Var-Matin (Grand Toulon)

« Participer ne suffit pas»

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Ce n’est pas une contrainte pour moi. Mais ça l’est pour les gens autour”

C’est un week-end qu’ils attendent depuis bien longtemps. Celui qui cristallis­e les tensions. Les gymnastes de l’équipe de France visent un ticket pour les prochains Jeux Olympiques de Tokyo () lors des Mondiaux à Stuttgart (Allemagne). Pour cela, les Bleus doivent terminer dans les douze premiers. Parmi eux, plusieurs gymnastes antibois dont l’entraîneur Rodolphe Bouché, membre du staff. Pour celui qui a commencé la gym il y a quarante ans, c’est un rendezvous plein d’adrénaline. Il s’y plonge avec ambition et déterminat­ion. Comme il le fait depuis ses débuts au bord des tapis…

Comment s’organisent ces championna­ts du monde ? Il y a huit compétitio­ns avec trois équipes dans chacune d’elles. Les Mondiaux se déroulent sur deux jours, en sachant que la Chine, la Russie et le Japon sont déjà qualifiés. Il reste neuf places à prendre. C’est la seule façon de décrocher les derniers tickets pour les Jeux Olympiques en équipe.

Depuis quand les gymnastes se préparent ? Depuis les Jeux de Rio, il y a trois ans (rire) . Mais il y a eu beaucoup d’événements, notamment des arrêts et des blessures qui ont malmené notre collectif. Tous les gymnastes ont été impactés, certains ont même arrêté ! Il y en a cinq de moins sur un collectif de quatorze ou quinze. En plus, ce n’était pas les plus mauvais ! (sourire) On se retrouve dans le peloton avec tout le monde. Il faut essayer d’arriver dans les neuf premiers, ce qui va être très chaud. Il y a cinq gymnastes au total, quatre qui passent sur chaque agrès et on garde les trois meilleures notes.

Vous êtes en plus diminués… Kevin Carvalho s’est cassé le genou en stage. Antoine Borello est devenu titulaire et sera en lice dimanche (aujourd’hui). Kevin Antoniotti est là, mais en tant que remplaçant. Si un “gym” se blesse d’ici le début du concours, c’est lui qui rentre.

Où situez-vous la France sur le plan mondial ? Elle est dans un Top , mais plutôt vers la fin du Top . On se situe entre la e et la e nation mondiale. On a connu mieux, jusqu’en  on était bien mais il y avait déjà les prémices d’un système qui s’essoufflai­t. Toutes les autres nations se sont profession­nalisées, nous non. Quand les finances diminuent, ton système est moins alimenté et tu fais avec ce que tu as. Les autres nations mettent de plus en plus de moyens…

La ville d’Antibes est bien représenté­e dans ces Mondiaux ! Il y a trois gymnastes du Pôle France dans l’équipe de cinq et deux du club d’Antibes (). Ça montre toute la dynamique.

C’est une vitrine, le club et le Pôle sont toujours liés. Mais ce sera bien si on fait quelque chose. On est là pour faire du haut niveau, participer ne suffit pas. On ne va pas se voiler la face, notre premier adversaire c’est nous-mêmes. On doit faire  % de ce qu’on est capable de faire et on verra ce que ça donnera. Si on fait notre travail, on peut finir onzième ou douzième, c’est délicat. Si on arrive dans les douze, on passe ().

C’est une fierté pour Antibes ? Ah oui ! Surtout par rapport à notre histoire et au fait que le système a voulu tout centralise­r sur Paris. L’ensemble des gymnastes seniors qui étaient au Pôle ont été contraints de monter à Paris ou l’ont fait par choix comme Hamilton (Sabot) ou Samir (Ait Said). C’est là que ça se passait. Mieux vaut être près du bon Dieu, comme on dit (sourire). On s’est retrouvé dépouillé de notre dynamique. C’est important d’avoir des exemples, alors on s’est retroussé les manches et il a fallu remonter un système pour retrouver la dynamique. Avoir quatre Antibois ou issus de la formation antiboise en équipe de France, oui, c’est une fierté. Ça montre la pérennité de notre système.

Samir Ait Said et Loris Frasca sont des cadres du groupe ? Ils sont bien installés, ils sont indéboulon­nables. On ne peut pas faire sans eux, ce sont des pièces maîtresses même si tous les gymnastes doivent être bons. Il n‘y a pas plus ou moins d’exigence selon les gymnastes. Ils doivent être bons et productifs, chacun à leur niveau. On leur demande de jouer toutes les cartes qu’ils ont dans leur jeu.

Vous êtes dans le staff au côté de Philippe Carmona. Un autre produit antibois… Et il y a aussi Jean-François Blanquino, un juge internatio­nal qui sera sur la compétitio­n. Il y a un label antibois bien présent dans l‘équipe, ça a toujours été le cas. Disons qu’il y a trois grands pourvoyeur­s : Lyon, Antibes et l’INSEP. L’objectif des Pôles, c’est de fournir l’équipe de France.

Vous avez toujours la même motivation avec les années ? Oui, toujours. C’est une passion. Quand une histoire se termine, une autre commence. J’ai deux jeunes au pôle qui vont être dans le “game” pour les Jeux de  : Léo Saladino de Vallauris, qui est en train d’exploser, et Antoine Pochon qui est bourré de talent. Je suis reparti comme en  ! (sourire) On a près de cinq ans de boulot. Samir ? On verra, je serai son dernier entraîneur.

Vous rêvez de gym la nuit ? (Rire) C’est quelque chose de chronophag­e, d’énergivore. Toute ma vie est calée autour de ça. Ça fait  ans que je baigne dedans, mais ce n‘est pas un métier. Si je devais refaire ma carrière, je ne changerais rien. Je pense à la gym quand je me lève et quand je me couche, mais ce n’est pas du tout une contrainte pour moi. Ça l’est plutôt pour les gens autour… On ne peut pas faire ce métier sans être à  %. Des athlètes nous confient leur carrière, des parents nous confient leurs enfants. Le niveau d’exigence que j’ai avec les athlètes, je l’applique aussi et surtout à moi-même. Je suis un accompagna­teur de rêves.

1. Remplaçant, Kevin Antoniotti est licencié à l’OAJLP avec Samir Ait Said et Loris Frasca. 2. Les trois équipes qualifiées participen­t aux Mondiaux mais ne décrochent donc pas de ticket.

SA FICHE

Né le  janvier , à Angers (Maine et Loire).  ans. Professeur de gymnastiqu­e, Rodolphe Bouché a commencé son métier à Angers avant d’entraîner au Pôle France d’Antibes à partir de . « J'ai passé le Brevet d'État e degré et ils m'ont demandé de rester. » Il est aujourd’hui entraîneur cadre d'État et a pris la coordinati­on du Pôle il y a un an. Il fait également partie des entraîneur­s de l’équipe de France.

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(Photos Sébastien Botella et DR)
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