« Un désert immense et varié »
Avant l’embarquement des véhicules, David Castera, le directeur du Dakar, a mis le cap sur le Var, première terre d’accueil de la caravane. Il évoque le nouveau départ en Arabie saoudite
Le saviez-vous ? Le Dakar a pris son élan la semaine dernière tout près d’une piste située aux antipodes de celles, inconnues, que les concurrents vont bientôt sillonner en Arabie saoudite durant deux semaines (- janvier). Rendez-vous fixé dans un vaste hangar de l’aéroport du Castellet jouxtant le circuit Paul-Ricard où les véhicules de course et d’assistance se sont rassemblés en vue de l’embarquement à Marseille, dimanche. Évidemment, David Castera avait coché ce pointage incontournable sur son roadbook de patron de l’épreuve. L’ancien motard et copilote, promu aux manettes l’an passé avant l’ultime édition sud-américaine, a aussi fait un crochet par Fréjus afin de saluer Mathieu Serradori et son équipe, outsiders ambitieux sur quatre roues. L’occasion de lui demander de planter le décor du nouveau chapitre moyen oriental se profilant droit devant.
David Castera, pourquoi honorer de votre présence la « fête de famille » du Serradori Racing Team ? Tout simplement parce que j’aime cette équipe, son état d’esprit. On a vu le potentiel de Mathieu et du Buggy CR au Rallye du Maroc. Chez eux, on sent beaucoup de détermination, de l’envie. Ils ont, je le pense, la possibilité d’écrire une très belle histoire au Dakar. Le rallye-raid, ce n’est pas la F. Une structure privée solidement bâtie peut taquiner les écuries de pointe malgré son budget inférieur.
En combien de temps avez-vous conçu ce tout nouveau Dakar ? On a commencé dès notre retour du Pérou, début février. Organisation, logistique, reconnaissances : tout s’est enchaîné quasiment sans temps mort. Et le travail préparatoire continue. Ne croyez pas que c’est fini !
Quelle fut votre priorité numéro au moment de tracer le parcours ? Avant tout, je tenais à mettre en avant le sport, les valeurs du rallye-raid. Il faut que le pilote puisse exprimer sa pointe de vitesse, que le copilote se triture les méninges, et que le véhicule, quel qu’il soit, tienne le choc, la distance. En Arabie saoudite, les concurrents négocieront donc des étapes assez longues, plus longues.
Que vont-ils découvrir entre Jeddah et Qiddiya ? D’abord des paysages extraordinaires. Le pays, quatre fois plus grand que la France, offre une multitude de possibilités. Le désert est immense et varié. Il va en surprendre plus d’un. Je pense notamment à la première semaine. Juste magnifique, avec beaucoup de vastes canyons tout en pierre où il faut chercher sa trace. La seconde moitié, elle, s’avère plus classique. Du sable, des dunes... Il y a moins d’accroches montagneuses mais le terrain change sans cesse. Vraiment bluffant !
La course va explorer l’Empty Quarter, la plus grande étendue de sable au monde. Peut-on dire qu’il s’agit du nouveau désert du Ténéré ? Oui. L’une des étapes tracées dans le secteur comprend d’ailleurs une ligne droite de bornes. Mais là, en année , ce « quart vide », nous allons seulement le toucher, pas le traverser. Avec ses cordons de dunes presque trop abrupts pour nous, il semble impénétrable. Mieux vaut y aller crescendo.
Il paraît que la navigation redevient prépondérante. Vous confirmez ? Absolument ! Le roadbook sera parfois distribué le matin, avant le départ. La nature du terrain saoudien nous a aussi poussés à modifier l’écriture. Impossible de mentionner les pistes car elles sont trop nombreuses et se croisent partout, sans cesse. Seuls des caps sont donc indiqués. Aucune intersection ! De quoi mettre à rude épreuve le mental des copilotes qui devront garder la même direction en croisant cinq pistes, dix pistes, vingt pistes... Le doute sera permanent. Concentration et précision extrêmes de rigueur !
Les nouveaux concurrents sont-ils plus nombreux que d’habitude ? Bien sûr, nous avons perdu tous les Sud-Américains qui ne pouvaient pas s’offrir un si long voyage. En dépit de ce manque représentant environ % du plateau, le Dakar accueille plus d’engagés que l’édition précédente. Beaucoup d’Européens, sans doute attirés par l’aspect découverte, nous ont rejoints.
Parmi ceux-ci figurent un certain Fernando Alonso. Lors de son baptême du feu marocain, l’avez-vous senti déterminé à viser loin et haut en rallye-raid ? La détermination, sincèrement, je crois qu’il l’a. Mais quid de la patience ? En débarquant comme ça, on ne peut pas rêver de gagner le Dakar la première année. Je ne le connais pas encore assez bien, mais je sais que c’est quelqu’un qui ne fait pas les choses à moitié.
L’accord signé avec l’Arabie saoudite porte sur cinq ans. Aujourd’hui, croyezvous que le Dakar retournera en Afrique un jour ? J’aimerais dire oui... Tout le monde souhaite le voir renouer avec ses racines. Malheureusement, le contexte géopolitique n’a pas trop évolué depuis . La porte n’est pas fermée. Il faut avoir toutes les garanties en matière de sécurité. Nous ne les détenons pas pour l’instant. De nos jours, on peut y aller avec un petit rallye qui ne fait pas de bruit. À l’échelle du Dakar, c’est impossible.
Concentration et précision extrêmes de rigueur ”