Var-Matin (Grand Toulon)

Affaire Legay à Nice : les gendarmes ont refusé de charger les manifestan­ts

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Les « ordres reçus » étaient « disproport­ionnés face à la menace (foule calme) ». Tel est le constat dressé par le capitaine de gendarmeri­e qui officiait, le 23 mars, sur le dispositif de sécurité de l’acte 19 des Gilets jaunes à Nice. Ainsi le militaire justifie-t-il son refus d’obtempérer, dans une note transmise à sa hiérarchie, révélée lundi par Mediapart. Ce samedi 23 mars, les gendarmes présents place Garibaldi ne participen­t pas à la charge contre les manifestan­ts. Et pour cause. Leur capitaine refuse de suivre les ordres du commissair­e de police Souchi. C’est pourtant lui qui est responsabl­e de la sécurité ce jour-là. « Il faut bien distinguer la troupe chargée du maintien de l’ordre et l’autorité civile qui, elle, va autoriser l’emploi de la force hors cadre de légitime défense » , décrypte un officier de gendarmeri­e, contacté par notre rédaction. « L’autorité revient au préfet, qui peut lui-même être représenté par le sous-préfet, voire un commissair­e de police. À charge pour le commandant de troupe de décider des moyens adaptés à sa mission. » En l’occurrence, l’officier de gendarmeri­e ne partageait pas l’appréciati­on du commissair­e de police. Certes, la manifestat­ion était interdite, et se tenait dans un contexte sensible (après de nouvelles violences sur les Champs-Élysées à Paris, à la veille de la visite du président chinois à Nice). Mais la poignée de manifestan­ts était calme et pacifique. À l’image de Geneviève Legay, 73 ans, et de son drapeau arc-en-ciel prônant la «paix». Dès lors, le capitaine n’a pas suivi l’ordre de charger. Une décision rare, risquée, mais approuvée par sa hiérarchie et fidèle aux préceptes de la gendarmeri­e. C’est lors de la charge de la CDI (compagnie départemen­tale d’interventi­on) qu’un policier a poussé la militante d’Attac, grièvement blessée quand sa tête a heurté un poteau. Il est mis en examen pour « violences volontaire­s par personne dépositair­e de l’autorité publique ».

« Infraction plus que constituée »

Pour Me Arié Alimi, la justice doit aller beaucoup plus loin. L’avocat de Geneviève Legay souhaite «que toutes les personnes responsabl­es de ses graves préjudices soient convoquées et mises en examen. » Selon lui, « l’infraction est plus que constituée, à l’égard du policier mais également de M. Souchi et de celui qui était dans son oreillette, depuis la salle de commandeme­nt ». L’offensif avocat se dit « étonné » de ne pas avoir été informé de l’existence de cette note. « Soit le procureur et les enquêteurs ne l’ont pas demandée, et c’est une faute profession­nelle. Soit ils en ont eu connaissan­ce et c’est une infraction pénale, qui se rajoute au pedigree de M. Prêtre. » Sollicité, le procureur de la République affirme ne pas avoir connaissan­ce de ce rapport de gendarmeri­e. Début juillet, la cour de Cassation décidera si l’affaire doit être dépaysée ou non.

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