Var-Matin (Grand Toulon)

Le phoenix

Fini, le président du RCT ? Certaineme­nt pas. S’engager en politique, s’investir au Sporting Toulon, faire de la télé... Tout est possible après une vie ovale

- PROPOS RECUEILLIS PAR RAPHAËL COIFFIER

Il pourrait écrire un livre. Plutôt une saga tant il a vécu plusieurs vies avec le RCT. Pour en connaître toutes les histoires, il faudrait partir des mois et des mois en vacances avec Mourad Boudjellal. Pas le temps. Son esprit est déjà ailleurs. Quelques notes suffiront...

Que retenir de ces  années ? Quand j’ai repris le club il y a  ans, je me suis d’abord retrouvé devant une assemblée peu amicale. Mais peu à peu, le vent a tourné. Les Toulonnais savent pertinemme­nt que je n’ai jamais fait semblant. J’ai passé tellement d’années magnifique­s au RCT. Grâce notamment aux supporters et aux partenaire­s... Pourquoi ce challenge risqué alors que votre maison d’édition se portait bien ? Pour le challenge. Pour changer le destin de ce club. Pour vivre et faire vivre des moments intenses. Si vous saviez le nombre de messages d’affection que je reçois ces derniers jours. C’est incroyable. Même de gens qui n’ont rien à voir avec le rugby mais qui ont suivi mon exemple. Ont monté des sociétés. C’est fou... Et pourtant, vous partez... J’ai bien vécu la crise des  ans, des  et des . Mais celle des , je la vis moins bien. Je suis venu au RCT pour connaître de nouvelles émotions et ça m’a fait rajeunir. Aujourd’hui, j’ai encore envie de rajeunir, donc... Donc il va vous falloir une source de jouvence... J’ai la faiblesse de penser que je suis assez bankable. J’ai des pistes, dont la présidence de la LNR – comme je l’ai lu – ne fait pas partie. Disons plutôt que ce n’est pas ma priorité. Resterez-vous dans le milieu sportif ? Jeune, je suivais deux clubs : le RCT et le Sporting. Le premier, c’est fait. Le second, c’est une piste... Mourad Boudjellal au Sporting, vous êtes sérieux ? Je rêverais d’une affiche Toulon - PSG ! Et comme je ne fais pas de différence­s entre mes rêves et mes ambitions... Avez-vous déjà pris des contacts à la Rascasse ? Non, et je n’ai pas dit que je vais reprendre ou filer un coup de main au Sporting. Disons que mon portable est ouvert et que ça m’amuserait. Revoir le club en Ligue , ça aurait de la gueule ! Bon, à part le ballon rond, vos autres pistes... J’ai une attirance pour la politique. Ce n’est un secret pour personne. Mais jamais à Toulon car j’ai du respect, non, de l’affection, pour Hubert Falco, qui est un très bon maire. Toulon a beaucoup de chance de l’avoir. Dans une autre ville ? Impossible... Plutôt sur le plan national. Il y a tant à faire... Auprès du président Macron ou d’En Marche ? Pas forcément. La politique ne se limite pas à ce seul parti. Mais il est trop tôt pour en parler... En effet, vous avez encore quelques mois de présidence à gérer... Et j’aimerais terminer en beauté. Sur un titre. Je sens qu’il se passe un truc dans ce groupe cette saison. Et contrairem­ent à ce que certains pensent, je vous l’affirme ici : le RCT sera champion avec Collazo. Vous ne regrettez pas votre ultime choix de coach ? Pas le moins du monde. Patrice est un sacré bonhomme. Droit. Franc. Il sait ce qu’il fait. Mais c’est aussi un écorché vif. Parfois difficile à apprivoise­r... Comme un certain Bernie le dingue... Ah, Bernard, il est exceptionn­el. Si un jour vous n’avez pas le moral, vous lui passez un coup de fil, et tout de suite ça va mieux... Vous formiez un sacré duo... Même si j’ai beaucoup aimé Fabien Galthié, Laporte était au-dessus. Je me souviens d’un match au Racing lors de sa première saison à Toulon. À la mi-temps, on mène de  points. Dans les