Affaire Legay à Nice : les gendarmes ont refusé de charger les manifestants
Les « ordres reçus » étaient « disproportionnés face à la menace (foule calme) ». Tel est le constat dressé par le capitaine de gendarmerie qui officiait, le 23 mars, sur le dispositif de sécurité de l’acte 19 des Gilets jaunes à Nice. Ainsi le militaire justifie-t-il son refus d’obtempérer, dans une note transmise à sa hiérarchie, révélée lundi par Mediapart. Ce samedi 23 mars, les gendarmes présents place Garibaldi ne participent pas à la charge contre les manifestants. Et pour cause. Leur capitaine refuse de suivre les ordres du commissaire de police Souchi. C’est pourtant lui qui est responsable de la sécurité ce jour-là. « Il faut bien distinguer la troupe chargée du maintien de l’ordre et l’autorité civile qui, elle, va autoriser l’emploi de la force hors cadre de légitime défense » , décrypte un officier de gendarmerie, contacté par notre rédaction. « L’autorité revient au préfet, qui peut lui-même être représenté par le sous-préfet, voire un commissaire de police. À charge pour le commandant de troupe de décider des moyens adaptés à sa mission. » En l’occurrence, l’officier de gendarmerie ne partageait pas l’appréciation du commissaire de police. Certes, la manifestation était interdite, et se tenait dans un contexte sensible (après de nouvelles violences sur les Champs-Élysées à Paris, à la veille de la visite du président chinois à Nice). Mais la poignée de manifestants était calme et pacifique. À l’image de Geneviève Legay, 73 ans, et de son drapeau arc-en-ciel prônant la «paix». Dès lors, le capitaine n’a pas suivi l’ordre de charger. Une décision rare, risquée, mais approuvée par sa hiérarchie et fidèle aux préceptes de la gendarmerie. C’est lors de la charge de la CDI (compagnie départementale d’intervention) qu’un policier a poussé la militante d’Attac, grièvement blessée quand sa tête a heurté un poteau. Il est mis en examen pour « violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ».
« Infraction plus que constituée »
Pour Me Arié Alimi, la justice doit aller beaucoup plus loin. L’avocat de Geneviève Legay souhaite «que toutes les personnes responsables de ses graves préjudices soient convoquées et mises en examen. » Selon lui, « l’infraction est plus que constituée, à l’égard du policier mais également de M. Souchi et de celui qui était dans son oreillette, depuis la salle de commandement ». L’offensif avocat se dit « étonné » de ne pas avoir été informé de l’existence de cette note. « Soit le procureur et les enquêteurs ne l’ont pas demandée, et c’est une faute professionnelle. Soit ils en ont eu connaissance et c’est une infraction pénale, qui se rajoute au pedigree de M. Prêtre. » Sollicité, le procureur de la République affirme ne pas avoir connaissance de ce rapport de gendarmerie. Début juillet, la cour de Cassation décidera si l’affaire doit être dépaysée ou non.