L’université de Toulon en exemple national
Le rapport parlementaire publié hier fait le point dans les métiers de la sécurité et évoque des « zones d’ombre » en particulier à l’université et dans les prisons
Les services publics, notamment les secteurs cruciaux de la sécurité et de l’éducation, sont peu touchés par la radicalisation mais la menace persiste et des progrès restent à faire dans les prisons, la santé ou les transports, selon un rapport parlementaire publié hier. Dans un pays marqué par les attentats et le départ de plus de 1 500 personnes en Irak et en Syrie, les députés rapporteurs du texte, Eric Poulliat (LREM, Gironde) et Eric Diard (LR, Bouches-du-Rhône), se veulent globalement rassurants tout en appelant à la vigilance. « La radicalisation est loin d’être un problème majeur au sein des services publics, l’Etat a pris des mesures ces dernières années, donc certaines fonctionnent bien. Mais il suffit d’un cas, et il existe encore des trous dans la raquette », explique Eric Poulliat. Constat partagé par le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, qui a assuré que le phénomène est « extrêmement circonscrit » mais qu’il faut « rester vigilant » notamment dans le milieu du « sport » ,de « l’accompagnement scolaire » et des « prisons », a-t-il précisé à l’Assemblée nationale.
Un nombre insignifiant
Selon le député de Gironde, la radicalisation suppose de considérer que « l’action violente contre l’Etat » est « légitime » mais « ne doit pas être confondue avec une pratique rigoriste de la religion, le fondamentalisme ou les atteintes à la laïcité ». Le rapport, fruit d’entretiens menés
depuis l’automne avec des responsables de services publics, conclut que l’armée, la police, la gendarmerie et l’Education nationale « ne sont touchées par la radicalisation que de façon
marginale ». Le rapport s’inquiète toutefois de « zones d’ombre » persistantes dans la santé, l’université [lire cicontre], les transports, la détention carcérale et le sport, faute de prévention, de détection ou d’une « prise de
conscience » suffisantes. Il souligne particulièrement le niveau de radicalisation chez les détenus, inquiétant dans un contexte de « surpopulation carcérale ».
Côté transports, à l’aéroport RoissyCharles de Gaulle, sur 80 000 personnes titulaires d’un badge d’accès aux zones « réservés », 80 personnes font l’objet d’un suivi régulier pour radicalisation et 29 d’un suivi ponctuel, note le rapport. La RATP a indiqué aux auteurs du rapport avoir reçu plus d’une centaine d’avis négatifs sur des candidatures d’agents de la part du Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS), créé en 2017 et chargé de détecter les profils suspects au sein de l’administration. L’un des kamikazes des attentats de novembre 2015 au Bataclan, Samy Amimour, avait été chauffeur de bus RATP.
Comment séparer le bon grain de l’ivraie ?
Plus globalement, les deux députés ont « constaté une montée du communautarisme dans certains métiers liés aux transports ». « Même si ça ne veut pas dire radicalisation, c’est parfois une étape vers la radicalisation », a souligné Eric Poulliat. Dans le sport, ils ont remarqué « une montée des clubs communautaires, dans le football par exemple » et « une infiltration radicale dans les sports de combat ».
Le rapport souligne également la difficulté de se séparer d’un agent identifié comme radicalisé. Si celui-ci conteste son licenciement en justice, le tribunal n’a en général pas accès aux informations prouvant sa culpabilité, que les services de renseignements rechignent à partager. Le rapport évoque l’idée d’autoriser les services à ne donner leurs informations qu’au juge, et pas aux autres parties. « On est conscient que ces mesures peuvent apparaître comme liberticides », affirme Eric Poulliat. « Mais dans des métiers qui concernent notre jeunesse, on peut mettre le sujet sur la table », estimet-il.