vestiaires, il a tenu un discours de fou aux joueurs. Il gueulait : « Si on gagne, on va monter, monter, monter, et personne ne nous arrêtera... » J’en ai encore les poils qui se dressent. Quel putain de coach... Il vous a manqué ? Forcément. J’ai été orphelin après son départ. En plus, on se marrait bien. À la limite du spectacle comique. Et je ne suis pas peu fier de lui avoir cloué le bec une fois. Juste une fois. On devait jouer Clermont en coupe d’Europe et il n’arrêtait pas demedire:« Pour être champion d’Europe, il nous faut un ailier de très haut niveau. Tu comprends. Tu comprends. » Un matin, je l’ai retrouvé à Berg et je lui ai demandé ce qu’il pensait d’Habana. « Habana, Habana, c’est le top. » Eh bien tu l’as. Oh la tête ! Il pouvait aussi être raide avec les joueurs... Je l’ai vu détruire un joueur dans le vestiaire. Sauf qu’une semaine après, il lui tombait dans les bras parce qu’il venait de sortir une grosse partie. Bernard, c’est un ovni avec bac+ ! Et un bon compagnon de soirées... À tel point qu’il n’a jamais signé le contrat de sa dernière année. On avait descendu quelques bonnes bouteilles. Il m’avait donné son accord et ça suffisait. Avec lui, il y avait un capital confiance énorme. Vous vous rendez compte de toutes ces stars que vous avez engagées, à commencer par Umaga ? Je voulais réussir des trucs impossible­s. Encore plus en Pro D. En fait, Tana, je suis entré en contact tout doucement avec lui et il est devenu toulonnais. Ensuite, je me suis pris au jeu. J’étais dans une démarche altruiste et j’ai vite compris que pour exister il fallait inventer le Top  ! C’était excitant ? Follement. Découvrir Sonny Bill Williams et l’engager à l’instinct, quel pied. Et signer Jonny Wilkinson... Étiez-vous proches de tous ces joueurs ? Impossible. J’étais dans la culture du CDD imposée par le sport pro. Pour certains mecs, je le regrette aujourd’hui... Avez-vous eu peur parfois devant certains gabarits ? Je me souviens de Botha. On avait une procédure ensemble car il était blessé, et je souhaitais que ce soit l’Afrique du Sud qui paye. Mais ça traînait. Un jour, sans frapper, il débarque dans mon bureau. S’assoit devant moi et commence à faire craquer ses doigts. Là, dans ma tête, je le vis mal et je repère la porte. Au final, j’ai réglé l’affaire ! Je pourrais vous parler aussi d’Umaga... Il fait craquer ses doigts ? Non, il me crie dessus parce que je veux remplacer Crenca par Hueber. Je suis resté digne mais en fait j’étais moyen. Il m’aurait ordonné de faire des pompes que je les aurais faites ! Il n’y a jamais vraiment eu de garçons ingérables ? Il y a eu un cas compliqué, le regretté Jerry Collins. Il a fait beaucoup de conneries à Toulon. Au point que dès la première saison – il avait trois ans de contrat – il lui a été conseillé de quitter la ville. Il m’a promis de le faire une fois que le RCT serait maintenu. Un regret ? Le principal : ne pas avoir gardé Pierre Mignoni. Là, j’ai fait une bêtise... Vous n’avez pas été épargné aussi durant votre présidence... J’ai eu mon lot de soucis. On voulait ma peau car je ne rentrais pas dans le moule et j’avais l’ambition de dépoussiér­er le milieu. Un peu comme Max Guazzini. Pourtant, ceux qui me connaissen­t savent que je suis un type normal. Qui fait ses courses, va voir sa maman à midi. Je vis dans le monde réel. Seulement, je suis de Toulon et je crains dégun ! Allez-vous souffler un peu ? Juste un break. Je ne compte pas manifester pour les retraites. Moi, si je m’arrête, je suis mort...

Je rêverais d’une affiche Sporting Toulon - PSG... ”

Bernard (Laporte), c’est un ovni avec bac plus neuf ”

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