisait dans la rue, le crâne éclaté par une cartouche de chevrotines tirée à bout portant. Aucun témoin ne s’est manifesté auprès des policiers de la brigade criminelle. Et leur enquête de voisinage n’a pas apporté d’élément déterminant.
Auteurs désignés très rapidement
Si ce n’est toutefois qu’une riveraine avait aperçu un homme brun d’une trentaine d’années, athlétique, métis, enlever une volumineuse perruque noire et partir en courant vers la cité voisine, avec une arme longue à la main. Mais dès le lendemain, les policiers avaient été destinataires d’un renseignement anonyme leur indiquant que les auteurs de ce double assassinat étaient Jean-Claude et son fils Thierry. Le 7 septembre 2010, deux semaines après les faits, deux témoins sous X avaient été entendus. Le premier indiquait que toute la cité de la Cayolle disait que le père et le fils étaient les auteurs du crime, pour un litige concernant une épicerie de la cité Air Bel, que Mohamed Karabernou revendiquait. Le second s’était présenté comme un témoin oculaire. Il disait avoir vu passer devant lui Jean-Claude et Thierry, excités, avec des perruques à la main, le père tenant une arme de poing dans son dos, et le fils un fusil à canon scié. Cinq minutes plus tard, il avait entendu des détonations et les avait vus repasser dans l’autre sens, le père criant à son fils : « Tu lui as explosé la tête. »
Quel crédit accorder aux témoins sous X ?
Me Éric Dupond-Moretti a résumé la position de la défense en quelques questions au directeur d’enquête. « Sur le plan matériel, vous avez quelque chose contre les accusés?» - «Non.» « Ces témoins sous X qui vous donnent des informations, ont-ils été confrontés avec les accusés ? » - « À ma connaissance, non. » « Ces X, ce sont des gens honnêtes ou déjà condamnés ? » - « Je ne peux pas vous donner des éléments sur ces personnes. C’est le législateur qui l’a prévu. » « Vous avez autre chose contre les accusés ? » - « Je trouve que c’est déjà pas mal. Vous savez, à Marseille, on a beaucoup de règlements de comptes. Dans cette affaire, on a trouvé les témoignages sous X particulièrement crédibles. Notamment celui qui est placé sur la scène de crime, et qui a décrit les accusés avec force détails. » La cour consacrera sa journée d’aujourd’hui aux expertises et aux témoignages.