Une nécropole mise au jour
Un chantier archéologique mené sur le site d’un projet immobilier, dans le quartier Quiez, vient de mettre au jour des traces d’occupations humaines sur une période de plusieurs milliers d’années
La vision d’un os humain fait toujours son petit effet. Alors imaginez quand toute une nécropole est mise au jour, voire quand des bébés sont découverts dans des amphores ! Les spécialistes d’Archeodunum, opérateur en archéologie préventive, en ont vu d’autres, eux. « On ne parle pas de cadavres, mais de squelettes », nuance le scientifique Bruno BoscZanardo. Certes. Ce lithicien est le responsable de
(1) l’opération qui s’est tenue ces derniers mois dans le quartier Quiez, au sud de la DN8, sur une zone de près de 2 hectares située derrière la coopérative oléicole. Il s’agissait pour son équipe de « purger la contrainte archéologique » du terrain avant que n’y pousse, irrémédiablement, un charmant programme immobilier. Aujourd’hui, la mission de Bruno Bosc-Zanardo s’achève avec le sentiment d’avoir percé un bout d’histoire ollioulais sur ce « site très dense ».
Une occupation préhistorique
En plus de soixante-deux squelettes datés de la fin de l’Antiquité (pour 33 tombes !), ou de quelques individus enterrés il y a cinq ou six siècles, une sépulture néolithique a ainsi été révélée. Autrement dit, la trace d’une occupation du site qui remonte à plus de 5000 ans, soit la préhistoire récente. Des vestiges provenant du Moyen-Âge - une calade, des fours… - et du XIXe siècle - un aqueduc - ont également été exhumés des sols argileux. « On savait la zone riche en termes d’archéologie, explique notre spécialiste. Mais on n’imaginait pas à quel point. » D’ailleurs, d’une manière générale, ce genre de scientifique particulièrement érudit imagine assez peu… s’en tenant aux faits démontrés, et rien qu’aux faits. Quand on les questionne sur la gigantesque fosse médiévale qu’ils viennent de dénicher, personne ne se risque à supputer sa fonction. À peine nous glissera-ton, pour un trou tout aussi mystérieux datant du néolithique, qu’il pourrait s’agir d’une fosse d’extraction de matières premières.
De la vigne antique
D’autres découvertes sont plus probantes, comme ces petits sillons qui ont jadis accueilli des ceps. Autant de traces de plus d’un millier de pieds de vigne remontant elles aussi à l’Antiquité, autour du Ier ou IIe siècle apr. J.-C. en
pleine Pax Romana. De là à supposer que l'on produisait ici l'ancêtre du bandol, à quelques kilomètres du pôle urbain Telo Martius, il y a un pas… que les amateurs de mourvèdre se refuseront à franchir. Plutôt un vinaigre qui, à l’époque, se buvait coupé avec de l'eau, voire aromatisé avec des épices ou du miel ! En revanche, pas d’indices sur la présence d’un éventuel petit domaine agricole sur la parcelle, pas plus que de « gauloiseries ». Et, si l’on excepte les ossements, guère de mobilier. A quelques céramiques, silex, verres ou objets en
métal près, évidemment. « On pense que le terrain, en pente, a pas mal subi l’érosion. Tout doit
être rendu en bas » soupire Bruno Bosc-Zanardo en montrant la route un peu plus loin. Désormais, à la suite des petites mains expertes d’Archeodunum, le site s’apprête à accueillir les pelleteuses de la Cogedim, le promoteur immobilier. Que va devenir le « butin » archéologique issu des fouilles ? « On va tout embarquer, répertorier, analyser pour nourrir notre connaissance sur les modes de vie de nos ancêtres et sur l’histoire locale, poursuit le chef d’équipe. Moi, par exemple, j’en ai encore pour deux ans de travail post-fouilles à étudier ce qu’on a ramené du chantier. » Les gros engins de terrassement, eux, vont moins s’embarrasser : faute de découvertes majeures, ils recouvriront toutes ces traces de notre lointain passé en quelques jours à peine. 1. Archéologue spécialiste de l’étude des outils en pierre taillée.