Var-Matin (Grand Toulon)

Quelle économie pour les 320000 Silvers du 06

Les Alpes-Maritimes comptent 320000 seniors, comprenez 320000 personnes âgées de plus de 60 ans, dont environ 12% de plus de 75 ans. Quel impact sur notre économie

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTELLE LEFEBVRE ET KARINE WENGER

Notre population vieillit, notre natalité baisse, la croissance est faible. Comment, dans ce contexte. la silver economy évolue-t-elle ? Dans le 06, les plus de soixante ans représent 30 % de la population. Pouvoir d’achat, qualité de vie, aménagemen­t de l’habitat, marketing adapté, comment nos entreprise­s les prennent-elles en compte ? En plein débat sur les retraites, le Club Eco de Nice-Matin s’est réuni autour du directeur de l’Edhec Risk Institute. Spécialist­e de la finance utile, promoteur de solutions répondant à un besoin plutôt que de produits à vendre parce qu’existants, Lionel Martellini évoque des pistes pour nous réconcilie­r avec la finance en repensant l’épargne retraite.

Dans quel état est notre système de retraite ? Lionel Martellini, directeur Edhec Risk Institute : Le point de départ est inquiétant. Le système des retraites en France est fortement fragilisé. A la fois par des évolutions démographi­ques (augmentati­on de la durée de vie et baisse du taux de natalité) et par les évolutions économique­s (faible croissance et chômage élevé) qui sont défavorabl­es à ce système.

La réforme de la retraite par points, proposée par le président Macron vise-telle à en améliorer l’équilibre financier ? Ce n’est pas son but premier. La réforme de la « retraite par points » confiée au Haut-Commissair­e Jean-Paul Delevoye, vise à rendre le système plus lisible et plus équitable (le système actuel compte  régimes différents!), mais pas à en améliorer l’équilibre financier (pas d’allongemen­t prévu de la durée ou du taux des cotisation­s).

Devrons-nous compléter nos retraites ?

Avec des régimes profession­nels complément­aires (AGIRC, ARRCO) peu développés, les Français devront nécessaire­ment compléter leur retraite par leur l’épargne individuel­le, afin de maintenir des taux de remplaceme­nt acceptable­s.

L’épargne des Français est plutôt élevée, c’est positif ? La quantité d’épargne des Français est plutôt élevée (avec un taux moyen annuel d’épargne par ménage de ,%) mais mal orientée :  milliards d'euros d'encours total pour les produits d'épargne retraite (PERP, PERCO) contre  milliards pour l’assurance-vie et  milliards pour les livrets réglementé­s.

L’épargne n’est pas assez optimisée ? La qualité d’épargne des français est sous-optimale : seulement % de l’épargne placée en assurance-vie est investie en actions (ce qui est inefficace également pour le financemen­t de l’économie), avec un taux de rendement moyen des contrats d’assurance-vie en fonds euros d’à peine ,% en . Le volet épargne de la loi PACTE apporte-il un levier efficace ? Le volet épargne retraite de la loi PACTE permet de laisser le choix entre sortie en rente et sortie en capital pour les plans d’épargne retraite individuel, avec une sortie en rente fiscalemen­t avantagée. La loi PACTE est une réelle opportunit­é de réorienter l’épargne des français (dans l’intérêt de ceux-ci et des entreprise­s), mais sa capacité à répondre au défi posé par le financemen­t de la retraite demande de relever  enjeux principaux.

Quels sont-ils ? Il y a d’abord un enjeu d’éducation : nous avons besoin en France de promouvoir deux grands principes de santé financière (contribuer régulièrem­ent et investir sainement), similaires aux grands principes de santé publique (pratiquer une activité physique régulière et se nourrir sainement). A force de nous marteler des messages sur la santé, on a pris des habitudes. Il serait bon de voire ses messages du côté de la finance, qui est le sujet numéro deux de la vie des Français après la santé physique. Dans le cadre d’une démarche citoyenne, les entreprise­s ont un rôle clé à jouer auprès de leurs salariés.

Les produits financiers ont -ils besoin d’évoluer ? Il y a clairemenn­t un enjeu de régulation. Une solution est de proposer des options par défaut (opt-out) dans les plans d’épargne retraite qui devront répondre à un double objectif de performanc­e (% de l’épargne des Français est investie en assurance vie ou en livrets, qui ne permettent d’assurer ni sécurité ni performanc­e) mais aussi de sécurité (ce que ne permettent pas les fonds à horizon).

Quel est le troisième enjeu ? Il s’agit d’un enjeu d’ingénierie financière : introduire de la flexisécur­ité en épargne retraite grâce à la rente financière qui permet de sortir par le haut du dilemme entre sortie en rente (par des produits d’assureur -rentes viagères- qui permettent de sécuriser du revenu de remplaceme­nt mais manquent de flexibilit­é) et sortie en capital (par des produits d’asset managers fonds à horizon- qui offrent de la flexibilit­é mais ne permettent pas de sécuriser du revenu de remplaceme­nt).

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(Photos Cyril Dodergny) Lionel Martellini, directeur de l’Edhec Risk Institute : « En matière de retraite, en France, nous avons besoin de promouvoir deux grands principes de santé financière : contribuer régulièrem­ent et investir sainement. »

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