Var-Matin (Grand Toulon)

Soutenir l’enfant lorsque son parent est malade Psycho

Quand un accident, une pathologie grave ou un handicap frappe un père ou une mère, le soutien psychologi­que est fondamenta­l pour toute la famille, y compris les plus jeunes

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

L’enfant, petit être en devenir, ne devrait pas connaître la maladie de près ou de loin, ne devrait pas être confronté à des traumatism­es, ne devrait pas être témoin de drames… Mais la vie est ainsi faite qu’il arrive qu’un bambin se retrouve confronté à l’adversité, notamment lorsqu’un parent tombe malade. Comment l’accompagne­r et l’aider à surmonter au mieux ces épreuves ? Hélène Brocq est psychologu­e clinicienn­e au CHU de Nice, dans le service « Médecine physique et réadaptati­on », dirigé par le Pr Manuela Fournier. Elle rencontre chaque jour des familles confrontée­s à la maladie ou au handicap. Et lorsqu’un parent est hospitalis­é, après un accident ou après l’annonce d’une pathologie grave, il faut prendre en charge les plus jeunes, du bébé à l’ado.

Les rôles redistribu­és

« La famille projette sur l’enfant ses propres angoisses, ses peurs, ses faiblesses. Alors, parfois, on n’ose pas lui dire que son papa ou sa maman est très malade. Pourtant, il vaut mieux le faire : il faut parler, il faut mettre des mots sur ce qu’il se passe et lui montrer qu’on peut traverser cette épreuve ensemble ,résume Hélène Brocq. L’enfant est bien plus solide qu’on ne le pense, il faut lui faire confiance. Il a besoin de participer émotionnel­lement à la situation familiale nouvelle et de se représente­r ce qu’il est en train de se passer pour être capable d’y faire face. Beaucoup de ceux que je vois me confient : “De toute façon, les moments difficiles, je vais les vivre, alors autant me les dire pour que je sois préparé.” C’est important de penser à apaiser la souffrance ; sans cela, elle risque d’envahir tout le champ psychique. » Lorsqu’une personne est admise dans le service (quel que soit le motif médical), la psychologu­e la rencontre. « Très rapidement, le patient parle de son (ses) enfant(s). Il s’inquiète pour lui (eux). Il évoque la sensation de ne pas être en mesure de soutenir les siens parce que la maladie le place dans la posture de celui qui en appelle au soutien des autres ; alors qu’en tant que parent, il est normalemen­t un pilier de la famille. L’entretien est souvent centré sur cette question, sur les rôles qui sont forcément redistribu­és. » Dans un deuxième temps, c’est avec l’autre, celui qui doit continuer à gérer le quotidien et le foyer, qu’Hélène Brocq travaille. En discutant, elle saisit les appréhensi­ons, qu’elles soient verbalisée­s ou non. « Il a l’intuition qu’il doit parler à son enfant mais craint de faire plus de

« Parler et montrer qu’on peut surmonter l’épreuve ensemble »

Hélène Brocq mal que de bien. Il se sent parfois totalement démuni. C’est important alors de pouvoir s’adresser à un psychologu­e pour que les répercussi­ons de la maladie grave ou du handicap – sur le patient comme sur l’entourage – soient elles aussi prises en charge. »

Respecter les mécanismes de défense

Inutile de cacher la vérité, le toutpetit, comme l’ado, ressent les choses. Or, si une chape de plomb s’installe autour de lui, l’enfant risque d’imaginer des choses pires qu’elles ne le sont en réalité. « Si le silence s’est installé et si la maladie évolue défavorabl­ement, les parents se retrouvent pris au piège de leurs nondits et, devant la gravité de la situation, ils paniquent. » Pour autant, il ne faut pas brûler les étapes. Le tout est de dire, mais dans le bon tempo. « Il faut s’écouter pour savoir quand on est prêt à

parler avec son enfant, confie Hélène Brocq. Ne pas vouloir tout dire trop vite, au risque que cela ne fasse trop d’un coup. Et laisser le dialogue ouvert pour pouvoir en reparler, éventuelle­ment réexplique­r la situation différemme­nt. Cela implique d’épouser le rythme et le niveau de compréhens­ion de chacun : répondre aux questions avec des mots simples, en respectant les mécanismes de défense qui sont mobilisés pour faire face à l’angoisse. » Un jeune se mure dans le silence ? Les premiers temps, c’est normal. Si cela perdure, il faudra en revanche rouvrir le dialogue. Le rôle d’un psychologu­e est justement de donner du liant à la conversati­on, d’aider les familles à se parler sans avoir peur de causer du chagrin à l’autre.

Psychologu­e clinicienn­e

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